Découvert dans Pitié ! sous la direction d’Alain Platel et de Fabrizio Cassol, Serge Kakudji nous laissa longtemps le souvenir d’une voix d’ange. Ce contre-ténor qui apprit à chanter en écoutant la radio dans son pays, la République démocratique du Congo, n’a jamais cessé ses allers-retours entre les continents.
Si Coup Fatal, dont il est l’un des initiateurs, lui tient tant à cœur, c’est aussi et surtout parce qu’il peut y mettre en avant d’autres musiciens. Car ce spectacle inclassable est à la fois un concert et une pièce où sont brassés le baroque européen et les percussions de Kinshasa, les numéros d’acteurs et les acrobaties vocales.
Alain Platel a apporté sa patte, sans rien imposer. Mais dans ce défilé de mode « sapeur » (terme désignant un élégant au Congo) d’une drôlerie irrésistible, on retrouve sans mal l’empathie propre au créateur belge. L’artiste Freddy Tsimba a imaginé pour décor un simple rideau de perles qui sont en réalité des douilles de carabines. Le réel n’est jamais loin… Sous la houlette du chef d’orchestre Rodriguez Vangama, c’est la musique qui triomphe : Bach rencontre la rumba et Nina Simone, tandis que balafon, xylophone ou likembe (piano à pouces) mènent la danse.
La vie semble ici circuler sans jamais prendre le temps de la pause. Coup Fatal, triomphe de l’édition 2014 du Festival d’Avignon, est une réponse parfaite en ces temps de repli. « Ce spectacle, c’est un immense cadeau », dit Alain Platel.
Philippe Noisette
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