Nouvelle version.
Réunir dans un même spectacle le souvenir de Cyd Charisse et le profil de Nosferatu, les paysages des westerns - surtout s’ils sont spaghetti - et les ombres sorties de l’imagination du poète et illustrateur Claude Ponti, c’est un peu l’exploit farfelu qu’accomplit Philippe Decouflé dans Sombreros. Il y a toutes les ficelles de l’enchantement dans cette odyssée dont Christophe Salengro, fidèle parmi les fidèles, est le chef d’orchestre bavard. Sombreros est une chorégraphie pour les sens : lumières, images, silhouettes, mouvements, rires, tout s’accorde dans un unisson qui n’a jamais rien de répétitif. Philippe Decouflé, qui autrefois se voyait dessinateur de BD, a le trait de génie d’interroger l’ombre et son cortège de questions.
Avant l’ombre qu’il y a-t-il ? Après l’ombre que reste-t-il ? Se souvenant des découvertes d’Oskar Schlemmer, l’homme du Ballet Triadique sous influence Bauhaus, d’Alwin Nikolais, chorégraphe des formes et des couleurs qu’il fréquenta à Angers, ou de Merce Cunningham, génie américain qui le premier flirta avec la vidéo, Decouflé fait de Sombreros un terrain d’expérimentations jouissif. Décor changeant par la magie de projections, jeu du chat et de la souris entre virtuel et réel de la chorégraphie, décalage musical entre la partition de Brian Eno et les créations sonores de Sébastien Libolt, cette œuvre a l’extrême élégance d’emporter le visiteur d’un soir dans un autre monde, fantasque et surprenant. Le plus difficile, une fois Sombreros terminé, est alors de revenir sur terre. Philippe Decouflé retrouve Chaillot, cela suffit à notre bonheur.
Philippe Noisette
Musique Brian Eno, Sébastien Libolt
Textes Claude Ponti
Distribution en alternance.
1, Place du Trocadéro 75016 Paris