Je suis née d’une mère volage et d’un père inconnu. Enfant du plaisir et non de l’amour, je n’appris jamais rien sur l’auteur de mes jours. Mon enfance fut morose, frileuse, traversée par de grands éclats de rire dans les salles de cinéma. Etudes primaires, peu d’amis, une famille disloquée vivant dans l’angoisse car d’origine juive. En ces temps de guerre, nous nous sentions tous traqués.
Très tôt - 15 ans, 16 ans – je colportais dans les boutiques pour touristes de minuscules pochettes de soie peintes par ma mère à l’effigie des monuments publics. Ça m’amusait beaucoup. Plus tard je fus modèle de coiffure pour l’Oréal, desserveuse dans un self service, baby-sitter quelque part à Lausanne, barmaid de nuit sur les Champs Elysées… de quoi assouvir mon avidité permanente. C’est précisément derrière un bar, un soir d’hiver, que me prit brutalement l’envie d’écrire – écrire vite, en vers, en prose, des textes courts et humoristiques -. Un jeune musicien fit couler autour une musique, assez basique mais alerte. Et voilà, je n’avais plus qu’à auditionner. En ai-je fait des scènes, petites, plus grandes, des galères comme on dit, mais la petite fille que je fus, si timide qu’elle débitait ses fables de dos, le nez sur le tableau, était devenue saltimbanque.
Dès lors ma formation artistique fut continue : cours de chant, de mime, de théâtre… j’avoue être devenue une chanteuse « qui a mal tourné » puisque le démon de la comédie me fit jouer Ionesco, Simone de Beauvoir, Jean Cocteau, et que j’écrivis Carmen Paradise, une pièce à deux personnages qui obtint en 1993 le prix France Culture. Ainsi la chanson déserta ma vie au profit du théâtre. J’ai écris aussi quelques nouvelles dans un magazine, et j’aurais pu en écrire bien d’autres si la solitude imposée par l’écriture ne m’avait rebutée. J’ai besoin de ma voix, de mon corps au service d’une fiction. J’ai besoin d’un public à qui les offrir, offrande réciproque car le talent d’écoute des spectateurs est immense.
Comment suis-je revenue à la chanson ? par une rencontre inattendue, magique : Roland Romanelli. J’avais plus ou moins l’idée de faire revivre les lieux mythiques de Saint Germain des Prés : le Tabou, la Rose Rouge, la Fontaine des 4 Saisons… où la chanson dite Rive Gauche s’apparentait étroitement à la comédie. Mais je souhaitais un grand musicien pour fortifi er mon projet : 21 titres à choisir, orchestrer, accompagner -rire et gravité, Gainsbourg, Ferré, Vian-. J’eus la chance que Roland Romanelli encouragea cette folle aventure ; folle car ces chansons « à text e» n’avaient jamais couru les dancings comme certains standards ce qui les rendaient, pensais-je, plus élitistes. Le succès presse et public fut quasi immédiat.
À partir du moment où je m’empare d’un texte peu importe que je l’aie écrit ou non. L’important est qu’il me mobilise entièrement, que je m’oublie dans son style et son rythme. Les mots, les notes, j’ai passé ma jeunesse à courir après. Enfant timide, je m’enivrais de la TSF, j’imaginais des vies extravagantes derrière le poste.
Sans doute, je n’ai pas su, trop introvertie, exploiter ma jeunesse au maximum. Par nature je suis gourmande, paresseuse… j’ai gardé la gourmandise et fouetté la paresse ! Pour le reste, 12 ans de psychanalyse m’ont appris le plus étonnant : dans une course l’important n’est pas tant le cheval mais notre position : pas dessous mais dessus pour pouvoir le conduire.
Corinne Cousin
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