Vous l’avez peut-être entre - aperçu, dansant la Rumba il y a trois ans sur un premier album bricolo -rigolo pas idiot qui recelait déjà des trésors d’astuces, affichait des prises de bec avec la langue et un refus poli mais ferme d’obtempérer aux obligations musicales du moment.
Soliste insolite, surfant à l’écart de la Nouvelle Vague de la chanson française - laquelle était alors plus vague que réellement nouvelle - Pascal Parisot mettait déjà en scène son aventure domestique sur des mélodies frivoles embaumant un doux et suave parfum d’exotisme en chambre. Son humour féroce, grinçant en glissant sur le toboggan pigeonnant de cette voix de crooner distingué, ne manqua pas d’évoquer le souvenir toujours flatteur de quelques noms illustres aux premiers rangs desquels figuraient Boris Vian et le Gainsbourg hautain et ravageur des débuts. Avec de tels parrains - auxquels on pourrait rajouter Nino Ferrer ou Boby Lapointe - Parisot se devait d’être à la hauteur et il le fut, tant grâce au maniement d’un verbe hilarant et cruel, à l’occasion tendrement vachard, que par l’élasticité d’une grammaire musicale aux provenances multiples.
Lorrain d’origine mais élevé au grand air des Vosges et aux airs captés au hasard de la radio familiale, Pascal s’est construit peu à peu une oreille, modelée à la fois par Villa Lobos que par les Beatles. Quatre ans de guitare classique, à l’adolescence, suffiront à le détourner des chemins rectilignes et à dévoyer ses désirs initiaux pour d’autres envies moins scolaires.
Mais avant d’apprendre à écrire des chansons, il aura pas mal usé celles des autres, filant exercer ses dons d’interprète caméléon en jouant dans les piano-bar. Un apprentissage qui durera dix ans, le forçant à exhumer les répertoires les plus divers et à donner du corps à sa voix histoire de couvrir celles des clients inattentifs. A cette époque, déjà envoûté par la grâce languide et l’amertume douceâtre des musiques brésiliennes, il s’approprie cette science ensorcelante et faussement sage de la Bossa, qui irriguera plus tard son propre jardin.
Avec quelques volontaires, dont le percussionniste - vibraphoniste Jacques Tellitocci qui ne l’a jamais quitté depuis et que l’on retrouve encore à l’œuvre sur le nouvel album, Parisot saute enfin le pas et se met à composer et à décorer les premières chansons qui figureront plus tard sur Rumba. Entre temps, il est l’un des rares artistes à décrocher un contrat discographique majeur après un simple envoi de cassette par la poste, ça alors !
Face à l’épreuve toujours un peu épineuse du second album, Pascal Parisot n’a pas décidé de violer sa nature ni d’entreprendre un chantier pharaonique. Au contraire, il a continué à faire selon son instinct, entouré de la même équipe réduite et complice des débuts : quelques musiciens inventifs, sa compagne Frédérique Dastrevigne dans les chœurs et les sorciers de studio du groupe Mellow (Pierre Begon-Lours et Stéphane Luginbühl) pour trier les pistes et apporter du relief au mixage. Une nouvelle rencontre, toutefois, aura permis de décanter quelques idées neuves.
Nicolas Réjac, un arrangeur -bidouilleur déjà remarqué dans l’ombre d’Arthur H., présentera l’avantage d’être le voisin de Pascal, ce qui facilitera considérablement la fluidité de leurs échanges. Equipés du même matériel informatique - Pascal progresse à grands pas, il y a quelques années il ne savait pas allumer un ordinateur - l’auteur-compositeur et son partenaire multicarte dialogueront ainsi à (faible) distance pour créer la charpente et l’ornement des nouvelles chansons. A la maison, avec sa collection d’orgues improbables, sa guitare bringuebalante, ses instruments de bric et de broc, Parisot a étayé son langage musical tout en peaufinant (avec un simple stylo et du papier) la subtilité de ses textes.
Comme à l’accoutumée, il promène un regard singulier sur les gens et les choses (et aussi les extraterrestres et les lapins nains), avec une acuité d’observation et une appréhension des espaces et des volumes que n’aurait pas reniées Jacques Tati. Ce sens aigu du détail, cette vision en coupe et sans prétention de la nature humaine et des épiphénomènes du quotidien, on le retrouve dans le choix maniaque des équilibres instrumentaux, du tombé parfait de chaque percussion, des constructions toujours trompeuses de ces chansons aux dehors simples, mais fourmillantes en dedans.
Une nouvelle fois, Pascal est allé à la pêche miraculeuse des rythmes venus d’ailleurs, ramenant dans ses filets quelques jolis spécimens de ces swings exotiques qui s’accommodent à merveille à la tonalité badine et ourlée de son chant. Par moment, Wonderful rappelle ce monument de coolitude que fut, à la fin des années 50, le Calypso is like so… de l’impeccable Robert Mitchum. A d’autres endroits, on pensera à un Jobim un peu jobard, à un Brassens sans dessus dessous (et sans moustache), toujours un peu beaucoup à Gainsbourg, évidemment.
Parmi les douze titres de ce disque éventail, on remarquera l’adaptation culottée de Quizas, quizas, quizas (Que je sache) ou le cadavre exquis des Gondoles à Denise, l’un des moments forts des concerts de Parisot depuis quatre ans, et qui fait pour la première fois son apparition sur disque. De la fausse candeur ironique de Tout va bien ou Les gens sont méchants jusqu’à la légèreté voulue, façon La croisière s’amuse, de Sombre héros, Pascal Parisot plane loin des névroses bourgeoises de la chanson Rive Gauche comme du néo-réalisme racoleur de la Rive Droite. Chanteur amuseur de l’entre-deux rives, extra et ordinaire à la fois, farouchement à part en tout cas, Parisot étonne et détonne sans jamais en faire des tonnes.
Cet(te) artiste n'est pas lié(e) en ce moment à un spectacle.
Théâtre des Bergeries, Noisy-le-Sec
Le meilleur de Pascal Parisot, c’est bien le programme qui vous attend, petits et grands, à la veille de Noël ! Après plus de 100 chansons écrites pour les enfants, l’artiste a créé ce nouveau spectacle avec une sélection toute choisie. A partir de 4 ans.
Théâtre Jean Arp, Clamart
Où l’on se fait un film sans se faire une toile. Ce concert-conférence-exposition invite de manière interactive à entrer dans l’imaginaire de neuf films qui n’existent pas. À partir de 12 ans.
Européen, Paris
Théâtre Jacques Carat à Cachan, Cachan
Le Centquatre (104), Paris
Cité de la musique (Philharmonie 2), Paris
Tallia, Paris
Jemmapes Théâtre, Paris