« Vous étiez tous là, mes inoffensifs pantins, suspendus au bout de vos fils, comme je vous voyais quand j’allais vous contempler et vous imaginer des aventures ou vous confier mes rêveries. (...) Etait-ce une hallucination ou l’effet de quelque jeu de lumière ? Mais il me semblait que les personnages, debout sur le devant du théâtre, venaient de bouger. L’une après l’autre toutes les marionnettes s’agitaient, au bout de leur fil, dans la clarté lunaire où elles étaient parfaitement distinctes. » Henri de Régnier, Histoires incertaines
« Comme en apesanteur, des jambes se posent lentement sur la scène blanche. Morceaux de corps sans visage encore, sans individualité propre - ensemble, sans être personne en particulier ; ils s’approchent de nous, mal assurés, avant de commencer à se singulariser, construisant autour d’eux de petits univers autonomes. Cette ouverture donne le ton de la pièce de Antje Pfundtner : une atmosphère qui oscille entre le merveilleux, l’imaginaire et l’humour décalé. »
Cinq présences - dont un pianiste : des corps abstraits ou animaux, enfantins ou mécaniques qui enchevêtrent leurs constructions fragiles - comme les personnages d’un théâtre de marionnettes rendus subitement à la vie, créatures qui tenteraient d’échapper à leur invisible manipulateur. De leurs gestes naissent des bribes d’histoires qui se développent et disparaissent pour laisser la place à d’autres débuts, sans fin. On se demande quelles mains les animent. Qui les fait entrer en collision pour aussitôt les séparer ?
Le pianiste - tour à tour jouant sur son instrument, le frappant, le martyrisant - semble mener le jeu. Comme un diable sorti de sa boîte, il donne vie à ces existences séparées. Mais personne ne fixe les règles du jeu. Lui-même entre dans la danse, entraîné par la musique qu’il a mise en mouvement. Il est soumis comme les autres aux moments de suspension qui les transforment en pantins sans vie.
Pourtant, au milieu du « chacun pour soi », quelque chose paraît les tenir ensemble. Le temps d’une danse - un moment de tango - des couples se forment, une intimité physique envahit la scène.
Comme le dit ironiquement le titre, ils sont les « seuls responsables » - mais de quoi ? De leurs choix, de leur solitude, du rire qu’ils provoquent ? « Dans toute histoire, le moment le plus important est celui de la décision », explique Antje Pfundtner. Incapables d’être ensemble, de former une communauté, ses personnages semblent ne jamais venir à bout de leur histoire et de l’énergie qui les traverse. L’espace, habité par la mélodie, devient la caisse de résonance de ce monde imaginaire, comme un refrain continuant à résonner dans nos têtes, et qui nous fait entendre les points de suspension de ce qui, en chacun de nous, ne veut pas finir.
Gilles Amalvi
Musique : Dayton Allemann
Lumières : HW Ahrens
« Table rase. Tapis de sol blanc, écran blanc. Rien. Le silence. Pour sa première pièce de groupe, Antje Pfundtner commence de zéro, du début : telle une chorégraphe-conteuse d’histoires sur la vie et la danse. (…) Accompagnée de trois danseurs, elle continue de débiter ses pensées, prenant forme dans les images de corps grotesques, de luxations et d’accidents.(…) Le sarcasme résonne à travers de saisissantes images à doubles sens sur l’existence. Pièce forte et suggestive, selbstinschuld confirme l’originalité d’un talent en pleine maturité. » Klaus Witzeling in ballet-tanz
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