Cinema Cielo (Hors les murs)

Lieu : 32, rue des Cordes à Caen

Spectacle en italien surtitré en français

Un ange aux ailes rouges tire un rideau et dévoile le décor du théâtre, une salle de cinéma : deux rangées de fauteuils rouges, l’entrée au fond avec sa caissière, la cabine du projectionniste, la porte battante des toilettes. Sur les fauteuils quelques mannequins. Un comédien entre - un client - et puis d’autres. Voici donc, se faisant face, de vrais spectateurs de théâtre et de faux spectateur de cinéma, séparés par un grand écran virtuel sur lequel est projeté un film dont on entend seulement la bande son.

L’ange est un travesti, le cinéma Cielo est un cinéma porno, le film que nous ne voyons pas est une adaptation de Notre Dame des Fleurs de Jean Genet. Sur l’écran, Divine, le héros travesti de Genet aime, drague, souffre, espère, tue se fait couper la tête. Dans le cinéma, entre les fauteuils, défile une galerie de paumés, tordus, blessés, solitaires, déviants, en mal de tendresse et de chaleur humaine. La caissière querelle le projectionniste ; un pépère pervers croise un pierrot exhibitionniste ; le solitaire qui vient se mettre au chaud et se rincer l’œil se fait sortir ; un travesti éblouit un jeune couple à la libido en panne ; mannequins et comédiens s’étreignent ; là-haut sur l’écran invisible, Divine rencontre Mignon. A l’avant-scène, l’ange aux ailes rouges, comme un double de Divine sortie de l’écran, vient faire son numéro pathétique et drôle. Et quand là-haut la guillotine tombe sur le cou de Divine, un paralytique en bas, sur le plateau, traverse la scène offrant une impressionnante image christique. Sur le faux écran résonnent les accents de la tragédie de l’innocence perdue et de la violence. Sur la scène de théâtre, se joue un poème à la gloire d’une humanité douloureuse.

Ils sont quatre comédiens virtuoses jouant à nous faire croire qu’ils sont quinze, faisant des entrées et des sorties spectaculaires où chaque personnage est une performance en soi.

Cinema Cielo est l’œuvre d’un artiste qui nous entraîne du côté de Kantor, de Chaplin, de Fellini.