Dans un futur proche, ou aujourd’hui car tout semble possible… On gueule, on s’agite lors du conseil municipal d’une ville d’outre-Rhin. H.H. s’ouvre sur un débat : quel nom donner au collège que les autorités inaugurent dans quelques jours ? Pour le fronton de l’établissement, les initiales H.H. ont déjà été gravées en bronze. Il fallait gagner du temps. La question devient : quel patronyme, aux initiales de H.H., portera l’établissement ?
Celui d’Heinrich Heine, poète national dont trop d’institutions arborent le spectre ? Ou celui du nazi fanatique né dans la ville, Heinrich Himmler ? Les coeurs balancent, les arguments fusent. On se déchire en levant ses bocks de bière à la santé des électeurs et aux deniers publics. On cherche la réponse dans les poèmes de Heine et les lettres de Himmler. À hurler de rire dans l’abjection.
L’Atelier, Maman revient pauvre orphelin, Mon père inventaire, Une leçon de savoir vivre, Vers toi terre promise, tragédie dentaire… Autant de bijoux de noirceur, farces épiques ou épopées intimes ; les pièces de Grumberg retournent l’Histoire et ses bourreaux comme des crêpes. Pour rire, respirer. Né en 39, multi moliérisé, l’auteur, ici metteur en scène, joue les jardiniers de l’ordure, il laboure le pire de la société civile et de sa hiérarchie.
Il s’en amuse avec une cruauté salutaire. Il fait entendre dans ce bain d’ignominies les mots authentiques d’Himmler, monstre méconnu, et de l’humaniste ironique Heine, censuré par les nazis. Au bout du compte, le nom de l’établissement reste à négocier. À la fin de la parodie carnassière, on évoque même le nom aux initiales de H.H. d’un sportif. L’horreur absolue, pour Grumberg, est atteinte, quand tout devient indifférent et égal, quand l’indignation s’est fait la malle. En rire, vaut toujours mieux.
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