J'ai une tendresse familière pour Janis Joplin et Jim Morrison, leur violence, leur rire, leur générosité à fond la caisse. Du Blues, du Rock, et pas du lissé romantique, oh, non !
Cri, acte d'amour, de douleur, de dérision, cri sorti du fond de leurs corps, pleinement dans l'instant, pas du chiqué. Ils ne font pas, ils sont. Je les ai chantés déjà souvent, je les chante depuis toujours, mais toujours j'ai eu l'envie de les réunir sur scène pour les faire revivre par ma voix seule, toute seule. Ils sont morts jeunes, si jeunes, tous les deux à vingt-sept ans. J'ai eu envie que ma voix les ressuscite, les réunisse en moi, pour vous, vivants.
Quand Jean-Michel Rabeux m'a demandé de participer à Trans…, j'ai pensé que c'était le moment. Chanter Janis et Jim a capella, et les chanter dans ce temps de fête que Trans… va être, me mettre doucement en transe dans ce cadre-là, avec ces spectacles-là autour de moi, ces gens-là, dans ce lieu-là, me touche profondément. Me mettre à nu sans béquille, avec mon corps seulement, jeter ma voix dans le vide, dans le silence, tenir le moment fragile du chant, lâcher sa fureur, mais sans les drums, sans les guitares, vas-y roule et bonne chance.
Pendant trente, trente-cinq minutes, je chante dix chansons qui parlent d'amour évidemment, comme toutes les chansons, et de solitude aussi, comme toutes les chansons. Faire le chaman, pas le show-man, faire le chant, pas la maligne, avoir peur, plus que peur, ne pas avoir peur du tout, m'en foutre de la peur comme de l'an quarante, parce que je les aime ces deux-là, bien plus que ma peur, à un endroit secret, au fond de moi, là où j'aime les hommes, là où tous deux les aimaient, à en mourir, jeunes, si jeunes.
Corinne Cicolari
Cartoucherie - Route du Champ de Manœuvre 75012 Paris