« Mais n’te promène donc pas toute nue ! » ne cesse de répéter le député Ventroux à sa femme Clarisse, dont l’étrange manie risque de nuire à sa carrière politique.
La pièce se déroule dans le salon des Ventroux. Le député Ventroux reproche à sa femme Clarisse de se monter trop souvent en tenue légère devant leur fils et leur domestique, et quand Monsieur Hochepaix, adversaire politique de Ventroux, vient solliciter une faveur pour ses administrés, Clarisse apparaît encore au salon en tenue légère. Le drame prend toute sa saveur quand une bien malencontreuse guêpe la pique dans la partie charnue de son anatomie. Persuadée d’emblée de courir un danger mortel, Clarisse prie son mari de bien vouloir lui sucer la plaie. Devant Hochepaix. Malgré le refus et la colère de son mari, Clarisse va même jusqu’à solliciter Hochepaix - qui refuse. Un médecin est appelé.
Pendant que Ventroux et Hochepaix passent dans la pièce à côté pour parler politique, le journaliste Romain de Jaival, venu interviewé Ventroux, est introduit par le domestique. Clarisse le prend pour le médecin et elle a vite fait de lui faire examiner son anatomie douloureuse. Quant Ventroux et Hochepaix reviennent au salon…
« La quantité d’effets de dialogue que Monsieur Feydeau peut tirer d’une querelle conjugale, le nombre d’effets de situation que peut lui fournir une femme qui se promène dans un appartement vêtue d’une chemise de nuit et d’un chapeau sont quelque chose qui provoquera toujours mon admiration ébahie. Je commence à m’apercevoir que Monsieur Feydeau est le légitime inventeur de ces femmes qui savent apporter dans la mauvaise foi un acharnement si ingénu et une inconscience si candide dans l’impudeur. » Léon Blum
Feydeau associe à l’habituelle satire des mœurs conjugales une critique au vitriol de la vie parlementaire. Il a compris, beaucoup mieux que d’autres auteurs sérieux, la difficulté que les hommes ont à communiquer entre eux, leur obsession et leur égoïsme - refuges, peut-être, contre la dureté du monde. Dans sa célèbre comédie d’une heure à peine, ses personnages font rejaillir toute la peur et la faiblesse de l’homme - et de la femme. Il n’y a pas de héros chez Feydeau, car le héros agit contre la fatalité alors que tous les personnages de Feydeau composent, masquent, se masquent. Leur lâcheté est la nôtre, cette lâcheté existentielle qui nous permet de dormir tous les soirs un peu…
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