Première à Paris.
Prenons d’une part une danseuse catalane riche d’un goût pour l’aventure, fondatrice d’une compagnie baptisée Mal Pelo – ce qu’on pourra traduire quelque part entre “mèche rebelle” et “mauvais poil”. Présentons-lui un cantaoret guitariste de flamenco aux goûts aussi éclectiques qu’électriques… Et laissons-les accomplir leurs plus heureux délires : se suivre, se perdre et se trouver, se déguiser en petites ou en grandes bêtes, ou reconquérir une pureté flamenca, célébrant la joie ou la peine d’un moment. À découvrir sous les étoiles, éclairé par au moins sept lunes.
C’est injuste, mais c’est comme ça : l’histoire oublie toujours le nom des intermédiaires. Du directeur de théâtre qui présenta Colette à Ravel, du chef d’orchestre qui mit en cheville Ramuz et Stravinsky, de la directrice de casting qui imposa Dustin Hoffman… Alors rendons une brève grâce à Juan Carlos Lérida, directeur artistique du programme Flamenco Empírico de Barcelone. C’est son intuition qui mit face à face la chorégraphe catalane Maria Muñoz, issue des sphères de la danse contemporaine, et Niño de Elche, de vingt ans son cadet, guitariste et chanteur de flamenco entraîné par sa curiosité musicale sur bien des chemins parallèles. À ces deux-là, on a juste dit : voilà, faites quelque chose ensemble. La danseuse et le cantaor se sont observés, écoutés, suivis, proposé des choses, chacun faisant un pas puis deux et trois dans l’univers de l’autre, loin de sa propre zone de confort. Et leur rencontre imposée est devenue bientôt entente artistique, puis complicité profonde, qui leur permet désormais de parcourir ensemble des régions reculées et réjouissantes.
Maria Muñoz : “Au début, on se tenait devant l’abîme… Et puis on s’est dit que c’était comme de faire la cuisine ensemble. Chacun a apporté des ingrédients qu’il aimait, des bricoles, des petites choses. Lui a amené du chant, des paroles des mélodies. Moi, j’avais ces petits fauteuils et deux chapeaux à cornes… Chacun de nous entretenait un rapport très affectif avec ces éléments et beaucoup du travail a consisté à le communiquer et à se saisir de ce que l’autre apportait.” Échange d’affects, et de savoirs aussi : “Il m'a dit : ‘ Tu connais cette chanson andalouse, La Bien Paga’ ? [la bien payée] – Eh bien tu vas la chanter, et moi, je la danserai.” Et ainsi ils ont continué jusqu’à ce qu’on ne sache plus qui avait apporté quoi – comme dans tout bon plat mijoté, les éléments se fondent et disparaissent pour que triomphe une très humaine saveur.
De leur troc et de leur commune cuisine ont émergé des moments loufoques, surréalistes, bientôt transformés en sept tableaux. Sept ambiances volontairement différentes et disparates, portées tantôt par une chanson de Jefferson Airplane, tantôt par un poème de Mahmoud Darwich, tantôt par le mouvement, tantôt par la musique.
« La très forte complicité que nous avons acquise nous permet de découvrir l’instant d’inspiration, de vivre les possibilités du moment sans nous forcer à raconter une histoire. » Sept paysages à traverser avec le public, des moments où l’on est bien luné, mal luné, perméable à l’humeur de l’heure. Sept paysages lunatiques et changeants, qui seront, ça tombe bien, joués cet été à la belle étoile.
Textes : Niño de Elche, Mal Pelo, Jefferson Airplane, Mahmoud Darwish
Pep Ramis en remplacement de María Muñoz.
Très bon
Pour 1 Notes
Très bon
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