Au bord du monde, sur une sorte de radeau de bois, comme une manière de tapis volant, Miche et Drate construisent leur vie. Une vie si simple, faite de jeux, de conversations, d’espoirs et d’amitié. Deux petits clowns tout blancs, aux frontières du visible et de l’invisible, interrogent leurs différences. Deux petits princes qui se seraient apprivoisés (sans faire de manières).
Qu’est-ce que c’est « être deux » ? Comment faire un beau cadeau ? Ça veut dire quoi « mourir » ? C’est quoi la guerre ? Ça parle de la vie. Une vie première, essentielle. Avec les mots les plus simples, ils décortiquent l’humain par le petit bout de leur lorgnette.
Deux petits bonhommes, de petits Monsieur Plume qui, tour à tour, s’émerveillent, se chatouillent, se chamaillent, s’épouvantent, s’aiment. Deux Pierrots stellaires — brassant des poussières d’absolu, pataugeant dans les nuages du presque — balancent leurs jambes et leurs paroles au bord du tout et du rien.
Agnès Braunschweig
Le Jeu
Dans le travail de l’acteur, nous avons cherché une innocence, qui ne soit pas niaise, mais magnifique. Travaillé sur une tendresse qui ne soit jamais mélancolique. Tenté d’aller vers le léger et le vivant (avec une pensée pour l’Ariel de Strehler). Cherché une vraie simplicité alliée à une précision. Et bien sûr cherché à faire éclater partout l’humour merveilleux de Gérald Chevrolet.
L’Espace
Il se construit autour d’une sorte de radeau de bois qui devient tour à tour lit, table, scène, aire de jeu, bâteau… L’espace autour ; dessous, derrière ; existe aussi : lieu parfois de la peur, de la cachette, de la liberté.
Le Temps
La pièce elle-même se découpe en 24 scènes dialoguées entre Miche et Drate. Nous avons, entre chaque scène, placé de courts intermèdes muets qui racontent ce que pourraient être d’autres moments rêvés de la vie de Miche et Drate, des petits moments parfois purement poétiques et abstraits, parfois plus explicites et ludiques.
Les Costumes
Miche et Drate sont habillés de blanc, ceinturés d’or. Une silhouette presque indienne, des pantalons bouffants, de petites ballerines, des collerettes blanches. Entre le Pierrot et autre chose. Les cheveux sont relevés et attachés, le maquillage souligne le regard de noir et les lèvres de rouge. Les sourcils — un brin clownesques — se font un peu arabesques. Sous chaque oeil, un petit rond noir, qui donne une légère étrangeté au regard, nous rappelle que nous n’avons pas à faire à des êtres tout à fait comme les autres.
Les Objets
Volontairement, nous avons voulu réduire les accessoires au strict minimum : deux écharpes et deux poupées de chiffon, sorte de doubles inversés de Miche et Drate, sorte d’êtres abstraits, schématiques, universels, et pourtant si humains et si différents.
La Musique
Du saxophone. Des notes parfois longues, tenues. Des moments d’harmonie, d’équilibre. D’autres : séquences hachées, heurtées, perdues ; rigolotes ou grotesques même parfois... Quelques touches de piano. Un air d’opéra aussi, égaré. Une musique sans âge, sans lieu. Qui se fait souvent presque souffle, cri, plainte, éclat de rire. Tellement humaine.
Agnès Braunschweig
6, avenue Maurice Ravel 75012 Paris