Peut-on traduire la danse ? Et qu’est-ce que traduire si ce n’est rendre intelligible quelque chose d’incompréhensible, d’inconnu ? Se liera ici la question du sens des actions à celui des mots, et du sens des langages au sens commun. Ce faisant, ce n’est pas tant la langue que nous traduirons que la danse elle-même. Car si nous sommes toujours « l’étranger » de quelqu’un, de quoi la danse peut-elle être l’étrangère, et paradoxalement d’où tient-elle sa réputation d’être universelle ? Enfin le mutisme de la danse n’est-il pas un leurre ?
Mode d'emploi est un projet chorégraphique qui interroge la fameuse inaccessibilité de l’art.
" Le principe du mode d’emploi est de décrire dans le détail la mise en route d’un appareil, le fonctionnement d’une structure. Il est toujours recommandé de suivre pas à pas la marche à suivre. Des encarts fortement soulignés mettent en garde sur d’éventuels dangers pour les personnes ainsi que les dommages irrémédiables sur les objets lorsque la manipulation s’avère inadéquate. Le mode d’emploi devient de ce fait la référence garantie pour tout remboursement, échange, préjudice… Cet aspect contractuel justifie également les nombreuses traductions. D’une manière générale la masse d’écriture est imposante en regard d’éléments dont la taille est parfois très en deçà des volumes d’explication.
Qu’est-ce que serait la notice explicative d’une création chorégraphique ? Une longue énumération de gestes, de relations, de contextes... Une description détaillée et sans ellipses des articulations du sens potentiel de chaque séquence… Un mode d’emploi se situerait entre le catalogue et la thèse, il ruinerait sans doute la volonté première d’accessibilité, de lisibilité immédiate.
Et si on pensait la notice au moment de la fabrique de la danse ?
Et pourquoi faire un mode d’emploi, alors qu’il suffit de se laisser aller ?
Et bien justement, pour s’amuser avec les obligations de clarté, de lisibilité, de fabrication du sens… obligations de l’artiste, mais aussi du spectateur qui se doit d’être ‘éclairé’… Je voudrais tenter de prendre en charge ce mode d’emploi dans la danse même. Glisser par exemple quelques études autour de gestes écrits et déclinés en diverses interprétations, ou bien envisager la même interprétation dans différentes configurations. Nourri des trois créations précédentes, ce nouveau projet s’articulera entre gestes, états et volontés signifiantes. Ce qui est en jeu, c’est la valeur de l’interprétation. Tout comme en musique, il ne s’agira pas seulement de jouer les notes, les gestes et leur durée composée, mais de les interpréter. Les interprètes deviendront par moments des sortes de traductrices et la répétition jouera un rôle important dans ces traductions effectives ou complètement illusoires.
SO, can you understand essa tentativa de esclarecimento con la nota de intencion ?"
Nathalie Collantes
1 rue Charles Garnier 93400 Saint-Ouen