En 2007, Marco Berrettini ses complices nous ont embarqués à bord de leur mini-van, pour un périple chorégraphique des plus loufoques au coeur de la Nouvelle Orléans. Disjoncté et satiriquement touristique.
Goes to New Orleans gardait pourtant les pieds sur terre. Si, viaggiare décolle pour une planète lointaine ! Des astronautes, venus de diverses galaxies, se sont donnés rendez-vous sur Léna, aux confins de l'univers. Cette douce folie poétique est une réponse à une expérience très sérieuse de la NASA. Deux navettes envoyées dans l'espace convoyaient une compilation d'objets, témoins de notre civilisation, à destination d'hypothétiques destinataires.
Marco Berrettini a choisi un cadre totalement vierge pour cette entrevue intergalactique. Les reliques matérielles de notre civilisation seront oubliées et toute l'attention sera portée sur la troublante question du corps comme premier élément visible de soi. Un voyage sensoriel palpitant !
Neuf astronautes, venant de galaxies différentes, atterrissent sur la minuscule planète Lena. Selon la tradition, ces représentants de la communauté intergalactique, les Arshock, renouvelleront leur amitié et leur respect pour les civilisations étrangères, néanmoins voisines, avant de mesurer leurs arts mutuels.
À l’époque de Facebook, Twitter, des blogs, des sites de rencontres, à l’époque où nous sommes finalement convaincus d’être dans la sainte communication, avons-nous développé des « grilles », des « paramètres » si aigüs de l’évaluation de l’autre avant même de pouvoir se regarder dans les yeux, qu’une attitude contemplative de l’inconnu, de l’humilité face à l’étranger et d’une véritable « sphère » de l’intimité est devenue impossible ?
C’est la question centrale de Si, Viaggiare. Pour y répondre, nous avons, d’une part travaillé en studio, dans l’espoir de nous découvrir à nouveau, mais aussi chacun pour soi, en ville, dans des espaces publics, à la recherche d’une rencontre de l’inconnu, qui est toujours une rencontre de soi-même, provoquant une introspection qui se heurte à nos craintes, douleurs et secrets. Dans ce sens, la lumière ne peut exister qu’à travers la confrontation avec sa propre « ombre », la joie sans la souffrance, le mouvement extérieur sans le mouvement intérieur.
« Et il y a là-dedans des substances hautement toxiques. Il existe un lien direct entre la dimension d’un auteur et la dangerosité des matériaux qu’il traite et qu’il maîtrise. L’anodin ne donne naissance qu’à l’anodin, le danger donne naissance à la pensée, et lorsque la pensée arrive au point où elle prend forme, on tient l’instant de l’art. Tout auteur qui vaut quelque chose se contamine lui-même avec les matériaux qu’il traite… » (Peter Sloterdijk)
Marco Berrettini
76, rue de la Roquette 75011 Paris