Xie Xin / Marion Motin / Crystal Pite

• Les femmes chorégraphes à l'honneur

Créé en 2016 à l’Opéra national de Paris, The Seasons’ Canon de Crystal Pite baigne dans une lumière d’orage. Bouleversante, la chorégraphie en « canons » déploie des réactions en chaîne, des gestes en écho. Un fourmillement organique de corps humains se mêle aux cordes de Vivaldi magnifiées par l’électronique de Max Richter.

Dans The Last Call, sa première création pour le Ballet de l’Opéra, Marion Motin raconte l’histoire d’un coup de téléphone qui vient bouleverser la vie d’un homme. Entre distorsion et vitalité, la chorégraphie plonge les spectateurs dans une dimension surnaturelle.

Enfin, l’artiste chinoise Xie Xin signe à son tour sa première création pour les danseurs de l’Opéra national de Paris. Sa pièce Horizon joue sur les illusions et les mirages entre éléments de la nature.

• Programme

The Last Call
Chorégraphie : Marion Motin
Musique : Micka Luna
Décors : Marion Motin
Costumes : Arthur Avellano
Lumières : Judith Leray

Horizon
Chorégraphie : Xie Xin
Musique : Jiang Shaofeng
Décors : Hu Yanjun
Costumes : Li Kun
Lumières : Gao Kie

The Seasons' Canon
Chorégraphie : Crystal Pite
Musique : Max Richter (Recomposed : Antonio Vivaldi The Four Seasons)
Décors : Jay Gower Taylor
Costumes : Nancy Bryant
Lumières : Tom Visser

Musiques enregistrées.

Avec les Étoiles, les Premiers Danseurs et le Corps de Ballet Orchestre de l’Opéra national de Paris.

• À propos - The Last Call

La danse est pour moi un outil qui donne à raconter des choses. Dès lors qu’un mouvement est codifié « danse » mais qu’il ne me raconte rien, il ne me touche plus. C’est la raison pour laquelle je suis très sensible à la corporalité des gens qui ne sont pas forcément des danseurs : pour moi, une gestuelle sportive, un mouvement répétitif, des mains qui accompagnent des propos, c’est déjà de la danse. Je suis également très réceptive aux vols et déplacements animaliers, aux mouvements de la nature, à la matière qui exerce une influence sur un être ou un objet… Le vent qui souffle dans des feuilles d’arbres, par exemple, ne provoque pas le même déplacement en fonction de son intensité.

Dans ma création pour l’Opéra national de Paris, je parle avec brutalité de la mort. De la manière dont, tout à coup, on disparaît dans une autre dimension : où vont ces gens qui subitement ne sont plus là ? Conçue pour 15 danseurs, The Last Call sera une pièce
tout à la fois la fois narrative, onirique et abstraite. J’aime, en effet, créer des univers dans lesquels le spectateur puisse se projeter et comprenne ce qu’il souhaite en faisant appel à son ressenti, son histoire, sa sensibilité… Le temps, avec ses différentes dimensions et distorsions, est un concept qui m’intéresse particulièrement. Et j’affectionne particulièrement ces espaces où tout est possible. Je fais généralement des pièces pour exulter les
différentes problématiques de la vie.

The Last Call se déroulera dans un espace-temps particulier, entre la vie et la mort : un personnage va plonger dans une dimension parallèle après un appel téléphonique… Un peu à la manière d’un film de David Lynch, dont j’apprécie énormément le travail cinématographique, à la frontière du concret et de l’abstrait.

La musique est essentielle pour moi : c’est la raison pour laquelle je travaille ici avec le producteur Micka Luna qui fonctionne, comme moi, beaucoup par images et saura donc retranscrire musicalement ce que je souhaite. Pour cette pièce, j’aimerais notamment qu’il imagine un thème musical qui puisse évoluer, se transformer et se déformer. Créés en collaboration avec Arthur Avellano, les costumes en latex, tout en contrastes, mêleront des silhouettes imposantes et structurées à des tenues glamours et sexy.

Marion Motin

• À propos - Horizon

En Chine, nous sommes assez jeunes dans le paysage international de la danse contemporaine dont l’enseignement a commencé en 1987. Nos danseurs, nos chorégraphes, ainsi que le public et les projets de collaboration internationale de ces dernières années, ont cependant permis un développement très rapide.

Mon langage chorégraphique, que je qualifierais de doux, fluide et sensible, se traduit dans une esthétique qui tend vers l’abstraction. J’ai développé ma propre technique corporelle, la « Body Connection Technique », influencée par un mélange de techniques occidentales et de culture chinoise. J’aime construire mes pièces avec les artistes, passer beaucoup de temps à peaufiner les détails en studio, pour qu’à la toute fin, l’œuvre se découvre, vienne à nous…

Pour Horizon, j’ai déjà une idée et des images assez précises… Je vais cependant demander aux danseurs de proposer des choses très différentes de ce qu’ils ont l’habitude de faire et j’ai donc besoin de travailler avec eux afin d’appréhender leurs réactions face à mon style et éventuellement m’adapter. Je sais aussi que les danseurs de l’Opéra ont une technique fantastique et je pense qu’ils vont transcender mon langage chorégraphique.

Xie Xin

• À propos - The Season's Canon

Pour moi, créer c’est comme regarder à travers un objectif, une opportunité de voir le monde de façon plus détaillée et avec plus de clarté. Je peux faire l’expérience de l’agrandi, de l’espace et de la netteté. J’utilise la chorégraphie – l’acte de créer quelque chose – pour me confronter à la création elle même, à ce qu’elle signifie. C’est la construction, l’habileté, la collision, le collage, l’encadrement, la superposition et l’extraction de la chorégraphie, l’acte même de produire, et d’observer, qui me connecte de la façon la plus profonde au monde naturel et à la brutalité et la beauté qu’il contient. Cette pièce est un geste, une offrande. Elle est autant un moyen de surmonter l’immensité et la complexité du monde naturel que d’en louer l’existence.

La partition de Max Richter a agi sur moi comme une invitation, et m’a laissé beaucoup de liberté de mouvement. La structure de ma pièce suit celle de Richter. Les titres des mouvements eux-mêmes ont agi comme des déclencheurs : «Printemps 1», «Été 2», «Automne 3». Cela m’a donné l’idée de diviser et de classer des phénomènes naturels. J’ai imaginé produire une série de portraits qui décrirait le monde naturel – de distiller, par exemple, l’idée même de la perte sur une lamelle de microscope, et de la titrer «Hiver 2 ».

Crystal Pite, 2016