Yann-Fañch Kemener est l'une des voix les plus connues de Bretagne, et "l'une des
plus belles de France" (Hélène Hazera, Libération). Spécialiste et véritable
ethnomusicologue du Kan Ha Diskan (chant à répondre, monodique et modal, en langue
bretonne), il participe très tôt au renouveau, à la conservation et à la transmission
du patrimoine musical traditionnel breton. Sa voix extraordinaire et sa profonde
connaissance musicale provoquent l'admiration de ses pairs bretons et propagent le chant
traditionnel de Bretagne hors de France.
Originaire de Sainte-Tréphine dans les Côtes d'Armor, Yann-Fañch est issu d'une famille
très attachée à la terre, d'un milieu où l'on travail dur, et dont le chant fait
partie du quotidien. En étant bercé dès son enfance, il est très vite attiré par la
musique et les chanteurs traditionnels. Il accroît ses connaissances en les écoutant et
en les enregistrant. A l'âge de treize ans, il se produit pour la première fois en
public.
Habitué à chanter en famille, il remporte à vingt ans le premier prix du concours Kan
Ar Bobl' (chant populaire) à Lorient. Sur son premier disque en 33 tours, il apparaît,
vêtu d'une grande cape noire, " droit comme un menhir ", sur fond de fougères.
Il chante alors La Ballade de Skolvan et La Grande Passion.
Il sort quelques temps après, chez Arion, son deuxième disque, Chants Profonds de
Bretagne, dans lequel on retrouve La Grande Passion. Une grande partie du disque est
consacrée au Kan Ha Diskan, en compagnie d'Anne Auffret et Marcel Guilloux. Il
interprète aussi des gwerzioù (chants épiques, historiques ou tragiques, dont l'origine
des thèmes est souvent incertaine) à qui, malgré la difficulté de la poésie bretonne,
il donne, par sa voix, un véritable souffle de modernisme et une extraordinaire
profondeur. Son audience, dès lors, dépasse largement " l'élitisme " des
amateurs de musiques bretonnes. Il devient rapidement, à l'instar des Soeurs Goadec, un
symbole du renouveau de la Bretagne traditionnelle, et l'un des " maillons " les
plus importants de la transmission de l'héritage musical breton.
De 1977 à 1982, il publie cinq disques chez Arion (Chants Profonds de Bretagne 1,2,3,4 et
Kan Ha Diskan), dans lesquels il interprète de nombreux gwerzioù et sonioù (chants
poétiques, lyriques, satiriques...), souvent tirés du Barzaz-Breiz (recueil de chansons
et contes populaires, publié en 1839 par Théodore Hersart de la Villemarqué), dont il
s'est fait l'un des plus grands illustrateurs sonores. Il s'accompagne toujours, dans son
chant, de Marcel Guilloux et Anne Auffret (qui utilise aussi sa harpe). Ces thèmes se
laissent porter par son timbre unique et sa diction parfaite.
En 1985, il participe à l'enregistrement du disque Vent d'Ouest, aux côtés de Jean
Baron et Christian Anneix.
Il participe en 1989, à l'élaboration d'un disque complétant l'ouvrage Aux Sources du
Barzaz-Breiz (Donatien Laurent), avant de devenir la voix magique du groupe Barzaz. Il
réalisera en compagnie de cette formation, deux albums : Ec'honder (1989) et Un Den Koz
Dall (1992). Le groupe est composé de Jean-Michel Veillon (flûte) Gilles Le Bigot
(guitares) Alain Genty (basse) et David Hopkins (percussions).
Entre temps, ce qui est aussi l'une de ses principales occupations, Yann-Fañch Kemener
anime de nombreux festoù-noz en duo ou trio, avec notamment Erik Marchand, Ifig Troadeg,
Marcel Guilloux et Anne Auffret...
En 1991, il participe à l'enregistrement d'un disque du groupe Skolvan Kerzh 'Ba'n Dans,
suivi trois ans plus tard de Swing & Tears. Le groupe Skolvan regroupe de jeunes
musiciens devenus, par la suite de grands professeurs au Conservatoire Régional de
Musique et de Danse Traditionnelle de Bretagne. Il y interprète l'un des thèmes les
moins attendus de cette formation, Gwerz Skolvan, chantée par Madame Bertrand.
En 1992, c'est à Carnac, qu'il interprète au milieu des menhirs, dans un spectacle son
et lumières, les thèmes du disque Karnag, Pierre Lumière. Il rencontre à cette
occasion Didier Squiban et Jean-Louis Le Vallégant, et retrouve Kristen Noguès. Ce
disque (paru en 1996) est une invitation aux voyages poétiques, lyriques et magiques. Et
c'est sur des textes de Xavier Grall, de Pierre-Jakez Hélias ou tirés du Barzaz-Breiz
(la bible du chanteur breton !) qu'il fait vibrer le cur de ses auditeurs.
Enfin, l'année suivante, plus exactement le 29 novembre 1997, Yann-Fañch, au Pavillon
Penvillers à Quimper invite vingt-deux musiciens ou groupes, pour fêter ses 25 ans de
carrière (Hastañ, Gwenfol, Carré Manchot, le Bagad Kemper, Les Frères Morvan...). Ses
'noces d'argent' avec la musique bretonne rassemblent, dans l'après-midi, pas moins de
4.000 spectateurs, venus de Bretagne bien-sûr, mais aussi de toute la France et certains
même, d'autres pays européens. C'est une ovation qui salue son arrivée et ponctue ses
interventions. La presse salue l'ampleur du concert ainsi que l'ardeur et le courage du
public et des participants. Le fest-noz qui suit ce concert de deux heures rassemble, lui,
plus de 5000 spectateurs, tournant et dansant " comme des suchi, sur le plateau d'un
restaurant japonais " et ne prend fin officiellement que vers trois heures du matin.
On se rappellera, je pense, le fou rire de Yann-Fañch, lorsqu'Eugénie Goadec s'est
trompée dans son texte. Le public aura lui très largement apprécié la performance de
cette artiste, symbole et légende vivante de Bretagne. On se souviendra aussi de
l'intervention de Mélaine Favennec chantant en breton et surtout faisant chanter
Yann-Fañch en français pour la première fois, je crois.
Jérémie Pierre JOUAN
Sources : Biographie (Alain Swietlik).
Cet(te) artiste n'est pas lié(e) en ce moment à un spectacle.
Maison de la Poésie, Paris
L'Azimut - Théâtre F. Gémier / P. Devedjian, Antony