Jade fait des listes et des rencontres sur internet pour essayer de trouver un sens à sa révolte. Antigone, sa meilleure amie morte dans une pièce écrite il y a 2500 ans, essaie désespérément de faire jouer sa tragédie à la troupe de théâtre de l’école. Inès, la mère de Jade, erre comme un fantôme dans leur maison de banlieue.
Antioche, c’est l’histoire de trois filles emmurées vivantes qui décident de fuir vers l’avant. Et surtout, d’une rencontre improbable dans la ville d’Antioche, en Turquie, là où tout pourrait encore changer.
« On pense que le monde évolue, mais c’est aussi pire qu’il y a 2500 ans. T’es mieux de marcher les fesses serrées pis de te conformer aux règles de la Cité sinon, bang, on t’emmure. C’est pas juste. » Antigone, Antioche
Par le Théâtre Bluff. Le texte est publié aux Éditions de Ta Mère.
« Loin d’une rage dévorante et des lieux communs de la rébellion adolescente, la révolte que Sarah Berthiaume raconte avec sensibilité et humour dans Antioche prend au sérieux la déroute d’une jeunesse en quête de sens et souligne avec inventivité que la situation n’est pas nouvelle. » Le Devoir (Québec)
« Sarah Laurendeau campe une Antigone particulièrement solide, mêlant rage et légèreté. (…) Les élèves venus en groupes ne s’y sont pas trompés : leur ovation avait la force d’une clameur. » JEU, revue de théâtre
« Antioche est une réussite tant dans sa forme que dans son propos. L’autrice maîtrise à merveille l’art du récit théâtral, la transposition et le choix des mots qui se déposent dans notre imaginaire. Ses trois personnages féminins […] sont bien écrits et interprétés, au point qu’ils reflètent nos doutes, nos révoltes intimes et nos drames personnels face aux injustices de la vie. » La Presse
« Radicalisation : du latin radicalis, « relatif à la racine ». Qu’y a-t-il donc, à la racine de la radicalisation ? C’est un peu la question à laquelle tente de répondre ma pièce Antioche. Pour moi, ce qu’on trouve, à la racine de la radicalisation, ça n’est pas la religion, l’origine ethnique ou le milieu social. C’est plutôt la quête de sens. Celle qu’on ressent tous, à l’adolescence : celle qui, du jour au lendemain, rend insoutenables toutes les absurdités du monde qui nous entourent et nous donnent envie de nous révolter.
Antioche n’est pas seulement une pièce sur la radicalisation. C’est aussi, et surtout, une oeuvre sur la révolte. Celle qui dort en chacun de nous. Celle qui renaît d’une génération à l’autre, d’une jeunesse à l’autre, toujours plus brûlante et nécessaire. Celle qui peut se transformer en arme de destruction... ou en une formidable force de changement.
Rapidement, dans l’écriture, se sont imposées ces deux filles aux destins croisés : une mère et sa fille, qui, dans une ironie terrible, font le trajet inverse à vingt ans d’intervalle. Inès, qui fuit le Moyen-Orient pour être libre ; Jade, qui fuit l’Occident pour trouver du sens. La mère et la fille habitées de la même colère devant des sociétés qui les emmurent vivantes. La mère et la fille qui, grâce à une brèche temporelle, se rencontrent lorsqu’elles ont toutes les deux seize ans et qu’elles sont sur le point de faire un choix qui va changer leur vie.
Puis il y a eu Antigone, qui, depuis sa tragédie écrite il y a 2500 ans, me faisait de grands signes. Antigone dans sa toge et ses cothurnes, qui me criait : « Ces filles-là sont les descendantes de ma colère ! » Alors, je l’ai invitée. Antioche, c’est donc l’histoire de notre révolte brûlante. Et des générations de filles qu’elle continue d’habiter. »
Sarah Bertiaume
« Notre monde change à une vitesse folle, guère pour le mieux, hélas. Chaque jour apporte son lot de nouvelles qui font craindre le pire, nous incitant à nous replier sur nous-mêmes dans un triste réflexe de peur. Peur de l’autre, peur de l’avenir, peur de soi. Les espèces animales et végétales disparaissent, le climat se détraque, la nature s’empoisonne, les riches profitent à outrance, les pauvres s’appauvrissent jusqu’à l’indigence, des idéologies perverses s’immiscent dans nos cerveaux. De barbares guerres de religion se déclenchent à tout bout de champ pour des dieux rivaux qui prêchent pourtant tous félicité, paradis et éternité. Des hommes, des enfants et des femmes y perdent leurs droits, leur dignité. Dans un geste de survie, des frontières doivent alors être franchies, le simple bonheur de vivre étant la chose à préserver, coûte que coûte.
C’est dans ce contexte inquiétant que Sarah Berthiaume nous propose Antioche, pièce à la fois réaliste jusqu’à la cruauté, fantastique, et étrangement poétique. Ce drame bien contemporain mêle avec une audace réjouissante temps et espace, le confort désespérément creux de la vie des banlieues d’aujourd’hui à la grandeur tragique de la mythologie grecque. Nous y retrouvons Inès, Jade et Antigone (la vraie, oui, oui), trois femmes rebelles, mère, fille et amie, immigrante intégrée, adolescente mal dans sa peau et révoltée perpétuelle, parfois complices, parfois ennemies, pour qui le monde est loin d’être ce qu’il devrait être et qui rêvent chacune à leur manière d’un monde meilleur, plus juste, un monde qui serait en harmonie avec leurs valeurs, leurs convictions et leurs aspirations les plus intimes. L’endroit de leur accomplissement est Antioche, ville turque jadis prospère se trouvant sur la Route de la soie, aujourd’hui sordide lieu de passage pour quiconque veut passer de l’Occident à l’Orient, ou vice versa, selon le parcours et la quête qu’il entend mener.
Antioche est une pièce sur les choix que nous devons tous faire à un moment ou à un autre de nos vies afin de nous réaliser, de rester intègre, au courage que cela implique ; c’est aussi sur le drame du doute d’avoir fait le bon choix pour l’amour de soi ou pour celui de l’autre qu’on chérit plus que tout. Antioche est un combat vivifiant contre l’inertie qui tue, pour l’idéal qui nous anime, parfois jusqu’à l’aveuglement. Antioche, une lutte salvatrice sans gagnant ni perdant afin que triomphe le meilleur de l’être humain. »
Martin Faucher
211, avenue Jean Jaurès 75019 Paris