C’est une page du roman de la danse que Bernardo Montet écrit à sa façon, insaisissable et généreuse. Grandi entre l’Afrique et la France, le danseur qu’il est devenu s’est formé au classique, avant de prendre la tangente pour étudier le contemporain puis la danse américaine ou le buto japonais. Montet croise dès lors Catherine Diverrès, François Verret, autant de compagnons de route avec lesquels il partage une certaine exigence. Passant du Centre Chorégraphique National de Rennes (en codirection avec Catherine Diverrès) à celui de Tours dont il est l’actuel directeur, Bernardo Montet n’a jamais cessé de défricher des territoires vierges de la chorégraphie : il questionne le texte, Othello ou Bérénice, et les poètes, Pierre Guyotat entre autres, ainsi que l’histoire du colonialisme ou le continent africain d’aujourd’hui. Son arme est encore et toujours le corps.
Batracien, l’après-midi fait suite à Les batraciens s’en vont. Bernardo Montet y est seul en scène ; enfin presque. En effet, Lorella Abenavoli, sculpteur, a pensé une oeuvre sonore, Le Souffle de la Terre comme une « transposition dans le domaine de l’audible des vibrations du globe terrestre ». Bernardo Montet, en solo et pourtant accompagné de cette matière sonique, devient ce batracien des origines jusqu’à l’homme de demain. Une traversée du temps qui interroge notre mémoire.
Batracien, l’après-midi est aussi et surtout un fabuleux travail d’interprète, ici Bernardo Montet, dans la démesure et l’émotion, habillé par Rose-Marie Melka et éclairé par Laurent Matignon. Une odyssée de l’espèce chorégraphique qui ouvre bien des horizons nouveaux aux spectateurs conviés.
Philippe Noisette
Création électroacoustique Lorella Abenavoli
Son N’Dembo Ziavoula
1, Place du Trocadéro 75016 Paris