Buenos Aires Tango 4

du 5 au 15 juin 2008

Buenos Aires Tango 4

  • Avec : Silvana Grill, No Bailaras, Esteban Moreno, Gloria, Eduardo, Claudia Codega, Néstor Marconi, Federico Pereiro, Ramiro Gallo, Ignacio Varchausky, Rosa Forte, Carlos Perez, Juan Carlos Godoy, Alberto Podestá
Pour la quatrième édition en nos murs, c’est une fois encore le tango qui va se chanter et se danser, mélange de maîtres anciens du bandonéon ou de la guitare et de jeunes pousses virtuoses du chant ou du piano, rencontres improvisées des duettistes à la jambe longue et du public parisien qui ne dédaigne jamais prendre une leçon de haut vol.

Buenos Aires Tango, l’éternel retour
Programme
Un peu d’histoire

  • Buenos Aires Tango, l’éternel retour

Chaque année au mois de mars, Buenos Aires fête la fin de son été au son du tango. Les saisons ainsi inversées en Amérique du Sud ont le bon goût d’offrir des nuits à la douceur enjôleuse. Buenos Aires Tango, son festival créé en 1998, prend alors d’assaut les milongas, les salles de spectacle, sans oublier El Dorrego, près du quartier de Palermo, avec un parquet de bal et ses innombrables artistes. Et tout se finit dans la rue, calle Corrientes, au dos du fameux obélisque qui domine l’avenue 9-de-Julio : des milliers de porteños, les habitants de la capitale argentine, viennent danser en couple ou simplement flâner, insouciants pour tout dire, avec le tango comme porte-drapeau.

En invitant à Paris le festival Buenos Aires Tango, le Théâtre National de Chaillot faisait le choix éminemment sentimental de resserrer encore un peu plus les liens entre ces deux villes. Pour la quatrième édition en nos murs, c’est une fois encore le tango qui va se chanter et se danser, mélange de maîtres anciens du bandonéon ou de la guitare et de jeunes pousses virtuoses du chant ou du piano, rencontres improvisées des duettistes à la jambe longue et du public parisien qui ne dédaigne jamais de prendre une leçon de haut vol.

Dix jours, trois programmes pour découvrir Grotesca Pasión Trasnochada, création sensuelle de la chorégraphe Silvana Grill avec sa troupe No Bailarás remarquée en 2006 et du compositeur Ramiro Gallo. Ou Tangos Clásicos I et II, fabuleux récitals tango avec l’Orquesta Escuela de Tango Emilio Balcarce sous la direction de Néstor Marconi au bandonéon ainsi que de nombreux maestros invités et des vedettes de la danse comme Gloria et Eduardo, et les voix d’or de Juan Carlos Godoy et Alberto Podestà.

Le tango, cet art ressuscité si souvent qu’il se sait éternel, va encore faire la preuve de sa séduction intacte. Aujourd’hui dépoussiéré « comme si on lui avait enlevé un peu de sa gomina », le tango entraîne dans son sillage toutes les générations d’admirateurs. À Paris comme à Buenos Aires, il a trouvé ses ports d’attache. Entre la Seine et le Rio de la Plata coule alors « ce sentiment triste qui se danse », le tango.

Ph N

  • Programme

Trois programmes (sous réserve de modifications)
Grotesca Pasion Trasnochada : 5, 6, 7, et 8 juin
Tangos Clasicos I : 10, 11 et 12 juin
Tangos Clasicos II : 13. 14, et 15 juin

Programme 1 : Grotesca Pasión Trasnochada
Silvana Grill, direction générale et chorégraphie
Ramiro Gallo, musique originale
Avec les danseurs de No Bailarás et les musiciens du Ramiro Gallo Quinteto
Lumière, Marco Pastorino

Programme 2 : Tangos Clásicos I
Orquesta Escuela de Tango Emilio Balcarce
Néstor Marconi, direction, bandonéon
Federico Pereiro, bandonéon soliste
Ramiro Gallo, violon soliste
Maestros invités, César Salgán, piano et Esteban Falabella, guitare
Juan Carlos Godoy, chanteur invité
Ignacio Varchauvsky (TangoVia Buenos Aires), direction artistique, contrebasse
Danseurs, Esteban Moreno (coordination chorégraphique) et Claudia Códega et la compagnie Union Tanguera, Gloria et Eduardo.

Programme 3 : Tangos Clásicos II
Orquesta Escuela de Tango Emilio Balcarce
Néstor Marconi, direction, bandonéon
Federico Pereiro, bandonéon soliste
Ramiro Gallo, violon soliste
Maestros invités, Aníbal Arias, guitare et Osvaldo "Marinero" Montes, bandonéon
Alberto Podestá, chanteur invité
Ignacio Varchauvsky (TangoVia Buenos Aires), direction artistique, contrebasse
Danseurs, Esteban Moreno (coordination chorégraphique) et Claudia Códega et la compagnie Union Tanguera, Rosa Forte et Carlos Perez

Bals dans le Grand Foyer à l’issue des représentations
• vendredi 6 et samedi 7 juin : hommage au Quinteto Real, César Salgán, direction et piano
• vendredi 13 et samedi 14 juin : Orquesta La Bordona

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  • Un peu d’histoire

Entre tradition et modernité, cette quatrième édition de Buenos Aires Tango vient, comme les précédentes, directement de la capitale argentine et présente les artistes majeurs de la scène porteña actuelle. Un peu d’histoire cependant avec le journaliste Nardo Zalko.

Cela fait cent ans que Paris vit le temps du tango, palpite au rythme de cette musique venue de si loin. C’est Paris qui la première l’a accueillie hors de ses frontières, quand elle a émergé des rives du Río de La Plata. Et c’est Paris encore qui a donné au tango les lettres de noblesse muni desquelles il a conquis l’universalité. Car, né dans les lupanars de Buenos Aires vers 1880, le tango fut d’abord une danse provocante, allégorie de la soumission de la prostituée à son souteneur. Après avoir prospéré dans les faubourgs de la capitale argentine, près de ses abattoirs, dans ses quartiers pauvres où s’entassaient des émigrants affamés d’une autre vie, le tango a pris son envol.

Les premiers tangos sont arrivés en Europe par le port de Marseille à bord de la frégate-école argentine Sarmiento il y a un siècle exactement. Très vite, les partitions ont pris le chemin de Paris. Ce n’était pas un hasard : pour son expansion économique, Buenos Aires avait choisi la Grande-Bretagne, mais dans le domaine culturel, Paris était son modèle. C’est pour graver des matrices, matériel alors rare en Argentine, que les premiers musiciens de tango rallient Paris, étape fondamentale de l’internationalisation. Ses musiciens et danseurs débarquent en 1907. Et c’est le coup de foudre. Paris s’éprend du tango. Jusqu’au vertige. La tangomanie est une folie des années folles. Les Parisiennes chics ne songent qu’à aller prendre des leçons chez un des nombreux professeurs qui ont pignon sur rue. Dès 1911, Le Figaro affirme : « Ce que nous danserons cet hiver sera le tango argentin, une danse gracieuse, ondulante et variée ». L’Europe emboîte le pas du tango. En 1913, la folie tango fait rage à Londres et à Berlin. Le tsar Nicolas II apprécie cette danse. « Tout le monde danse le tango », affirme en décembre 1913 un magazine de Saint-Pétersbourg. En Espagne, Alphonse XIII ne cache pas son amour pour cette musique, malgré les réticences de sa cour. Outre-Atlantique, le New York Times annonce : « Tout New York en folie tourbillonne au rythme du tango ». La première étape de cette conquête de Paris dure jusqu’à la Première Guerre mondiale. La guerre éclate, le tango rentre à Buenos Aires, paré du sceau de la Ville Lumière. Une reconnaissance qui lui permet de se faire accepter par la haute société argentine, jusqu’alors pleine de mépris pour la musique des bas-fonds porteños.

Après la Première Guerre mondiale, le tango et ses musiciens traversent à nouveau l’Atlantique pour s’installer sur la butte Montmartre. Maurice Chevalier se souvenait de ces Argentins qui paradaient sur la piste de danse. Aragon témoigne : « Des grosses dames impudiques se plient dans la pâleur du tango qui emporte des Sud-Américains couleur de cigare ». Désormais, le tango à Paris sort des cercles de la haute société française. La reconquête des années 20 est aussi la conquête de l’univers populaire. Le bandonéoniste argentin Manuel Pizarro, avec son orchestre formé de compatriotes et de quelques musiciens français, réalise son rêve en 1923 : la création du cabaret El Garron, au n°6 bis de la rue Fontaine, qui allait devenir l’antre du tango à Paris. On y côtoyait Sacha Guitry, Rudolph Valentino. Puis, en 1928, c’est l’apparition à Paris de Carlos Gardel, un immigrant français parti tout enfant de Toulouse et devenu à Buenos Aires le plus grand chanteur de tango de tous les temps. Selon la revue La Rampe de cette année-là, Gardel « nous entraîne sur la route de Buenos Aires, il emmène l’Argentine à Paris ». Les orchestres argentins font le voyage devenu rituel. De nombreux Français se joignent aux musiciens sud-américains. Dans les années 40, ils rivalisent avec eux au Mac-Mahon Palace, au dancing du Luna Park. Une école de tango française est née. Les accordéonistes se mettent au bandonéon. Surgissent Tango des fauvettes, chanté par Berthe Sylva, Le Plus Beau Tango du monde par Henri Alibert. Plus tard, ce sera le tour de Boris Vian (Tango poivrot), Léo Ferré (« Moi, je suis du temps du tango où même les durs étaient dingos de cette fleur de guinche exotique... »).

En 1954, nouvelle révolution pour la musique du Río de La Plata : l’irruption d’Astor Piazzolla. Dans l’histoire du tango, il y a un « avant » et un « après » la composition piazzollienne. Lui aussi est lié à Paris : décidé à rompre avec la musique de son enfance et de son pays, il obtient une bourse pour étudier avec Nadia Boulanger. C’est cette immense accoucheuse de talents qui le convainc de suivre son véritable chemin, le tango.

Avec la dictature militaire argentine des années 70, de nouveaux musiciens affluent. Le Cuarteto Cedrón s’installe en France, tout comme le bandonéoniste Juan José Mosalini. Piazzolla revient souvent à Paris, écrit pour Moustaki et Guidoni, inspire Julien Clerc (« Loco, loco, loco, c’est le nom qu’ils me donnent... ») et Guy Marchand (« Moi je suis tango, tango... »). Surgissent à Paris d’autres groupes contemporains. Et, comme dans l’alliance tramée entre la capitale argentine et la française, l’Histoire paraît se renouer inlassablement.

Dans les années 80, c’est la secousse provoquée par le spectacle Tango Argentino au Théâtre du Châtelet. Paris a de nouveau donné une impulsion internationale à une musique qui vivait une sorte de décadence.

Aujourd’hui, le tango est toujours hautement représenté en France par des musiciens du Río de la Plata. Progressivement s’est établi un nouvel univers parisien du tango. Les musiciens classiques le choisissent (Barenboïm, Kremer). La France et l’Europe entière se sont remises au tango dansé. Et dès que les beaux jours arrivent, on danse sur les quais de la Seine. Le tango à Paris ne sera jamais le dernier.

Nardo Zalko
Auteur de Paris Buenos Aires, un siècle de tango (éd. Le Félin, 1998) et Le Tango, passion du corps et de l’esprit (éd. Milan, 2001)

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Spectacle terminé depuis le dimanche 15 juin 2008

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