Spectacle en anglais / surtitré en français. Proposée l’année dernière dans une version encore fragmentaire sous le nom de Zeno at 4 A.M., William Kentridge, la Handspring Puppet Company et Kevin Volans nous présentent, cette saison, la forme définitive du roman d’Italo Svevo, La Conscience de Zeno. Du postulat de départ ils ont gardé l’allure spectaculaire de la représentation qui mêle le théâtre à la projection, la musique aux voix lyriques. Mais, désormais tout s’y déploie avec force et maturité. L’idée d’un cinéma vivant est devenue centrale ainsi que celle d’un théâtre musical proche de l’opéra. Au cœur de l’espace, un écran, et sur les côtés, en angle oblique, l’équipe de la Handspring Puppet Company manipule des marionnettes à tige construites à partir d’objets trouvés. Directement projetés sur grand écran, des assemblages de bois, d’aluminium ou de plexi ondulé font des silhouettes, des étendues désertiques, des flaques brillantes, des arbres en mouvement, des «femmes derricks» : tout un univers manipulé à vue qui croise les crayonnés noir et blanc de l’admirable dessinateur qu’est Kentridge. Kevin Volans, compositeur sud-africain, irlandais d’adoption, a composé une musique pour basse, deux sopranos, ténor et quatuor à cordes, qui évolue comme l’inconscient, avec des répétitions, des collages, des bribes et des éléments épars. C’est beau. C’est même très beau. Avec une distance d’autodérision fabuleuse, l’acteur emblématique sud-africain David Minaar, joue un formidable Zeno ballotté au fil des échecs de sa vie entre son père, sa femme et sa maîtresse.
Homme des mélanges, William Kentridge fait ainsi feu de tout bois. De l’art visuel à l’art des mots, de la gravure à la peinture, du jeu de scène à l’opéra, ce poète, plasticien, cinéaste, metteur en scène, crée des univers singuliers et fulgurants d’où jaillit une incroyable émotion. À partir de l’œuvre de Svevo, accompagné de ses amis artistes les plus proches, il a créé une œuvre qui lui est propre où les confessions et réflexions fugaces de Zeno nous accompagnent longtemps après la représentation… Tout ce qui bouge finit par s’user. La mort signifie t-elle la fin ? Comment savoir ce que je veux te dire ? Un spectacle merveilleux qui explore l’air de rien les méandres de la vie.
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