La pièce
Notes de mise en scène
Le Journal du dimanche -
dimanche 19 mars 2000
Gamine sinscrit dans un cycle que le théâtre du Nord-Ouest consacre à la " Confusion des sens ". Autour de ce thème central, on peut découvrir onze pièces, à la fois classiques - comme Phèdre - et contemporaines - comme La Ville dont le prince est un enfant - sur dses sujets dune brûlante et douloureuse actualité.
Venise, dans les années 60. Bartolo est un peintre âgé, un artiste aussi talentueux que méconnu. Quelques années auparavant, il a adopté Anna, fille de paysans, dans le but de lui offrir une éducation et un avenir dignes de son intelligence et de sa sensibilité. Une attitude de Pygmalion dans laquelle son désir pour la jeune fille ne tarde pas à se manifester. La pièce commence au moment où Anna, âgée de quinze ans, prend la fuite : Bartolo l'a caressée. Révélant le lien trouble entre le peintre et sa fille adoptive, ce geste est le catalyseur de toutes les rancunes, les frustrations et les passions de ceux qui vivent sous lemprise de Bartolo, homme de génie et tyran : Gilda , sa femme, Lorenza, sa fille, Giulio, son gendre et Giovanni, lami de la famille. Le voile convenable du quotidien se déchire le temps dun règlement de comptes. Pour chacun, avec les autres et avec soi-même. Une lutte dont Anna se trouve être lenjeu. Et Bartolo, laccusé.
Il y a dans la pièce de Mainardi, ce qui est essentiel au théâtre : une vérité. Les personnages sont complexes, peints avec une finesse psychologique extraordinaire. Malgré leurs relations familiales crues ou troubles, ils ne sont ni des monstres, ni des saints : simplement des hommes, des êtres de souffrance avec leurs failles, leurs rêves, leur besoin damour. Leur histoire se laisse découvrir progressivement, dévoilant ses sentiments secrets, en-deça des mots, des gestes. Le drame néclate que par bribes, étouffé par les apparences convenables du quotidien, dissimulé sous une façade légère et insouciante. Il fallait donc amener les comédiens à vivre et à porter sur scènes la vérité profonde dêtres réels si touchants, et de cette tranche de vie vénitienne bouleversante et actuelle.
Carlotta Clerici
Le Journal du dimanche - dimanche 19 mars 2000
On comprend pourquoi lauteur de Gamine, Renato Mainardi, commençait à être célèbre en Italie lorsquil est décédé, au début des années 90 : la façon dont il samuse à semer le trouble chez le spectateur est un véritable enchantement. Il le fait avec une délectation que certains trouveront morose quand dautres diront au contraire quelle est la marque dun inébranlable amour de la vie. Le texte campe, dans une Venise des années 60 tout ce quil y a de plus universel, des personnages ambigus, douloureux, successivement agaçants, odieux et attendrissants, tous très justement interprétés : de Philippe Seurin à Elvire du Chaffaut en passant par Philippe Desboeuf et Jean-Pierre Chanson, Christine Melcer et Adrienne Bonnet.
Pascale Amaudric.
13, rue du Faubourg Montmartre 75009 Paris