Les Talens Lyriques, dirigés par Christophe Rousset, vous proposent de (re)découvrir l'intégralité des symphonies de Schubert. Au programme de ce concert : Symphonie 8 en si mineur D 759 « inachevée » , Symphonie 1 en ré majeur D 82 et Symphonie 3 en ré majeur D 200.
Œuvre fondamentale, la Neuvième Symphonie en ut D 944, dite « La Grande », offre une maîtrise concise du rythme, des procédés structurels et rythmiques dignes du dernier Beethoven et une rigueur de la forme qu’on ne retrouve dans aucun autre ouvrage symphonique ou instrumental de Schubert. Si la Symphonie « Inachevée » était dès ses premières mesures profondément différente de toutes les symphonies de l’Histoire, notamment par son recours aux ostinatos rythmiques, au « silence expressif » et à un ambitus étroit des thèmes, la Grande Symphonie en ut s’oppose à l’« Inachevée » tout en semblant être issue de son « impasse » même. Elle représente la clé de voûte de toute la carrière de son auteur et, dans son respect de la forme stricte, elle est un jalon aussi essentiel que la Neuvième Symphonie de Beethoven (qui la rompt). En tant qu’exemple parfait d’unité interne (seulement une demi-douzaine de motifs élémentaires la gouvernent de bout en bout), elle est la pierre angulaire de toute la littérature orchestrale à venir. Elle porte aussi à son apogée la palette et les dons d’instrumentation de Schubert qui, en dépit de son peu de pratique de la direction, trouve d’emblée l’équilibre de couleurs et d’expressions rendant son orchestre limpide et homogène. La postérité des deux derniers chefs-d’œuvre symphoniques et orchestraux de Schubert, ignorés par tout le monde pendant un demi-siècle, est beaucoup plus grande qu’on ne le croit : il y a, malgré les différences de dimensions, une évidente filiation entre l’« Inachevée » et la Neuvième Symphonie de Mahler, comme il y a une filiation tout aussi indiscutable entre la Grande Symphonie en ut et les meilleures symphonies de Bruckner à partir de la Quatrième.
Achevée le 28 octobre 1813, la Première Symphonie en ré majeur de Schubert est écrite dans l’esprit de Mozart, mais on a souvent signalé mainte parenté avec la Sonate « Pathétique » et les deux premières symphonies de Beethoven. On n’y trouve cependant nul exemple de ce crescendo orchestral révolutionnaire cher à Beethoven. Schubert se contente des effets dynamiques et de la « sérénité » qui avaient été ceux de Haydn et Mozart. Dans le premier mouvement, le début de la reprise, avec le rappel de l’introduction, deviendra une particularité, une « signature » schubertienne jusqu’à l’Octuor.
Légèrement plus courte et incisive que les deux premières, la Troisième Symphonie en ré majeur (mai-juillet 1815) témoigne surtout d’une concentration et d’une densité d’écriture considérablement plus grandes. Schubert s’écarte sensiblement du modèle mozartien et les crescendos d’orchestre « beethovéniens » commencent à jouer leur rôle.
1, place du Châtelet 75001 Paris