« En se déplaçant dans son cadre, l’homme transporte avec soi toutes les positions qu’il a déjà occupées, toutes celles qu’il occupera. Il est simultanément partout, il est une foule qui avance de front, récapitulant à chaque instant une totalité d’étapes. Car nous vivons dans plusieurs mondes, chacun plus vrai que celui qu’il contient, et lui-même faux par rapport à celui qu’il englobe. » Claude Levi-Strauss, Tristes Tropiques
Gyrations of barbarous tribes est née d’une rencontre entre artistes européens, japonais et mozambicains - une rencontre construite sur la friction et l’étincelle. Le spectacle nous présente différentes étapes de cette rencontre, il donne à voir les liens possibles, les impasses, tout ce qui s’établit d’un corps à un autre et de chaque corps au collectif, à la tribu. Il donne à voir les marques, les manques.
Glisser d’une culture à une autre, c’est trouver les points de frictions, les oppositions de couples contraires - noir / blanc, désir / argent, libre / captif, passion / mépris, pouvoir / bonne conscience, nord / sud, majeur / mineur - et les transformer en impulsion.
C’est chercher dans la direction de l’autre, trouver la bonne fréquence à partir de la singularité de son propre corps. Gyrations of barbarous tribes est une exploration par cercles concentriques, un spectacle touche-à-tout : une danse tribale se transforme en « battle », le djembé africain rythme la mélodie du violon japonais, les séquences de hip-hop ou de musique électronique. Chaque état créé peut virer, tourner - jusqu’à la transe, et construire un autre état, inconnu.
La remise en question de l’identité, de la culture, du sexe se fait toujours en s’appuyant sur l’autre, en se confrontant à la différence, à la violence qui peut en surgir. Au terme du voyage, les danseurs parviennent à dégager une énergie fédératrice. Une question émerge, posée par le titre : qui est le barbare ? Par la succession de passages, de relais que propose ce « tournoiement des tribus barbares », chacun est placé en face de son ailleurs, de son étranger, chacun devient le barbare de l’autre. Kubilaï Khan Investigations nous propose d’aller chercher dans son « lointain intérieur », pour y trouver l’énergie, la joie de la transformation permanente.
Gilles Amalvi
« Cette exploration-expédition des ailleurs lointains et intérieurs structurés autour de frictions : noir/blanc, désir/argent, oscillation/tensions, libre/captif, pouvoir/bonne conscience, passion/mépris, dégage une matière impulsive et vibrante à laquelle se lie la première identité, celle du corps, une identité de chair (…) » Frank Micheletti
Musique live : Rui Owada, Takumi Fukushima et Matchume
Depuis sa création en 1996 à Toulon, Kubilaï Khan Investigations centre ses recherches sur la rencontre, les déplacements, les mutations, les évènements migratoires. Ce "comptoir d’échanges artistiques" est composé de danseurs, de musiciens, d’artistes de cirque, de photographes et de vidéastes qui aiment se frotter aux questions d’altérité, d’identité, de singularité, d’attente. A travers leurs tournées, les membres de Kubilaï Khan Investigations, autour de Frank Micheletti, interrogent le mouvement et le confrontent à d’autres disciplines artistiques, mais aussi se frottent à l’image, l’écriture, l’ethnologie, la philosophie. Chaque moment doit être une expérience qui puisse ouvrir sur des nouvelles pistes de réflexion. Ces échanges appellent une réciprocité, une complicité, des connivences.
Stations frontières, créé en 1998, s’est articulé autour de l’héritage laissé par le passé industriel du site minier de Wendel Petite Rosselle et du questionnement sur les communautés étrangères amenées à travailler dans la mine.
Tanin no Kao (Le visage de l’autre en japonais ), créé en 2001, aborde des problématiques identitaires. Le groupe y approfondit davantage la démarche transversale et pluridisciplinaire qui est la sienne - déjà présente dans Wagon Zek (1996) et Soy (1999) - avec la participation d’un photographe, Antoine d’Agata, et d’un vidéaste, Nuno Olim. Parallèlement, des petites formes appelées Poko Dances sont créés avec Cynthia Phung Ngoc et Dimitri Jourde. Ces solos, duos, trios permettent une liberté à chaque créateur, tout en s’inscrivant dans un projet de groupe. Parmi les dernières créations : Mecanica popular (2002), Sorrow Love Song (2004) et As long as it blossoms - solo (2005).
2/4, rue Alexandre Bachelet 93400 Saint-Ouen
Voiture : D111 depuis Porte de Saint-Ouen, direction Mairie de Saint-Ouen. Prendre à droite rue des Rosiers et à gauche, rue Alexandre Bachelet. Rue des Rosiers depuis Porte de Clignancourt, puis à droite, rue Alexandre Bachelet. D912 puis D410 depuis Porte de Clichy, puis à droite, rue Ernest Renan et prendre à gauche, rue Alexandre Bachelet.