Les petits-bourgeois se raccrochent à des habitudes de petits-bourgeois. Ils s’invitent à dîner, ils dînent. Frank, sa femme, son collègue Hal et sa bellemère se retrouvent autour de la table. Routine implacable. On se parle, on joue le jeu, on observe le protocole des convenances. Mais les personnages de Kvetch ne s’en tiennent pas là. Ils énoncent à voix haute ce qui leur passe par la tête, les hargnes, les frustrations, pensées tordues et désirs secrets. Ils suivent la monotonie d’un quotidien normé, mais ils se révèlent, au bureau, au lit, à table. Ils balancent tout, font entendre ce qui grouille, « les mots à l’arrière de nos têtes ». Et le rire, jaune parfois, naît des abcès crevés.
Icône du cinéma américain, Steven Berkoff joue dans Rambo II ; Barry Lyndon ; James Bond ou The Borgias. Il écrit Greek ; Decadence et Kvetch dans les années quatre-vingts.
Comédie satirique ou drame intime, Kvetch met le doigt sur le nerf de l’inavouable, les mensonges d’un milieu juif new-yorkais aisé, hypocrisies universelles.
Sophie Lecarpentier a dirigé les œuvres de Beaumarchais, Nathalie Sarraute, Dieudonné Niangouna. Au Rond-Point, elle a présenté Le Fait d’habiter Bagnolet de Vincent Delerm. Elle conçoit la pièce comme un vaudeville et une tragédie, un cauchemar où se percutent joyeusement les trahisons, les hontes de soi et de l’autre, les soifs de pouvoir, comme autant de petits crimes entre « gens bien ».
« Kvetch est une pièce formidable où tous les personnages sont terrorisés et où personne n’ose assumer son désir. C’est gonflé, juste, et très bien joué. » Hélène Kuttner, Artistikrezo, 16 février 2016
« Stéphane Brel, Fabrice Cals, Anne Cressent, Julien Saada sont irrésistibles. Les sons si purs de l'alto de Bertrand Causse nous rappellent que le monde est beau. » Armelle Héliot, Le Figaro, 5 février 2016
« La pièce de Steven Berkoff et la mise en scène de Sophie Lecarpentier sont pleines d'humour et d'énergie. Tout fait de ce spectacle une belle réussite. Sylviane Bernard-Gresh, Télérama Sortir, 3 février 2016
« Un merveilleux spectacle court, généreux, décapant et drôle, qui aura, espérons-le, le succès qu’il mérite. » Igor Hansen-Love, L’express styles, 3 février 2016
Kvetch : un portrait drôle et féroce des hommes et de leurs peurs, un hymne à l’ouverture aux autres, une prise de conscience de la fragilité humaine qui fait sa richesse.
« C’est de ta peur que j’ai peur » William Shakespeare
Le monde moderne qui nous contraint à toujours plus de compétitivité, de désir de perfection, de peur de faillir, accentue notre perte de confiance et accroît la sensation de mystère et d’angoisse face au jugement d'autrui. « Que pense-t-il là maintenant quand je lui dis ça ? Me juge-t-il ? » sont des questions qui traversent l’esprit de chacun... Steven Berkoff appuie le trait et stigmatise nos peurs avec humour.
Les figures auxquelles il donne vie dans Kvetch sont comme transparentes : elles tiennent en parallèle un double discours et nous donnent à entendre après chaque parole dite à autrui, leurs pensées intérieures. Et l’on découvre des êtres irrésistiblement comiques car asphyxiés par les interdits, hilarants parce qu’engoncés dans leur peur de décevoir, de ne pas être à la hauteur, de ne pas plaire. Ils ne retrouvent une respiration vacillante que dans leurs questionnements intérieurs.
L'homme peut-il faire taire « ce gendarme intérieur » qui s'apparente au surmoi freudien, lentement et savament édifié par l'éducation et la vie en société ? Quelle est la part de liberté de chacun face à son désir ? Chez Berkoff, l’homme est terriblement faible et incroyablement fort. Cela confère à sa vision du monde une force réjouissante et tonique, qui nous renvoie à nos responsabilités d’homme et de femme acteurs de nos destins.
Mélange baroque d'argot, de langage ordurier et de pure poésie, la langue de Berkoff explose d'érotisme, de cruauté et de lyrisme. Plus qu'une simple provocation, cette langue racle et fait exploser joyeusement nos préjugés. Par le rire, la pièce nous incite à nous rendre maître de tout ce qui dans nos vies renonce, cède à la morale, à la norme et à l'hypocrisie, à tout ce qui se résigne. C’est peut-être un curieux hymne à la vulnérabilité de l’homme.
Pour moi, Kvetch est un vaudeville et une tragédie shakespearienne, Berkoff, un Pinter qui aurait lu Pirandello... Par sa théâtralité originale, la pièce réussit à mêler ainsi politique et humour, dénonciation et sensualité. C’est une pièce qui parle du théâtre et de la liberté folle du plateau, territoire de tous les possibles, de toutes les audaces, même de celle de dire avec les mots ce que les mots ne peuvent, et n’osent, au quotidien, formuler.
Sophie Lecarpentier
Donna (femme de Frank) - Il a honte. Je fais ce que je peux mais j'ai peur tout le temps... Qu'est-ce que son ami doit penser ?... Est-ce que je transpire ?... Qu'est-ce que je vais dire maintenant ?... Maintenant que vous êtes séparés, Hal... Qu'est-ce que vous faites de vos soirées ?...
Hal (ami de Franck) - Seigneur... Mes soirées... Eh bien... Je... Reste enfermé chez moi et je pleure... Fume à en crever... Me cure le nez... Regarde la télé jusqu'à ce que je tombe de sommeil avec une bouteille de scotch à la main... Je compte les cheveux sur mon peigne quand je vais à la salle de bain... J'appelle une pute... Je marche de long en large... Je m'endors et j'attends le matin pour pouvoir faire quelque chose... Je crie, je prends du valium... Je songe à l'overdose... Mes soirées... Eh bien...
Frank - Quelle question idiote à poser à un homme qui est séparé... Mais qu'est-ce qu'elle croit qu'il fait... Qu'il invite à dîner des acteurs de cinéma ?
Hal - Eh bien, mes soirées... Je rentre à la maison et vous savez... Je trouve plein de choses à faire... Vous seriez surprise... Comme on trouve... Tellement... Qui ne sont pas faites... Ouais vous savez... Des lettres... Qui n'ont pas été écrites... Ouais des amis qu'on a négligés...
Le rapport homme femme a beaucoup évolué. Le texte est sexiste et miso mais n'est pas réhaussé par les comédiens qui s'ennuient autant que nous
comme tous les spectacles inattendu et original
Pour 2 Notes
Le rapport homme femme a beaucoup évolué. Le texte est sexiste et miso mais n'est pas réhaussé par les comédiens qui s'ennuient autant que nous
comme tous les spectacles inattendu et original
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