Présentation
Avec 80 participants dont 50 comédiens
Ils ont joué dans " La Passion "
Les Fruits de La Passion
Les Europassions
" La Passion de Jésus, c'est le noeud dramatique le plus grandiose, le plus formidable, le plus embrouillé qui se soit vu, et cependant tout cela se conçoit aujourd'hui, s'explique et explique tout. " Proudhon, Philosophe du XIX ème siècle.
Récitant : Laurent Terzieff - Musique : René Aubry - Costumes : Donald Cardwell.
Passion historique
D'après les quatre Évangiles. Le récit sans cesse renouvelé de compagnons abandonnant leur maître la veille de son jugement. Un procès politique et religieux embrouillé et bâclé qui tente de faire ignorer le message de vérité dont l'homme a le plus besoin. L'histoire d'un homme libre et doux qui préférait l'amour à la puissance et qui en est mort, atrocement crucifié entre deux voleurs, il y a vingt siècles...
Procès et mort de Jésus : la pièce commence par le récit de la résurrection du Christ, à partir duquel on remonte le temps. Un témoignage vivant et actuel sur un drame vieux de 2000 ans.
Passion vivante
Depuis 1932, des artistes, des étudiants, des ouvriers, des commerçants incarnent les rôles de Jésus, de Jean, des Apôtres, des grands Prêtres... Fidèles à la tradition des célèbres Mystères du Moyen-Age qui se jouaient sur le parvis des cathédrales, ils cherchent à traduire les questions que leur pose le texte sacré, à travers une grande fresque généreuse adaptée des quatre Evangiles.
Passion populaire
Six mois de travail pour les habitants du Ménilmuche de Piaf et Chevalier. Du grand père au petit fils, du croyant à l'incroyant, c'est tout un vieux quartier de Paris qui se mobilise chaque année pour faire revivre une forme théâtrale d'expression populaire et perpétuer une histoire de famille et de génération. Plus qu'une troupe, il s'agit d'une véritable communauté, un témoignage fervent, enthousiaste, dépouillé, d'une belle sobriété.
Depuis 1932, chaque année, tout un quartier se mobilise et fait revivre pendant deux heures, une forme théâtrale d'expression populaire proche de la tradition des fameux Mystères du Moyen-Âge.
Perché sur les hauteurs de Paris, le quartier de Ménilmontant, fort de quatre-vingts irréductibles Ménilmontagnards passionnés, résiste à l'invasion des productions pharaoniques. Une véritable audace de la part de ces habitants qui rivalisent brillamment de générosité, d'intelligence et d'ingéniosité face à la toute puissance des Goliath du spectacle théâtral.
L'invention contre la démesure, ce sont là les moyens mis en œuvre et mis en scène par ces comédiens qui auto-produisent cette formidable Passion. Une tradition qui se joue du temps qui passe, une histoire d'aujourd'hui, une belle aven-ture humaine au service d'un message universel jeune de deux mille ans.
Cette histoire, c'est celle d'un procès bâclé.
Le procès d'un homme accusé d'avoir profondément dérangé toutes les classes sociales d'une société. Une société qui s'est alors mise à douter, à réfléchir et à remettre en cause ses statuts et son devenir.
Un procès arrangé dans la précipitation des fêtes de Pâques. Le procès et la mort d'un innocent. Le procès d'un homme appelé Jésus. Alors rien d'étonnant si, depuis 1932, le théâtre de Ménilmontant se transforme chaque année en une sorte de salle d'audience. Une scène en forme de tribunal, où la procédure appliquée à la hâte pour condamner un " perturbateur " demeure toujours d'une actualité brûlante.
Et si on connaît la conclusion du procès de Jésus et la fin de cette histoire qui l'a conduit à la croix, La Passion à Ménilmontant, elle, nous invite à regarder d'un peu plus près les conditions de sa condamnation. Dans un jeu dépouillé de toute caricature, ce spectacle mis en scène par Didier Braun, fait justement appel à notre curiosité. Et si nous grattions un peu l'histoire. Si nous allions voir comment cela s'est vraiment passé. C'est audacieux et c'est bien là tout le défi réussi de la Passion à Ménilmontant. Une Passion dont la fraîcheur et l'actualité nous entraînent et nous ramènent à notre propre histoire. Celle que l'on vit aujourd'hui. Celle qui dans le fond, n'a pas si profondément changé.
D'ailleurs, tout dans cette représentation donne à réfléchir. Dans une forme et un langage actuels, ce spectacle surprend pour mieux témoigner. On questionne. On doute. On interroge et on s'interroge sur les actes, la logique et les décisions de chacun des protagonistes. On se surprend à écouter Judas exposer sa façon de voir et de concevoir la vie et les relations d'amitié. On se laisse prendre par la vie des uns et des autres. On va même jusqu'à imaginer que, le temps de la représentation, le cours de cette histoire pourrait bien changer.
C'est la preuve que l'émotion passe et qu'un peu d'audace permet d'aiguiser la curiosité et d'éveiller un champ de réflexions chez les plus réfractaires. Car ici, pas besoin d'être croyant pour jouer dans la Passion ou pour venir la voir.
Athées ou fidèles, la scène et la salle sont ouvertes à tous. Alors il est peut-être bien là le secret de La Passion à Ménilmontant. Dans ce lien qui se tisse entre les acteurs et qui relient les spectateurs.
Une prouesse ? Non ! Du travail avant tout ! Mais surtout, un réel plaisir de jouer, de se rencontrer, de se retrouver et de participer à l'élaboration d'une belle aventure. Une aventure, au départ, qui doit son existence à la détermination des habitants du quartier de Ménilmonant, pour que vive, chaque année, cette Passion sur la scène du théâtre de la rue du Retrait.
Un théâtre qui a vu naître beaucoup de talents aujourd'hui reconnus. Un lieu qui, tout au long de l'année, donne leur chance aux nouveaux créateurs dans les disciplines les plus variées telles que la musique, le court-métrage, la danse, les spectacles contemporains et le théâtre.
Mais c'est l'heure ! Les lumières s'éteignent lentement et la voix de Michel Etcheverry nous emmène déjà loin d'ici, quelque part vers une terre lointaine, plongée dans l'ambiance sonore de ce que l'on pouvait entendre il y a un peu plus de deux mille ans. Deux heures de représentation. Deux mille ans d'histoire qu'un rideau sépare. Deux mille ans qui font tout simplement ce que l'on est aujourd'hui. Images d'hier, témoins d'aujourd'hui. A-t'on tellement changé, au fond ?
Fabrice Drouelle
Journaliste et présentateur du journal de 19 heures sur France-Inter, joue depuis trois ans dans la Passion. Pour la deuxième fois, il interprète le rôle de Ponce Pilate : " Mon métier, par la force des choses, me met dans la réalité dont je suis un observateur actif. J'avais envie de trouver un créneau d'expression dans l'imaginaire. Je l'ai trouvé dans le théâtre. J'aime le rôle de Pilate. C'est un homme de pouvoir et de doute à la fois. Face à Jésus, il a une démarche rationnelle qui s'apparente à l'état de droit qui est au fond une notion très moderne. On s'aperçoit finalement qu'il y a 2000 ans, on en avait déjà une esquisse. Jouer un rôle dans cette pièce n'est jamais un acquis. Être distribué est toujours une conquête " .
Jean Teulé
Journaliste et écrivain, vient d'écrire " Longues peines " , son tout nouveau livre qui raconte la prison. Un récit en forme de clin d'œil quand on sait que Jean Teulé a interprété le rôle de Barabbas dans La Passion. " Si j'ai joué ce rôle de Barabbas, c'est parce que ça me plait ce principe de gens de quartier qui se réunissent pour jouer, et qui tout d'un coup se retrouvent en position de héros, un peu comme des personnages de roman. En tout cas, si l'idée de la prison est sans doute archaïque, je dois dire qu'il n'y a pas eu une grande évolution depuis 2000 ans " .
Dominique Verdheillan
Journaliste, spécialiste des affaires judiciaires sur France 2. " J'ai joué dans La Passion parce que j'ai été séduit par les planches. J'avais une vraie envie de théâtre. Je l'ai fait aussi parce que la vie de Jésus, ce n'est pas n'importe quelle histoire. Et on ne peut pas embrasser ce texte sans émotion. On m'a proposé le rôle de Nicodème. Je l'ai accepté et je l'ai fait comme un pari personnel. Pour voir si j'étais capable. Mais c'était bien plus fort que celà. J'étais un maillon dans une chaîne de solidarité avec, sur le dos, cette responsabilité vis-à-vis d'une troupe. Pour parler de cette partie de la vie de Jésus qui est La Passion, je dirais que dans ce procès, c'est pire que des vices de forme. C'est une justice qui n'existait pas, qui n'avait aucune légitimité. Il n'y a d'ailleurs pas de la part de Pilate et des magistrats une volonté de justice. C'est un procès pour la forme. Aujourd’hui encore, je garde un très bon souvenir de cette Passion à Ménilmontant " .
S'il est une passion qui dure et qui défie le temps, c'est bien celle qui se joue au mois de mars au théâtre de Ménilmontant. Depuis 1932, chaque année, imperturbablement le rideau du théâtre s'ouvre sur cette scène de la vie de Jésus.
Une tranche de vie interprétée comme à ses débuts, par les habitants de ce quartier de Paris. Un projet fraîchement audacieux de la part de jeunes passionnés qui pendant quatre mois, après leur journée de travail, répètent et peaufinent un rôle qui comme le maillon d'une chaîne, contribue à la renaissance de cette merveilleuse Passion. Une Passion dont le secret et la réussite tiennent dans la force du témoignage que l'actualité ne saurait démentir. Une Passion mûrie en coulisse et qui s'ouvre pendant treize représentations à un public toujours plus nombreux.
Tout a commencé un dimanche 6 mars 1932. Sous l'impulsion des habitants de Ménilmontant, et suite au succès d'une représentation donnée l'année précédente qui mettait en scène la vie de Jésus, la Passion créée de toute pièce par les gens du quartier vit ainsi le jour. Grâce à la détermination de la troupe amateur de l'époque, et des générations qui ont suivi jusqu'à ce jour, la Passion à Ménilmontant s'enrichit et se bonifie d'année en année. Comme quoi la réussite est bien l'apanage d'un brin d'audace, d'un peu de conviction et de ténacité et de quelques heures de travail.
Soixante-neuf ans de représentations. Soixante-neuf ans sans interruption. En fait, pour être tout à fait exact, la toute première ébauche de ce que devait devenir plus tard la Passion jouée à Ménilmontant, remonte à 1896. Sous une forme bien différente de celle que l'on connaît aujourd'hui, elle fut reprise en 1902. La pièce représentait alors vingt-deux tableaux vivants de la Passion de Jésus. Un record d'affluence. Passion de remonter sur les planches l'année suivante.
En effet, dès 1903, l'état récupèra les locaux du théâtre qui furent alors vendus. Et la Passion alors ?
Eh bien ! Loin d'avoir dit son dernier mot, elle brûla les planches, pour une grande première, le 6 mars 1932. Un dimanche de Carême qui donna le coup d'envoi de la Passion à Ménilmontant. Une Passion qui ne devait plus s'arrêter.
Des cinq heures de représentations de l'époque, où les changements de décors entre chaque acte cassaient le rythme du spectacle, il n'en reste plus que deux, concises et denses. Deux heures qui sont le fruit des différents metteurs en scène qui y ont apporté leur patte. Des griffes successives qui ont innové et rafraîchi le jeu sans trahir le texte ni surtout le témoignage qui fait la force de ce spectacle dynamique, émouvant et tellement actuel.
La Passion, une véritable affaire de Passionnés. En 1992, grâce au travail de trois " Passionnés " , le texte prend la forme qu'on lui connaît aujourd'hui. Un texte cohérent, mordant, incisif qui surprend pour mieux interroger. Au travers de ce témoignage émouvant qui parle des hommes et des femmes que nous sommes, le spectacle ne raconte pas la fin. Il va plus loin.
Il s'intéresse aux circonstances qui ont mené Jésus à la croix. Une enquête dont le spectateur est le témoin. Une démarche judiciaire loin des règles dictées par la déontologie. Un procès qui aujourd'hui ferait scandale pour vice de forme dans une procédure appliquée à la hâte. Un procès dont nous pouvons suivre, en tant que spectateurs, les dessous des démarches judiciaires qui, normalement, se trament bien loin des regards et des oreilles du public.
Une saine curiosité que l'on doit à ce spectacle et à la patte de Didier Braun qui met en scène cette Passion de Jésus. Il sait capter la moindre expression, le moindre geste de chacun pour aussitôt les mettre en scène. Il réinvente à chaque fois. Un vrai travail sur mesure. C'est ça, la Passion à Ménilmontant ! Une joyeuse bande de copains qui se retrouvent pour le plaisir de jouer, de travailler, de donner le meilleur d'eux-mêmes. Pour le plaisir d'offrir, tout simplement et de témoigner, aujourd’hui du plus beau message d’amour qui soit : la vie.
Si les habitants de Ménilmontant ont su imposer la Passion et lui donner vie jusqu'à ce jour dans ce quartier de Paris, d'autres passionnés à travers douze pays d'Europe mettent en scène, à leur façon, cette forme d'expression théâtrale. Des populations de cultures et de niveaux économiques différents que la Passion a rapprochées. Un échange culturel et une entraide des Passions les plus riches envers les plus démunies.
Les représentations théâtrales de la Passion du Christ remontent en fait au Moyen-Âge. À cette époque, les Mystères, un genre théâtral qui mettait en scène des sujets religieux, étaient joués par les habitants des villes sur le parvis des cathédrales.
Aujourd'hui, cette tradition se perpétue, notamment en Europe où cinquante-cinq troupes interprètent, toutes de leur côté, cette Passion du Christ, selon leurs coutumes locales. De Finlande jusqu'en Espagne, en passant par l'Italie, la Pologne, la Roumanie, l'Allemagne, l'Autriche, la Belgique, la Croatie, la République Tchèque, la Hongrie, les Pays Bas, la Suisse ou encore la France, la Passion est un rendez-vous obligé.
Et bien plus qu'un spectacle joué par les unes et les autres des compagnies par delà les frontières de l'Europe, la Passion contribue à aider les pays de l'Est en difficulté.
Pour ne citer qu'un exemple, la Roumanie reçoit l'aide financière et matérielle des Passions les plus riches pour que vive un orphelinat de quatre cents enfants. Un geste et une contribution qui semblent issus directement de la Passion dont le message et la force du témoignage ont véritablement porté leurs fruits.
C'est en 1980 que débutent concrètement les relations avec les différentes Passions d'Europe.
Les liens se tissent entre les pays. Les différentes troupes de théâtre découvrent la mise en scène et la diversité des interprétations des uns et des autres. On se rencontre. On échange, on dialogue pour en arriver à la conclusion qu'un même message peut être délivré différemment selon les particularités et les cultures de chacun.
Les EuroPassions donnent alors le ton bien avant l'heure, dans cette grande ouverture européenne. En 1992, Ménilmontant devient un véritable carrefour de cette nouvelle Europe naissante en accueillant toutes les Passions d'Europe pendant quarante-huit heures.
Si chaque pays apporte la diversité de ses interprétations bien différentes de la Passion, le message qui s'en dégage reste bien le même. Le témoignage d'une amitié sans frontières.
15, rue du Retrait 75020 Paris