Au programme, deux pièces courtes de Molière : Le Médecin Volant suivi de L’école des maris.
Avant-propos
Le Médecin Volant
L’école des maris
Molière reste l’un des auteurs classiques les plus populaires, et des plus riches que nous ayons… Il fascine toujours les metteurs en scène, intrigue les interprètes et amuse le public.
Mais si Molière fascine toujours autant, ce n’est pas seulement par le rire, mais surtout par l’acuité et la vérité des sentiments qui habitent ses personnages : la violence de ses héros, leurs faiblesses, leurs blessures bien plus profondes qu’ils nous les laissent croire...
Car Molière était un homme torturé, aux multiples visages : il est tantôt triomphant dans le Sganarelle du Médecin Volant ou du Médecin malgré lui, un Sganarelle alors philosophe, cynique se jouant de tout et de tous… libre, énergique et lumineux… Et tantôt on le découvre perdant, angoissé par ses congénères, ivre de jalousie, rongé par la futilité de ceux qui l’entourent. C’est Alceste, Dandin, les Marquis des Précieuses Ridicules, c’est aussi Dom Juan le plus cynique de tous. C’est Sganarelle de L’école des Maris… Obtus, rageur et sombre.
Il nous a semblé intéressant de traiter en un seul spectacle les deux visage de Molière… En commençant par un Médecin Volant enlevé, virevoltant, empruntant les masques de la commedia, les nez de clowns.
De la magie du ballet et de la prose, nous passerons à la furieuse ronde de Sganarelle, à la cruauté des alexandrins d’Isabelle, à la nuit intrigante et mystérieuse où le destin de Sganarelle basculera vers les sombres affres de la déception amoureuse.
Vous prenez un père (Gorgibus), bon comme le pain, ayant pour dessein de marier sa fille à Vilebrequin, invisible ami vieillard ; son valet (Gros René), qui a du flair et de l'appétit, sa fille (Lucille) qui simule la maladie pour retrouver le corps de son amant dans la cabane au fond du jardin, une cousine électrique, sexy et complice (Sabine), le bel amant (Valère) très amoureux et très organique, un avocat, et enfin le valet de Valère (Sganarelle), fruit d'une gestation très éclectique entre humain, chat, singe, cochon et peut-être même le diable, qui sait ?
Vous mélangez... résultat : une farce remplie d’intrigues loufoques et de stratagèmes délirants.
Molière a emprunté le thème du médecin volant à un canevas italien, joué sans doute par Scaramouche. Les thèmes de farce constituaient un fonds commun où puisaient librement comédiens français et italiens. Molière emprunta ensuite plusieurs traits à son médecin volant, que l'on retrouve dans l'Amour Médecin, le Médecin malgré lui et le Malade imaginaire, ce qui prouve combien toute son oeuvre comique est nourrie de ses premières farces.
Le jeu, la folie, l'énergie des comédiens ainsi que la mise en scène entraîneront le spectateur dans un numéro de haute voltige, au coeur d'un ballet burlesque où la commedia dell'arte flirte sauvagement avec Tex Avery.
Les frères Sganarelle et Ariste sont les tuteurs de deux sœurs, Isabelle et Léonore. Sganarelle, personnage noir, mu par une haine des moeurs de son époque, rongé par la peur d’être cocu, rêve d’aller revoir « ses choux et ses dindons » loin des futilités de la ville, en compagnie de sa filleule Isabelle qu’il compte épouser d’ici peu…
Ariste, Léonore et Lisette tentent d’adoucir la rudesse de Sganarelle envers Isabelle. Celle-ci, ne supportant plus le joug de son tuteur, décide par différents stratagèmes d’épouser un jeune voisin nouvellement arrivé… Sganarelle à son insu deviendra le maître d’œuvre de sa perte…
Dans cette pièce, ce n’est plus le Sganarelle triomphant du médecin volant ou du médecin malgré lui. C’est un Sganarelle inquiet, noir, qui est à la ville comme un loup en cage…Il a l’âpreté et la naïveté de Dandin, le désespoir et l’amour d’Alceste. Il est violent, sombre et pathétique. Il me semblait intéressant de traiter cet aspect de la pièce.
L’école des Maris semble être une farce, mais c’est une farce aux accents grinçants et menaçants, qui laisse un arrière goût amer.
14 bis, rue Sainte Isaure 75018 Paris