Présentation
Intentions de Stuart Seide
C'est la troisième fois, après Le Retour et L'Anniversaire, que Stuart Seide se confronte à Pinter et à ses atmosphères troubles, indécises, livrées aux petits jeux cruels du mensonge et de la vérité. Ils sont trois. Il y a un vieillard qui s'appelle Davies A moins qu'il ne s'appelle vraiment Jenkins. Il y a deux jeunes frères qui veulent l'engager en tant que gardien à moins qu'ils ne soient pas vraiment frères A moins qu'ils n'aient aucun besoin d'un vrai gardien. Trois " laissé pour compte ", trois individus qui habitent les bas-fonds, les étages inférieurs de nos villes. Trois vies en quête d'attache et de signification. Ils entreprennent, peut-être à leur insu, un voyage ludique et corrosif dans le faux-semblant, dans un jeu de manipulation dont nul ne semble le maître.
Où est le vrai et le faux ?. Qui manipule qui ? Ces hommes le savent-ils eux-mêmes ? Ce sera la troisième fois que je monte une pièce d'Harold Pinter, les deux premières étant Le Retour et l'Anniversaire. Pourquoi est-ce je ressens un tel plaisir, une telle nécessité à me replonger dans son univers ? J'imagine que c'est parce qu'il parle d'un monde où les rapports entre les gens sont à la fois intenses et énigmatiques. Je trouve, dans cet agencement excentrique de situations et de caractères, où le pourquoi des agissements humains ne saute pas aux yeux, une restitution de notre existence quotidienne, mais transposée, " théâtralisé " avec un magistral équilibre de tension et d'humour.
Pinter fuit tout simplisme et déterminisme en disant, avec raison dirais-je, que les relations humaines sont incroyablement et inexplicablement complexes et profondes, que les projections que nous faisons sur les autres, sur les objets, et même sur les mots sont source de stupéfaction, d'angoisse et de jubilation. Pourquoi notre monde crée-t-il de tant d'aspérités humaines. Comment percer le masque des comportements des hommes pour déceler, tant soit peu, les mécanismes et les rouages des êtres fascinants et dérisoires que nous sommes ? Harold Pinter ne nous donne pas, bien sûr, les réponses. Je crois que, tout en évitant les pourquoi, il nous offre des outils pour voir plus clair, sans sentimentalité et sans jugement, ceux sur lesquels nos regards ne s'attardent malheureusement pas assez.
Stuart Seide.
4, place du Général de Gaulle 59026 Lille