Dorante aime Angélique mais il n’ose se déclarer car elle est aristocrate et lui, quoique riche, n’est qu’un simple roturier. Comment celui-ci parviendra-t-il à ses fins pour séduire l’élue de son coeur ? Le Préjugé Vaincu, pièce en un acte, peu jouée, fut pourtant l’un des plus grands succès de Marivaux, tant critique que public. Classes sociales au XVIIIe ou condition féminine dans les années 50, il est toujours question de préjugés à faire tomber.
Marivaux a déjà abordé le thème du préjugé social aux prises avec l’amour dans Le Jeu de l’amour et du hasard. Dans cette oeuvre de Marivaux, ces préjugés sociaux ont la vie dure. À travers les siècles, le problème s’est déplacé, mais reste toujours aussi vivace et il y aura toujours des Angélique pour nous le rappeler…
Il n’en fallait pas plus à Jean-Luc Revol pour mettre en scène et en couleurs ces thématiques d’une grande modernité. Une toile de Magritte pour fond de scène, des costumes acidulés, une écriture intemporelle, une danse sensuelle et entraînante, quoi de mieux pour réveiller nos sens ! Marivaux sur un air de Mambo... Et pourquoi pas ?
Cette pièce révèle le simple plaisir de l’intemporalité de l’écriture marivaldienne, pour nous faire entendre une fois de plus la verdeur racée de cette langue qui nous parle encore aujourd’hui. Puisque le « challenge » était de monter un classique, il fallait qu’il nous parle et que des correspondances puissent se faire avec nos préoccupations actuelles.
Il y a tout ça chez Marivaux. Le théâtre de Marivaux s’accommode bien des transpositions. Si nous avons choisi les années 50, c’est que les thèmes développés dans la pièce ne sont pas loin des préoccupations de cette époque. D’ailleurs, au même moment, de jeunes réalisateurs, avides de faire leurs preuves derrière la caméra, créent un nouveau langage cinématographique.
En fin de compte, les années 50 représentent le passage à une nouvelle modernité et annoncent la libération de la femme et le vent de liberté des années 60. Angélique pourrait être de ces femmes-là, encore sous le joug familial et opposant déjà aux hommes une résistance. Les comédiens danseront le mambo, qui rythmera la pièce. C’est une danse sensuelle et entraînante qui laisse parler le corps. Une sorte de libération par le corps, mêlée d’érotisme.
Jean-Luc Revol
73, rue Mouffetard 75005 Paris