NOTE DE LAUTEUR
COMEDIE !
Toute comédie naît dune observation amusée du réel. Le réel des
" Chiens " est celui du couple, cette grande marmite dans laquelle
mijotent les mythes, les illusions, la chair, la tendresse, le désespoir, la colère, les
larmes, les rires, les secrets, tout un bouillon dont chacun se nourrit.
" LUI " est un certain style dhomme : Le style
" pharaon " qui se mure peu à peu dans le tombeau de sa vie
intérieure. Il réapparaît les jours de fête. La plupart du temps, il laisse sa momie
dans un fauteuil. Jolie momie, bien sûr, sinon on la balancerait. Mais il a tant
dhumour
Quoi quil touche de sa langue, il le transforme en rire.
Quil est difficile, avec lui, de garder son sérieux. De parler sérieusement.
Cest une anguille qui file loin.
" ELLE ", cest la bavarde, linitiatrice.
" Jai à te parler " est une phrase typiquement féminine. (Les
femmes vivent plus longtemps que les hommes parce quelles parlent, ce qui les
libère de problèmes qui rongent leurs compagnons muets. Le cancer de la prostate
nest rien dautre quune accumulation matérialisée de silences.)
Et ce soir-là, " ELLE " entre en guerre contre un adversaire fuyant
ce qui permet aux témoins-spectateurs de nombreux dérapages vers la bonne humeur.
LHISTOIRE
Un cabanon obscur. Dehors, nuit dorage. La porte souvre. Un couple entre,
ruisselant. Ils viennent là pour un week-end. " ELLE " aime ça, la
campagne. " LUI " se sacrifie. Il manque un match à la télé. Mais
il faut bien être gentil. Cest son tour. Drôle de tour. Il va sen souvenir.
Il faut toujours se méfier des petites douces qui tout à coup vous isolent dans la
nature. " ELLE ", fille moderne, à laise, des amis, des
sorties, un métier
et " LUI " qui résiste ! Cest
agaçant un homme qui ne veut pas faire les quatre volontés dune femme. Ce
quelle veut, elle le dit : plus dattention, plus damour, un enfant.
Rien que de très ordinaire. On la sent programmée par la Grande Nature.
" LUI " a son monde. Il lui suffit. Il atterrit de temps en temps
et senvole aussitôt.
Qui est le méchant ? Ni " ELLE ", ni
" LUI ". Impossible de prendre parti. Tous deux sont vrais, drôles,
heureux et malheureux. Monstrueux aussi chacun leur tour. Arrêt sur image.
" ELLE " et " LUI " : humains
On sait
ce que cela veut dire : Piégés
NOTES DE MISE EN SCENE
" Les chiens vivent avec leurs dieux "
Une comédie ?
Oui, bien sûr ! Les moments drôles ne manquent pas du début à la fin. Pourtant
derrière cette humeur, ces couleurs, se cache un drame. Celui de deux êtres qui
saiment mais ne se connaissent pas, ou croient se connaître, mais ne se comprennent
pas. Cette pièce est riche de renversements de situations. Pour les acteurs, elle leur
permet une multitude dactions et de réactions extérieures et intérieures, passant
dune émotion à une autre. Un texte contemporain demande un jeu vif, rythmé,
varié, naturel, posé par moment, prononcé à dautres, sans oublier lapport
dramatique. Il y a une forme comique, un ton plutôt ironique, voire sarcastique,
saupoudré de sérieux. Tous ces ingrédients permettent à la pièce de respirer. Comme
un cheval au galop qui sarrête de temps en temps pour voir où il en est, où il
est, et repartirait au trot. Les lumières donneront à lensemble de la pièce, par
les quelques " noirs ", la position du temps qui sécoule (une
nuit). Les halos de lumière, blancs ou colorés, soutiendront une émotion ou un moment
bien précis du texte, qui nécessite une attention particulière. Les bruitages
recréer une atmosphère à un moment choisi est capital (nuit dorage). Le tonnerre,
la pluie, bruits de portières, de voitures, voix-off
participent pleinement à
tenir le spectateur et son imagination en éveil (conscient ou inconscient), afin
quil ait limpression, même au chaud à lintérieur du théâtre, que
dehors il pleut et que lorage gronde. " On est mieux à
lintérieur ". La musique une toute petite plage est prévue. Juste
pour que le sens de louïe transmette et touche la sensibilité du spectateur, du
moins la stimule.
Une scène pas très grande ne peut être encombrée inutilement. Trop chargée, elle
détourne lattention du spectateur en parasitant le jeu de lacteur. Evoluer
avec aisance et naturel. Donc un décor simple, plutôt en bois. Une table, une chaise, un
fauteuil, des bûches, quelques livres, tissus et accessoires. Un théâtre, par le temps
et ses matériaux, possède une odeur, une chaleur. Quil soit de pierre, de bois,
récent, ancien, des odeurs naturelles ou artificielles donneront à latmosphère ce
petit goût familier. Lhistoire, le texte, les personnages, le décor, le bruit, les
lumières, les odeurs, le public
cet ensemble indissociable est le théâtre (du
moins, je le crois).
Stéphane ELIAS
Metteur en scène
Un homme, une femme, et des malentendus. Une nuit pluvieuse à la campagne où le silence se remplit par le son des illusions qui se brisent. Des moments de vérité, du "mal-être", mais aussi des rires de reconnaissance car leur histoire, celle dun couple en transmutation, cest aussi le notre. Ils doivent se déchirer pour saimer et saimer pour pouvoir se déchirer. Le tout raconté avec humour et tendresse, dun oeil expérimenté sur la vie et un coup de plume qui perce jusquau coeur de la communication entre homme et femme. A la fois cruelle et poignante, lhistoire de cette aventure périlleuse nous conduit par une véritable catharsis où les vides se remplissent et les abcès se percent pour nous convaincre finalement que même sans nos illusions lamour vaut la peine dêtre vécu.
Tama CARROLL
Collaboration artistique
26-28, rue de Meaux 75019 Paris