Margrét Sara Gudjónsdóttir compte parmi ces chorégraphes chercheuses, dont la curiosité repousse les limites de ce qu'on croyait savoir de la danse et ce qu'elle donne à éprouver. Sur une toile de fond sonore électronique, dans un bain lumineux constant – qu'il sera loisible d'interpréter tous deux comme singulièrement islandais –, les cinq interprètes de Conspiracy Ceremony-HYPERSONIC STATES s'avancent tour à tour sur le plateau, toutes de sobriété, sans rien pour l'envahir.
La pièce articule leurs cinq explorations solistes, qui les engagent dans ce que la chorégraphe nomme des Hyper États. Un travail de préparation, aussi intense que patient, leur fait éprouver des états de sensations extrêmes. Cela fraye dans des zones où fusionnent le physiologique et le psychologique. Pas de narration. Pas de personnages. Mais des présences tendues jusqu'à l'inouï, pour faire place à des corps intégralement émotionnels. La situation scénique en articule les résonances, à distance.
Quelque chose de suffocant, de vertigineux, émane de ce travail sourd des profondeurs, rendu à une palpitation cristalline. La vibration la plus intérieure découle en ondes dans l'espace entier. Rien ne procède par effusion expressionniste. Tout au contraire. Au comble d'une étourdissante audace minimaliste, cette danse se développe en involuant, en soustrayant, cristallisée dans les formes pures de coordinations cataleptiques.
Toutes les traversées imaginaires, toutes les méditations philosophiques, sont permises, quand une telle austérité de propos s'incarne en gestes proprement bouleversants, qui même s'autorisent des sursauts de transes incandescentes.
Musique : Peter Rehberg
1 rue Charles Garnier 93400 Saint-Ouen