Noé Soulier a conçu un spectacle pour regarder des œuvres d’art, non en déambulant dans les galeries d’un musée, mais depuis le siège d’un théâtre : les regarder être installées, dialoguer entre elles au fil d’une chorégraphie où les gestes et les œuvres s’interprètent mutuellement.
Alors que les rapports entre « arts de la scène » et « arts de l’exposition » ne cessent de se transformer, donnant lieu à de multiples formats où les corps envahissent les espaces muséaux, Noé Soulier s’est demandé comment déplacer l’équation : et si c’étaient les œuvres, et non les corps, qui se pliaient à un autre espace ? Si c’étaient les objets qui investissaient le cadre du spectacle vivant ? Faisant glisser le terme « performing arts » des « arts de la performance » à une « performance des arts », Noé Soulier confronte un choix d’œuvres issues des collections du Musée national d’art moderne Centre Pompidou aux contraintes spécifiques de la scène – à sa temporalité, à son appareil de vision.
Ce faisant, ce sont également les mouvements du musée, ceux de la manipulation des œuvres, qui changent de statut : au fil de ces gestes précautionneux, qui soulèvent, déplacent, agencent, l’exposition s’invente devant nos yeux comme un montage d’images, de durées, de matérialités, racontant une histoire de l’art parallèle.
Comme dans chacune de ses pièces, telles que Mouvement sur mouvement ou plus récemment Faits et gestes, Noé Soulier interroge ce qui fait danse. Cherchant à mettre en lumière le point d’indétermination du regard et de l’objet regardé, il expose ce qui arrive lorsque la visée d’un geste utilitaire est brouillée par son activation performative ; à la lisière, les œuvres et les gestes servant à les révéler performent ensemble.
Public sourd et malentendant : spectacle visuel naturellement accessible.
« Sur le plateau, une cimaise blanche sur laquelle six techniciens spécialisés – aucun danseur dans cette production ! – vont accrocher les peintures ou devant laquelle ils vont poser le mobilier. L’art est donc présenté, mis en scène, exhibé. A l’inverse des spectacles chorégraphiques qui se déroulent dans des musées, Noé Soulier entreprend, lui, de distinguer ce qu’on ne voit jamais lors de la mise en place d’une exposition : le ballet des régisseurs en train de les installer. » Rosita Boisseau, Le Monde, 13 septembre 2017
Place Georges Pompidou 75004 Paris