Il y a deux auteurs pour lesquels un metteur en scène ne trouve aucune difficulté à rassembler des comédiens, ce sont Racine et Tchekhov. L’un est universel, l’autre, patrimonial. Le défi est grand à cause de leur notoriété, et du nombre incalculable de représentations de leurs œuvres. Il est redoublé si on les joue dans des lieux improbables et inaccoutumés, mais il n’en est que plus jubilatoire.
Ici, il s’agit de Tchekhov et de Oncle Vania, ainsi que du Picolo : un café, un vrai, aux « puces », et aussi, en semaine, un théâtre, une scène, plus encore : la Datcha grise et bleue de Sonia Sérébriakov. Et les spectateurs indiscrets entrent dans cette demeure et sont témoins de ces destins qui refusent de s’accomplir, de ces passions étouffées et criantes, de cette étonnante simplicité qui dévoile l’humain dans sa plus grande nudité.
La modernité de Vania est impérissable, tant le moteur des hommes est de chercher, toujours, inlassablement, autre chose, ce qu’ils ne peuvent atteindre. Ici, le moteur est désamorcé, c’est la panne, et on perd par abandon.
On clame partout que, finalement, Tchekhov est hilarant et lui-même prétendait que ses grandes pièces étaient des comédies : voyons y une belle élégance pudique, c’est vrai qu’on n’en meure pas, et si le désespoir de Vania et de Sonia peuvent faire sourire c’est que le spectateur ne manque pas d’humour. Cette aventure se passe au Picolo, elle reprend en automne et votre présence, pour partager cet orage, nous fera le plus grand plaisir.
Joséphine Déchenaud
58, rue Jules Vallès - dans le marché aux puces 93400 Saint-Ouen