Chaque spectacle de Raimund Hoghe repose sur un fil ténu : une inflexion, une mélodie, à laquelle il va donner, sur scène, toute l’épaisseur labyrinthique de la mémoire.
Comme dans L’Après-midi ou Swan Lake, 4 Acts, c’est souvent une musique appartenant à l’imaginaire collectif qu’il charge d’affects – la laissant infuser les corps, agir et se diffuser dans un espace propice aux associations. Après Boléro Variations, qui rayonnait autour du Boléro de Ravel, jouant avec des reprises, passant d’un style de danse à un autre, Raimund Hoghe s’est intéressé à une autre œuvre de Maurice Ravel : La Valse. Autour de cette cadence à trois temps qui a fait chavirer tant de couples, Ravel a composé un concentré de valses comme « un tourbillon fantastique auquel personne ne peut se soustraire ».
Commandée pour les ballets russes par Serge Diaghilev, qui l’a ensuite refusée, La Valse de Ravel transporte l’héritage des valses viennoises et leurs images de bals, en même temps que les échos plein de bruit et de fureur de la Première Guerre mondiale. Dans cette partition traversée de dissonances, où des motifs stridents menacent de désarticuler la mesure, se laissent entrevoir des corps qui tournent jusqu’au vertige, au bord de l’abîme.
Accompagné par le pianiste Guy Vandromme, avec lequel il avait déjà collaboré pour Sacre – The Rite of Spring, Raimund Hoghe s’appuie sur les tons, les couleurs, les ambiances portées par deux versions de La Valse – celle pour piano, jouée live, et celle pour orchestre. Sur scène avec sa troupe d’interprètes familiers, il nous invite à suivre la cadence, 1, 2, 3-1, 2, 3, pour une dérive avec des airs et des danses – comme autant de réminiscences se faufilant dans les creux de l’Histoire jusqu’au présent.
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