En marge de la progammation du spectacle au Kremlin-Bicêtre, des lectures gratuites de textes de l'auteurs seront donnés. Plus d'informations sur le site du théâtre.
Miss Fozzard & Mrs Horrocks ; petits soldats du quotidien – pas un faux pas, pas un faux pli – tiennent haut et ferme le pavillon britannique. Classiques en somme ! Mais est-ce ça la vie ? Un éternel lundi ? Alors pour rompre l’ennui l’une comme l’autre cultivent leur brin de fantaisie : l’amour des chaussures et les visites conséquentes chez le pédicure pour Miss Fozzard, passion du jardinage pour Mrs Horrocks. L’inattendu va s’engouffrer dans ce brin de fantaisie pour les entraîner loin de la norme implicite qui régit leur milieu, avec un drôle de petit air dans la tête : « Et si une autre vie était possible ? »
Et voilà comment l’une va découvrir les joies d’une certaine forme d’aérobic avec son nouveau pédicure et l’autre se lier d’une véritable et profonde amitié avec une voisine qui vient d’assassiner son mari.
Aux armes mitoyennes semble nous susurrer Alan Bennett, développer votre originalité même la plus infime, il se pourrait bien qu’un vent nouveau s’engouffre et vous entraîne vers des sensations nouvelles et pleines.
Alan Bennett ou l’art du cadrage-débordement.
« Les deux textes, signés Alan Bennett, qui brillent d’un humour pur British, ne se rencontrent jamais. Mais côte à côte, ils forment un ensemble réjouissant. » Gérald Rossi, L'Humanité.fr, 16 juillet 2016
Miss Fozzard partage sa vie pavillonnaire entre son emploi de vendeuse au rayon blanc d’un grand magasin, son frère, Bernard, paralysé après une attaque cérébrale et ses soins auprès de son nouveau pédicure : Mr Dunderdale. Entre cet adepte des pieds et des chaussures qui les enchâssent, l’emploi d’une nouvelle aide à domicile - une jeune australienne auprès de qui Bernard recouvre ses facultés - ses échanges avec ses collègues vendeuses , Miss Fozzard survit. Mais le tour inattendu pris par les soins podologiques, la soudaine rechute de Bernard suite au départ précipité de l’aide à domicile australienne, les remarques égrillardes de ses collègues vendeuses sur ce « je ne sais quoi » dû à la fréquentation de Mr Dunderdale, vont amener Miss Fozzard à une curieuse constatation : « Les gens n’aiment pas quand on a une vie à soi... C’est drôle je n’avais jamais pensé que j’avais une vie. »
Alors entre désir et contingentement Miss Fozzard tente de se frayer un chemin.
« Quand le pauvre juge a annoncé deux ans ferme, il s’est fait huer de tous les côtés. Comme dit Sheila Blanchard : « Une affaire en or, oui. Deux années à tresser du rotin et avoir un lit pour soi toute seule. On aimerait avoir un revolver. Moi, le mien, j’ai mis mes derniers espoirs dans sa prostate. »
Mrs Horrock, est entrainée par sa voisine sur le lieu d’un crime – celui de son mari. Elle avoue l’avoir commis. Ce dernier se livrait sur elle avec d’autres à maints jeux érotiques. Qui étaient - ils ? Des amis, des collègues ? Les yeux toujours bandés, elle l’ignore. Tout au plus, l’un d’eux sifflotait lors de ses travaux pratiques. Jeanne est jugée. Au vu des violences relevées sur son corps ; une laisse, un collier exhibés ; sa peine est fixée à 2 ans de prison. Rosemary émue par le sort de sa voisine met un point d’honneur à prendre soin du jardin du pavillon désormais vide avec la bénédiction de son mari désireux de vendre le leur au meilleur prix.
La retraite arrivant, il voudrait s’installer à Marbella, fouler le même green que son idole : Sean Connery. Marbella ou pas, Rosemary, elle, rend visite en cachette à Jeanne. Sa nouvelle et unique amie. Mais celle-ci meurt d’un cancer foudroyant. Rosemary déménage à Marbella où rien ne pousse, sauf l’herbe du green et « pas mal de loustics qui n’ont pas tellement intérêt à rentrer dans leur pays », qui, au contraire de Jeanne, « n’ont pas payé » eux. Son mari a déjà croisé Sean Connery. Chaque matin, casquette à l’envers, il se rend au golf en sifflotant...
Talking Heads & Talking Heads II 1 est une série de 10 portraits de personnages de la middle-class de Leeds et sa banlieue écrite par Alan Bennett pour la BBC. Nous avons choisi Femme avec pédicure et Nuits dans les jardins d’Espagne extraits de Talking Heads II pour la version spectacle et deux autres Un lit parmi les lentilles & Une femme de lettres pour la version lecture 2 . Les présenter de manière enlacée et non autonome (toute l’une puis toute l’autre) est l’affirmation d’une proximité malgré leurs différences (Laurel et Hardy). Nous cheminons avec elles.
A peine l’une clôt un chapitre et nous voilà plongés dans les émois de l’autre. Et lorsque nous retrouvons la première nous comprenons que du temps a passé, tout occupés que nous étions à partager un nouvel épisode des aventures de la seconde. Ici le fondu au noir télévisuel – signe de la course invisible du temps – est pris en charge par le récit de l’autre. Et par delà ce procédé qui les unit malgré leur différence, nous exprimons une communauté de destin.
Que faire quand le quotidien est bouleversé à la faveur de l’irruption de l’inattendu favorisée par ce brin de fantaisie qu’elles cultivent (l’amour des chaussures pour la première, le jardinage pour la seconde) ? C’est là que la petite musique d’Alan Bennett se fait entendre.
2, place Victor Hugo 94270 Le Kremlin-Bicêtre
Voiture : partir de la porte d'Italie, prendre la RN7 en direction de Villejuif. A la hauteur de la station de métro tourner à droite, avenue Eugène Thomas puis au 1er feu à gauche rue Jean Monnet.