Tout ceci (n’)est (pas)vrai

du 4 au 11 avril 2009

Tout ceci (n’)est (pas)vrai

Le faux est conjugué ici à tous les temps de la danse. Révéler l’impact de l’inventé dans le processus de création, mettre en lumière l’interaction permanente à l’oeuvre entre réel et fiction, tels sont les partis pris de l’ami Baë, parfait grain de sable dans une mécanique du rire trop bien huilée.

Et si tout ceci était faux ?
Pourquoi une recréation de Tout ceci (n’)est (pas) vrai ?
L’argument
La danse de santé
Dora Valès

  • Et si tout ceci était faux ?

On aimerait, pour introduire Thierry Baë, faire sonner la langue en exclamations joyeuses et sonores. Quelque chose comme « Sacré lascar ce Baë ! » ou « Mais qui diable est ce Thierry ? ». Pourtant ce serait peine perdue : Thierry Baë, danseur et chorégraphe de son état, ne se raconte pas. Il faut le vivre en scène, jouer avec ses doubles comme dans Journal d’inquiétude, ou son image, comme dans Thierry Baë a disparu.

Passé par les Beaux-Arts de Reims, élève de Marcel Marceau puis assistant d’Étienne Decroux, deux maîtres du mime, Baë fut également un interprète d’exception auprès de Catherine Diverrès puis de Josef Nadj. Mais dans ce Thierry Baë danseur se cachait déjà un chorégraphe qui crée Sans arrêt en 1985 et La Source dix ans plus tard. Musicien, adepte de taï-chi-chuan qu’il enseigne, Thierry Baë vit aujourd’hui une seconde carrière féconde. Il interroge son corps, qui forcément vieillit, ses déceptions et ses envies.

Pour ce premier passage à Chaillot, Baë va encore surprendre. Tout ceci (n’)est (pas) vrai donne le ton d’un spectacle où Thierry Baë retrouve, via l’image, Denis Robert, journaliste politique ou Laurence Louppe, historienne de la danse. Remontant son histoire, Thierry Baë s’invente par la même occasion des ancêtres comme Jules Amédée, adepte de la danse de santé, convoque une ancienne gloire oubliée Dora Valès, disciple d’Isadora Duncan, et autres surprises.

On l’aura compris, le faux est conjugué ici à tous les temps de la danse. Révéler l’impact de l’inventé dans le processus de création, mettre en lumière l’interaction permanente à l’œuvre entre réel et fiction, tels sont les partis pris de l’ami Baë, parfait grain de sable dans une mécanique du rire trop bien huilée.

Philippe Noisette

Vidéo François Lejault
Musique Benoît Delbecq
Participants aux films : Geneviève Baë, Marion Baë, Thierry Baë, Yves Blanc, Jean-Michel Chomet, Laurence Louppe, Denis Robert, Barbara Sarreau.

  • Pourquoi une recréation de Tout ceci (n’)est (pas) vrai ?

Journal ournal d’inquiétude et Thierry Baë a disparu se présentent comme un diptyque, mais trouvent leur origine dans la pièce précédente Tout ceci (n’)est (pas) vrai*. A tel point que - hormis le sujet narratif – il s’agit d’un « triptyque ». L’utilisation du faux et du mensonge sont à distinguer de la fiction. Plutôt qu’à une fiction, c’est à une réalité autre, décalée, crédible – mais douteuse – que j’assimile ce travail.

Face à une fiction, je peux me dire : « j’adhère à l’histoire, mais ce n’est pas vrai. » Donc je la range dans un tiroir, pas loin de l’oubli - en tout cas, sans résonance avec ma vie. A cet entre-deux (vrai-faux), le doute crée une disposition du regard qui devient réellement empirique : je doute donc j’expérimente, je vérifie. Le doute est une expérience qui ne se satisfait pas d’elle-même : elle poursuit l’expérience, c’est un « état d’être » plus que « de faire ».

Le sujet concret serait l’émergence maquillée, refaite, rejouée (c’est-à-dire pas entièrement vraie) des fondements de la création : comment se construit et se déconstruit la danse ? De quoi se nourrit la danse ?

L’histoire (les figures historiques), les pratiques (la santé et la conscience du corps), l’énergie (l’énergie dépensée sur un plateau comme un visage de générosité) et les concepts (ce qui contraint mais aussi ce qui « dessine » le projet, l’oriente) nourrissent la danse.

Tout ceci (n’)est (pas) vrai traite des articulations entre :
- La pratique : danse de santé de Jules Amédée Baë.
- La figure historique : Dora Valès. « Chaque artiste s’invente ses propres ancêtres ».
- Le concept : conscience du temps présent. Sait-on être conscient du temps présent ?
- Les archétypes ou stéréotypes de la danse : espace, temps, rythme, juste équilibre avec la gravité, etc.
… sans oublier l’humour qui aide à douter.

Thierry Baë

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  • L’argument

« Nous savons tous que l’art n’est pas la vérité. L’art est un mensonge qui nous fait comprendre la vérité. » Pablo Picasso.

Poursuivant mon questionnement sur le faux dans l’art, sur les mensonges et les illusions nécessaires à la construction de l’objet artistique, je souhaite, à travers ce projet :
> Révéler l’impact du faux dans le processus de création :
- Questionner la théâtralité de et dans la danse.
- Développer les questions de l’interprétation et de la représentation dans et hors de ses cadres conventionnels.
- Creuser la question du langage chorégraphique.
- Découdre la trame spectaculaire et dévoiler les « ficelles » cachées.

> Mettre en lumière l’interaction permanente qui est à l’œuvre entre le réel et la fiction.
Si la part de réel cautionne, accrédite la fiction, l’intervention de la fiction singularise et gratifie le réel. Rendre ainsi hommage à cette alchimie qui, reposant sur des illusions, des mensonges, atteint une forme de vérité.

Il s’agit pour moi de troubler le regard du spectateur de telle sorte qu’il ne sache plus discerner le vrai du faux et, qu’habité de ce doute, il remette en question, sur d’autres plans (politique, social ou spirituel), le fondement et la fiabilité de ses propres certitudes. La forme spectaculaire qui vous sera présentée est le fruit de cette réflexion.

Durant la pièce, vous assisterez à la reconstitution d’une danse de santé datant du XIXème siècle, ainsi qu’à un hommage rendu à la danseuse Dora Valès (années 20). Entre temps, vous serez les témoins d’un processus de création chorégraphique : les danseurs improviseront et composeront sous vos yeux.

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  • La danse de santé

Lors d’un décès, j’ai découvert au milieu de documents familiaux (arbre généalogique, actes notariaux, lettres…) un manuscrit datant du XIXème siècle. Rédigé par un aïeul, « masseur » de profession, l’ouvrage développe une méthode corporelle dont il fut lui-même le créateur.

Ce texte, ainsi que quelques lettres, décrivent, croquis à l’appui, une suite de mouvements désignée comme – je cite – « une danse à exécuter dans le silence, sans l’accompagnement d’aucun son ni musique » (Jules-Amédée Baë). Plus loin sont précisés les bénéfices sur la santé de cette méthode, bénéfices principalement d’ordre articulaire. En outre, elle permettrait aussi de « déployer les poumons », « d’étirer les reins », de « calmer le foie », et « d’apaiser le cœur ».

D’après les lettres, cette méthode fut imprimée à quelques exemplaires qui étaient proposés à la lecture dans son cabinet de massage. Il n’en reste, hélas, que quelques éléments manuscrits.

Démarche de création :
- création d’un documentaire réunissant l’étude du manuscrit familial et les témoignages concernant la danse de santé ;
- proposition d’écriture chorégraphique autour de cette méthode de santé, s’appuyant notamment sur des matériaux issus de la tradition martiale chinoise.

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  • Dora Valès

D’origine juive, Dora Weiss, dite Valès, est née en 1903 en Alsace (Col de la Petite Pierre) d’une famille d’artistes et d’intellectuels. Elle voyagea beaucoup, aussi est-il difficile de reconstituer aujourd’hui l’itinéraire exact de cette danseuse exceptionnelle et méconnue.

Isadora Duncan fut, pour elle, une révélation. Dès 1917, elle commença à étudier la danse au sein de l’Akademia, école de Raymond Duncan à Paris. Elle poursuivit ses études en danse à l’école de Rudolf Laban à Berlin, puis émigra aux Etats-Unis pour intégrer la Denishawn School à Los Angeles. A son retour en Europe, en 1922, elle fut invitée à l’école d’Isadora à Moscou où elle créa un duo avec Irma Duncan. Selon Laurence Louppe, elle travailla par la suite avec Véra Skoronel en Allemagne. C’est à partir de 1925 qu’elle enseigna au Bauhaus de Dessau.

Suite à des problèmes articulaires au début des années 30, il semble qu‘elle ait fait appel à Valentin Baë (petit-fils de Jules-Amédée Baë) afin de remédier à ses douleurs. Nourrie de cette expérience, elle s’orienta vers la pratique du yoga. Sa trace est ensuite perdue jusque dans les années 50, en Californie, où il est vraisemblable qu’elle se soit installée comme professeur de yoga.

Dora Valès, femme extrêmement cultivée, fut une personnalité à part. Elle dansait parfois en silence, aussi, Fernand Rivoire, dans Découvertes sur la Danse en 1924, disait d’elle : « elle porte sur le front la griffe de la possession du génie mystique ».

Démarche de création :
- reconstitution de l’univers de Dora Valès et hommage des danseurs à partir des notes d’ateliers et du document filmé ;
- approche de la danse dans sa dimension historique : étude de l’impact des danses pionnières sur leurs premiers spectateurs.

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Spectacle terminé depuis le samedi 11 avril 2009

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