Et Lux, c’est la rencontre entre musique ancienne et contemporaine, entre les cordes vocales et les cordes frottées, entre la liturgie romaine du Requiem et l’expressivité exacerbée de notre temps.
Wolfgang Rihm prélève des mots et des expressions dans le texte latin sans jamais les laisser « intacts cependant, ni dans l’ordre liturgique correct. Ils surgissent plutôt comme les éléments constitutifs d’un tout qui – comme dans une anamnèse – sera remémoré progressivement ».
Le texte est découpé, remâché, comme éprouvé par la répétition, avec « tout à fait au centre, le Et lux perpetua luceat », centre vers lequel on s’avance mais qui se dérobe toujours. Rihm, qui se dit « doué pour la mystique », construit ici une liturgie imaginaire. « À travers une réflexion circulaire, les couches à la fois consolatrices et profondément inquiétantes de ces paroles deviendront peut-être sensibles ».
La notion de lumière semble prendre la place de celle de Dieu – pas de Credo, trois mots de l’Offertoire ayant trait à la nuit infernale, deux fragments du Dies irae (« jour de larmes où la poussière renaît » et « homme accusé »), mais déplacés vers la fin de l’œuvre.
C’est une théologie musicale opposant un monde obscur, oppressant, où l’homme reste impuissant, et la rencontre de Dieu à travers l’illumination. Dans ce va-et-vient perpétuel entre consonance et dissonance, les chanteurs vont du chant lisse à un « anti-chant » strangulé, et ils sont comme tourmentés, parfois cinglés par le quatuor, la voix de l’intériorité, pour composer l’arche immense de l’inquiétude.
Et Lux, version 2015 pour huit voix et quatuor à cordes.
Par l'Ensemble Huelgas et Minguet Quartet.
Place du Jour 75001 Paris