Yesterday Tomorrow

Avec le corps, le texte, les technologies, le virtuel, en collectif ou en solo, de jeunes auteurs et performers américains investissent de nouveaux champs d’expérimentation. En écho aux performers des années 60, sans en être des copies conformes, ils agitent la scène. Annie Dorsen la livre à l’aléatoire.

Yesterday Tomorrow est une sorte de comédie musicale qui, comme tous les classiques de Broadway, s’achemine vers une résolution prévisible et joyeuse et se conclut sur un happy end à l’optimisme triomphant. Mais plutôt que de suivre les règles du genre, Annie Dorsen propose à ses spectateurs chaque soir un concert inédit, produit par un algorithme, qui commence par le tube Yesterday des Beatles et s’achève sur Tomorrow, la célèbre chanson de la comédie musicale Annie.

Tandis que la première déplore la perte d’un passé heureux, la seconde veut croire en des lendemains radieux.

Cet algorithme est initialement inspiré des algorithmes évolutionnistes, qui mettent en œuvre les principes de la théorie de la sélection naturelle de Darwin et de la génétique mendélienne, et détermine chaque soir de manière différente comment quitter Yesterday pour arriver à Tomorrow.

Sur scène, ce sont trois chanteurs qui exécutent cette partition sonore et visuelle, écrite en temps réel par un programme informatique et soumise à des variations qui affectent le rythme, la tonalité, les paroles et les timbres des chansons originales. Depuis Hello Hi There, performance où elle faisait dialoguer deux ordinateurs, Annie Dorsen explore un théâtre produit et performé par une intelligence artificielle. Dans cet opus réalisé avec la complicité de Greg Beller de l’IRCAM et de Pierre Godard, elle s’attaque au chant, art par excellence de l’expressivité humaine, et produit une rencontre troublante entre humains et machines. Une manière de nous interroger avec intelligence, humour et sensibilité sur notre présent.