Copi : l'homme, l'acteur, l'auteur
Bibliographie
Un pas très près du sol, l'effleurant presque de ses chaussures ; un corps agile des vêtements flottants ; un sourire au coin des lèvres aussi chargé d'amitié que d'ironie ; un esprit rapide et une élocution lente et rythmée ; une intelligence lucide et désarmante ; un regard surprenant d'attention ; un rire franc et sonore, scandé souvent de bouffées de fumée ; la voix grattant la gorge d'un grave inattendu et mystérieux, et tout à coup, des phrases entières presque chantées ; des ailes invisibles qui donnent à la démarche une somptueuse fluidité ; une fragilité du corps dans une superbe charpente intellectuelle, tel m'est toujours apparu cet être attachant, brillant, pudique, infiniment discret, rieur et virevoltant qui s'appelait Copi.
Rien de plus réjouissant pour moi que de mettre en scène Copi dans ses pièces. Voilà un auteur qui oublie sa condition d'auteur et qui se livre au jeu. Sans arrière-pensées et dans le plaisir pur de ses propres gestes, dans le plaisir majeur d'être "quelque chose" d'autre que soi-même ; avec cette spontanéité et cette fraîcheur que l'on invoque lorsqu'on veut absolument, opiniâtrement, réussir un réussite, comme pour maîtriser un vélo trop petit ou trop grand pour ses jambes !
Dans un jeu, on peut tout essayer sans conséquences pénibles pour l'esprit : il faut seulement recommencer si l'on souhaite atteindre son but. Sans états d'âme ni regrets, sans angoisses ni frustrations mais, sûr de vouloir y arriver, guidé par ce sentiment incomparable qui s'appelle le plaisir ; cette volupté d'être quelqu'un d'autre par le costume, le maquillage, les postiches, les parures ou les simples gestes, ne tenait en somme à aucune ambition professionnelle. Paradoxal et rare, il pouvait ainsi "faire l'acteur" sans se sentir Acteur ; tremper dans son oeuvre, sans se sentir contraint par son texte et ses propos. Paradoxe suprême de l'artiste !
Copi, un auteur ? je dirais un écrivain qui dessine avec les mots un dessin labyrinthique et touffu, mais cohérent dans son apparent chaos. Un écrivain de théâtre né : exemplaire dans l'économie de son discours, dans l'utilisation de sa charge expressive refusant tout anecdotisme et débordant de foules d'histoires entrecroisées. Si son théâtre se lit comme un conte et s'interprète comme un romancier pourrait le faire, ses romans sont aussi des contes modernes. Aussi complexes et aussi inattendus l'un et l'autre que les meilleurs films muets, que les grands burlesques de l'ancien temps, qui ne définissaient jamais leurs frontières et qui embrassaient le réel dans ce que le réel a d'inexplicable et de fantastique.
Roman théâtral, roman romanesque, tout prend chez Copi les raccourcis les plus inattendus. On ne peut emprunter ces chemins merveilleusement décalés, les essayer, les apprivoiser, qu'après avoir fait le tour de l'espérance, de l'ambition énormes mais toujours "pudiques" de son propos. Et cette pudeur, suprême politesse, passe par les plus grandes extravagances, les plus belles folies, mais dans la plus subtile sensibilité, la plus éblouissante intelligence du monde et des hommes. Théâtre-théâtre, théâtre théâtral.
Jorge Lavelli in Copi
Ed Christian Bourgeois, 1990
De son vrai nom Raul Damonte Botana, Copi est né en 1939 à Buenos Aires. Il arrive à Paris en 1963 ; à partir de 1964, il met en scène dans le Nouvel Observateur la célèbre Femme assise dont le dialogue troué de silences avec un poulet, un escargot ou ce rat qui deviendra l'animal emblématique de toute son œuvre inaugure un théâtre minimal : à travers le dessin humoristique, Copi s'affirme d'emblée comme dramaturge.
Après Sainte Geneviève dans sa baignoire, sketch qu'il interprète lui-même au Centre américain, sa première pièce, La Journée d'une rêveuse (1967), mise en scène par Lavelli, a pu évoquer, par sa liberté d'invention et sa fantaisie verbale, le "théâtre de l'absurde" des années 50 ; c'est avec Eva Peron (1969), L'Homosexuel ou la difficulté de s'exprimer (1971), Les Quatre Jumelles (1973), que Copi aborde le thème, récurrent dans toute son œuvre, de la confusion, de l'inversion et de l'échange des sexes. (...)
Cet univers peuplé de travestis mythologiques, hanté par la marginalité et la transgression sous toutes ses formes, n'est pas comme celui de Genet sublimé, sacralisé ou tragifié par la transcendance d'une forme lyrique ou baroque. Metteur en scène du fait divers, Copi puise délibérément dans les stéréotypes des genres considérés comme "mineurs" (feuilleton, roman policier, science-fiction de série B), pour les truquer avec une feinte naïveté, et tirer de leur juxtaposition et de leur accumulation des effets de dérision ; de même, une grande part de son humour naît de la désinvolture avec laquelle il manie une langue minimale, familière, mais légèrement décalée, qu'il traite à la manière d'un idiome étranger, comme s'il n'était, ainsi qu'il l'affirme dans le prologue de La Cité des rats, que l'approximatif traducteur du "langage des rats".
Copi est mort du sida le 14 décembre 1987.
Alain Satgé
Extraits de Une biographie de Copi
Albums de dessins
1965 Humour secret
1966 Les poulets n'ont pas de chaise
1973 Le dernier salon où l'on cause
1975 Et moi, pourquoi j'ai pas une banane ?
1977 Les Vieilles Putes
1979 Du côté des violés
1981 La Femme assise
1984 Sale crise pour les putes
1986 Le Monde fantastique des gays
1962 Un Angel para la Senora Lisca
1966 Sainte Geneviève dans sa baignoire, L'Alligator, Le Thé
1968 La Journée d'une rêveuse
1969 Eva Perón
1971 L'Homosexuel ou la difficulté de s'exprimer
1973 Les Quatre Jumelles
1974 Loretta Strong
1975 La Pyramide
1975 La Coupe du monde
1978 L'Ombre de Venceslao
1981 La Tour de la Défense
1983 Le Frigo
1984 La Femme assise
1985 La Nuit de Madame Lucienne
1986 Les Escaliers du Sacré-Cœur
1988 Une visite inopportune
1993 Cachafaz
Romans
1973 L'Uruguayen, Ch. Bourgois
1977 Le Bal des folles, Ch. Bourgois
1979 La Cité des rats, Belfond
1979 La vie est un tango, Hallier
1982 La Guerre des pédés, Albin Michel
1988 L'Internationale argentine, Belfond
Nouvelles
1978 Une langouste pour deux, Ch. Bourgois
1983 Virginia Woolf a encore frappé, Persona
Conte illustré
1970 Un libro bianco, Milano Libri Edizioni
Cet(te) artiste n'est pas lié(e) en ce moment à un spectacle.
Cartoucherie - Théâtre de l'Epée de Bois, Paris
A mi-chemin entre théâtre de boulevard et fable apocalyptique, le récit d’une humanité laissée pour compte, livrée à ses propres instincts de violence.
Théâtre du Rond-Point, Paris
Théâtre Darius Milhaud, Paris
« Même ma mort, même la mise en scène de ma mort, j'ai dû la faire toute seule. Seule. » A partir de 12 ans.
Théâtre Darius Milhaud, Paris
Comment la journée de L. va être bouleversée par l’apparition dans son salon d’un mystérieux réfrigérateur ? A partir de 16 ans.
Malakoff scène nationale – Théâtre 71, Malakoff
Théâtre de la Cité Internationale, Paris
L’Homosexuel… n’est pas à proprement parler une pièce sur la « condition homosexuelle », ni même peut-être sur l’homosexualité. Elle s’intéresse plutôt à ce qu’il y a d’inexprimable dans tout corps, toute identité, et met en scène la difficulté, voire l’incapacité du langage à dire exactement ce que l’on est.
Théâtre de Gennevilliers (T2G), Gennevilliers
L’Homosexuel… n’est pas à proprement parler une pièce sur la « condition homosexuelle », ni même peut-être sur l’homosexualité. Elle s’intéresse plutôt à ce qu’il y a d’inexprimable dans tout corps, toute identité, et met en scène la difficulté, voire l’incapacité du langage à dire exactement ce que l’on est.
Théâtre Silvia Monfort, Paris
Théâtre La Flèche, Paris
Théâtre La Flèche, Paris