Coup de cœur MUSIQUE & DANSE Le 5 août 2015
Que sont les œuvres de Jeremy Deller ? Avant tout des idées, des fulgurances. L’une de ses premières installations s’appelle Open Bedroom à l’époque, Deller, qui a 27 ans, habite encore chez ses parents et c’est ce qu’il décide de montrer. Pendant les vacances de sa famille, il transforme l’appartement en expo : sa chambre d’ado attardé devient le clou du spectacle… Depuis, on l’a vu recréer sur le mode épique la lutte des mineurs de 1984 avec plus d’un millier de figurants, célébrer l’art brut britannique en rassemblant les objets les plus incongrus (y compris slips brodés au point de croix et sculptures en légumes), ou associer avec évidence les papiers peints Art-déco de William Morris et les sérigraphies d’Andy Warhol. Bien sûr, il n’expose plus dans sa chambre mais à la Tate Gallery ou à la Biennale de Venise… En 2004, il reçoit même, consécration, le Turner Prize.
“Brass” : le mot désigne le cuivre et les instruments qui en sont faits, mais, dans un argot populaire, cela signifie aussi “culot”, “impertinence”, “toupet”. Et du toupet, il en fallait pour proposer à l’une des plus respectables fanfares du pays d’interpréter les grands succès de l’acid-house de la fin des années 1980. Deller voit pourtant un lien évident entre “deux formes d’art populaire profondément ancrées dans des communautés du nord du pays”.
D’un côté, les fanfares d’usine, reliquats des conglomérats industriels, de l’autre, l’acid-house, issue des quartiers de Detroit ou de Chicago, et que Thatcher va populariser malgré elle : puisque les clubs doivent fermer à 2 heures du matin, la rave se poursuivra clandestinement ailleurs… dans des usines désaffectées.
Reste à faire passer la pilule… “J’étais terrifié à l’idée d’appeler le directeur du Fairey Band, raconte Deller. Je pensais qu’il faudrait beaucoup d’explications et de persuasion – mais il a accepté tout de suite.” L’intuition était juste… au-delà de toute espérance. Percutant, vivant, dansant, le résultat réunit le public âgé des kiosques à musique et les clubbers, les amateurs de marches militaires, les ados, les familles. En 2005, la fanfare fait un malheur à Londres devant 25 000 personnes.
Depuis, Acid Brass a trouvé le succès partout dans le monde… C’est cette énergie incroyable que nous retrouverons à Paris, soirée prolongée dans la nuit par la présence de Dave Haslam. Acteur et témoin de la grande époque de l’acid-house (450 sets à l’Haçienda de Manchester, excusez du peu !), critique musical pour le NME ou le Guardian et avant tout DJ, cet invité exceptionnel viendra mettre le feu aux platines. Prévoyez de rentrer tard.
Feat. Erik Rug & Jerry Bouthier (JBAG, Continental, Kitsuné).
211, avenue Jean Jaurès 75019 Paris