Hélas, contrairement à ce que l’on prétend, les amoureux ne sont pas seuls au monde. Si Amadigi et Oriana n’étaient pas si désirables, peut-être pourraient-ils s’aimer à loisir. Mais, malheur à eux, ils vont déchaîner les ardeurs d’un puissant prince et d’une sublime sorcière…
Vengeances, complots, combats singuliers, ténébreux esprits et « fontaine de l’amour véritable », l’opéra de Haendel déchaîne les forces les plus passionnelles, et fait jaillir les plus déchirantes incantations. « Le grand nombre de situations fortes, voire extrêmes, contenues dans cet opéra élimine les instants décoratifs au profit d’une tension constante », indique le directeur musical Jérôme Correas.
Expert éclairé des œuvres lyriques des XVIIe et XVIIIe siècle, le chef des Paladins rencontre pour la première fois le metteur en scène Bernard Levy, bien connu des spectateurs de l’Athénée. Après avoir touché aux splendeurs du baroque dans Didon et Énée, ce dernier trouve ici l’occasion de « réinterpréter les codes de l’opéra de magie pour les mettre au service d’une esthétique contemporaine très épurée, sans perdre la féérie propre à cette histoire. »
Une histoire d’amour, qui est aussi « un opéra de la jalousie, traversé par la souffrance que ressentent les bourreaux, tout comme leurs victimes. »
Considéré comme l’un des plus beaux opéras de Haendel, c’est aussi l’un des plus rarement mis en scène au théâtre. Œuvre emblématique du genre des « spectacles à machine » cher au XVIIe siècle, le livret semble en effet impossible à monter tant il s’empare de codes et de situations baroques à l’extrême : métamorphoses, sortilèges, envoûtements, tempêtes, démons et furies, rien ne sera de trop pour briser l’union du héros Amadigi et de la princesse Oriana.
Bernard Lévy, metteur en scène rompu aux exigences de la forme baroque (Didon et Enée) et Jérôme Corréas, directeur musical des Paladins et expert éclairé des œuvres lyriques des XVIIe et XVIIIe siècles, conjuguent ici leur talent afin de « réinterpréter les codes de l’opéra de magie pour les mettre au service d’une esthétique contemporaine très épurée, sans perdre la féérie propre à cette histoire.
Malgré la splendeur de la partition musicale, Amadigi de Haendel est un opéra rarement mis en scène. Il est vrai qu’à la première lecture le livret semble impossible à représenter : envoûtements, sortilèges, changements magiques de lieux, monstres surgissant du sol, tonnerre, éclairs… Bref, cette oeuvre apparaît comme une forme poussée à l’extrême du spectacle à machines si cher au XVIIe siècle et précurseur des premières formes opératiques.
Vouloir mettre en scène Amadigi constitue donc un défi. Et le défi semble encore plus grand si l’on veut proposer un univers scénique et esthétique qui s’éloigne du style baroque et de la machinerie théâtrale qui lui est associée. C’est la nature de l’histoire d’amour qui nous est racontée qui doit, me semble-t-il, nous servir de guide. En effet, même si le récit relève des codes propres à la pastorale, caractéristiques d’un genre et d’une époque, il raconte une histoire d’amour mythique. Il s’agirait alors de réinterpréter les didascalies propres à l’opéra de magie pour les mettre au service d’une esthétique contemporaine très épurée.
Une esthétique qui, sans perdre la féérie propre à cette histoire, permettra de mettre en lumière la nature mythique de l’amour qui unit Amadigi et Oriana. En mettant en scène Amadigi, je me réjouis de poursuivre la recherche scénique que j’ai entamée avec Didon et Énée de Purcell : mettre la forme baroque à l’épreuve d’une esthétique contemporaine, articuler le travail de la lumière à celui de la vidéo, trouver un équilibre entre souci de l’histoire, goût du jeu et abstraction des images. J’aimerais ainsi créer pour Amadigi un écrin scénique d’une grande simplicité et d’une grande pureté où la magie, la féérie et la rêverie auront toute leur place.
Bernard Levy
Pourquoi choisir Amadigi plutôt qu’un autre des nombreux opéras de Haendel ? Pour un metteur en scène comme pour un chef d’orchestre, l’adéquation entre la force des personnages et celle de la musique, entre la trame et le rythme de l’oeuvre, ouvre de nom¬breuses perspectives. Par ailleurs, le grand nombre de situations fortes, voire extrêmes, contenues dans cet opéra élimine les instants décoratifs au profit d’une tension constante du début à la fin de l’oeuvre. Amadigi est aussi un opéra de la jalousie, tra¬versé par la souffrance que ressentent les bourreaux, tout comme leurs victimes. Ecrit en un mois, c’est un des plus beaux opéras de Haendel, avec de nombreux airs poignants, récitatifs accompagnés, ou airs de vengeance.
Nous allons, au-delà d’une vision illustrative de ces situations très baroques (scène de prison, incantations, serment amoureux, évanouissement, apparition de fantôme, transformation d’un personnage) faire vivre intensément aux quatre protagonistes ce parcours chaotique fait de dangers réels ou fantasmés, d’instants de bonheur, d’espoirs et désespoirs. Tout d’abord en faisant des récitatifs - où l’action progresse et où ont lieu tous les retournements de situation - l’endroit où la voix des chanteurs se fera plus proche de la parole. Il me semble pas¬sionnant d’entamer une réflexion sur l’intérêt du récitatif dans le répertoire haendélien, pour qu’il ne soit pas un passage obligé et contraignant entre deux airs, mais bien l’endroit où le caractère des personnages se révèle le plus. Nous travaillerons avec les chanteurs sur la technique du Parlé-chanté dont le contraste avec le lyrisme des arias Da Capo sera d’autant plus saisissant.
Nous nous donnerons aussi la liberté, comme le fait Haendel dans Agrippina, de briser parfois le carcan de ces airs à la structure rigide, en interrompant une phrase, en faisant deviner au public certains mots-clés, ou encore en dialoguant avec les instruments concertants de l’orchestre. Le troisième élément déterminant sera l’orchestre : chez Haendel, il est le grand partenaire de chaque personnage, et lui apporte couleur et énergie. Le compositeur a privilégié dans Amadigi l’emploi des instruments à vent. Quant aux cordes, elles sont souvent utilisées en unissons rapides et percutants, pour montrer le torrent d’émotions ou de violence qui se dégage d’un personnage.
Amadigi de Haendel est ma première collaboration avec Bernard Levy. Je lui ai proposé ce titre car sa grande culture théâtrale et son exigence en matière de travail d’acteur vont affiner et enrichir notre recherche sur le genre si difficile de l’Opera seria, dans un esprit contemporain. Quand il parle de Shakespeare et de Marivaux ou encore de cinéma à propos d’Amadigi, c’est toute une galerie de personnages et d’univers avec leurs sons et leurs images qui débarquent dans le monde haendelien, lui offrant leur richesse et leur inspiration en ouvrant de nouvelles et vastes perspectives à notre projet .
Enfin, l’emploi de la vidéo me semble être la réponse privilégiée au genre que nous abordons : comment traduire mieux aujourd’hui les exigences de l’opéra machine où règne le Merveilleux qu’avec les moyens illimités de l’image ? Tout est possible avec la vidéo : montrer, mais aussi suggérer, et emmener le spectateur dans des univers parallèles. Tout le propos de l’opéra baroque, en quelque sorte…
Jérôme Correas
Un bijou peu connu de Haendel dans une mise en scène sobre et adaptée, et de très belles voix, dans un écrin charmant. Un regret, l'acoustique dans les loges de l'orchestre est un peu plate.
Belle musique, belles voix - bravo à La contralto... une mise en scène pas intrusive - ce qui est rare - voire drôle parfois. Mais ne pas espérer de confort hors du parterre. Même avec une place de 1re catégorie en corbeille, légèrement de côté, torticolis et crampes assurées à la sortie!
Bien que coloré, le minimalisme de la mise en scène fut un regret, mais il a mis en valeur la beauté du jeux, la profondeur et la richesse des voix des actrices cantatrices (puisque les femmes suppléaient aux rôles d'hommes). Merci aussi à l'orchestre pour le rendu de la magnifique musique de Haendel.
Magnifique musique belle voix accompagnées par un orchestre de qualité. Dommage que l absence de décor remplacé par quelques effets de lumières fades et réducteurs de même que des costumes ternes et misérabilistes ne rendent pas hommage à ce merveilleux musicien qu' est Haendel.
Pour 5 Notes
Un bijou peu connu de Haendel dans une mise en scène sobre et adaptée, et de très belles voix, dans un écrin charmant. Un regret, l'acoustique dans les loges de l'orchestre est un peu plate.
Belle musique, belles voix - bravo à La contralto... une mise en scène pas intrusive - ce qui est rare - voire drôle parfois. Mais ne pas espérer de confort hors du parterre. Même avec une place de 1re catégorie en corbeille, légèrement de côté, torticolis et crampes assurées à la sortie!
Bien que coloré, le minimalisme de la mise en scène fut un regret, mais il a mis en valeur la beauté du jeux, la profondeur et la richesse des voix des actrices cantatrices (puisque les femmes suppléaient aux rôles d'hommes). Merci aussi à l'orchestre pour le rendu de la magnifique musique de Haendel.
Magnifique musique belle voix accompagnées par un orchestre de qualité. Dommage que l absence de décor remplacé par quelques effets de lumières fades et réducteurs de même que des costumes ternes et misérabilistes ne rendent pas hommage à ce merveilleux musicien qu' est Haendel.
Merveilleuse soirée pour les amateurs de musique baroque. Distribution éblouissante. A ne pas manquer car la mise en scène moderne, allégée des "machineries" de l'époque gagne en émotion.
Square de l'Opéra-Louis Jouvet, 7 rue Boudreau 75009 Paris