« L’Andalousie faisait partie de ma peau avant moi », proclame Ana Morales. En revendiquant pleinement son héritage familial et culturel, l’ex-soliste du Ballet flamenco d’Andalousie, formée au conservatoire de Barcelone puis aux côtés de José Antonio Ruiz et de bien d’autres, signe sa pièce la plus personnelle. Sans permission (« sin permiso » en espagnol), elle évoque le souvenir de son père, Sévillan émigré en Catalogne, et met au jour, par sa danse fiévreuse, les mots qui entre eux n’ont jamais été dits.
D’une robe à volants à un costume masculin, de l’authenticité d’un cabaret gitan à la modernité d’une gestuelle revisitée, la chorégraphe, Prix Giraldillo de la meilleure danseuse 2018, endosse successivement toutes les esthétiques du flamenco, et en chemin, trouve son identité. Pour l’accompagner, un formidable trio de musiciens mêle à la musique traditionnelle des envolées électroniques, tandis qu’à ses côtés, le danseur José Manuel Álvarez se révèle un partenaire hors pair. Mûries durant un an au fil de résidences européennes, ces « canciones para el silencio » parlent la langue du coeur.
Rendez-vous désormais incontournable des aficionados, la Biennale d’art flamenco proposée conjointement par Chaillot et la Biennale de Séville souffle avec fierté sa quatrième bougie. Toujours soucieuse de proposer au public l’éventail le plus ouvert des flamencos, cette biennale se caractérise par la rencontre d’artistes venus d’univers et de cultures en apparence très éloignés.
C’est par exemple le cas d’Eva Yerbabuena qui, après un voyage au Japon, a intégré à son spectacle le chant d’Anna Sato, ou encore avec ce melting-pot détonant qu’est la réunion sur un même plateau de Marie-Agnès Gillot et d’Andrés Marín sous le regard de Christian Rizzo. Les tenants d’un flamenco plus traditionnel sont toujours présents. Certains, identifiés jusqu’à présent comme interprètes, tels David Coria ou Ana Morales, vont faire leurs premiers pas de chorégraphes.
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