Blasted : anéanti, éventré, explosé il sagit bien de cela, dune remise en question des fondements même de la représentation par-delà lhorreur.
Un couple improbable cherche une issue à sa passion, par le sexe, par la violence, par-delà la mort.
Un grand hôtel dans une métropole, une violence de couple, une violence dehors. Le dehors surgit. Une bombe explose anéantissant, éventrant le lieu. Le quotidien devient universel, le naturalisme touche à la tragédie " euripidienne " en ce sens où la pièce porte en elle les germes de destruction de sa forme.
Euripide écrivait sur la mort de la forme tragique, sur la décadence de ce genre, Sarah Kane dans Anéantis met à bas la représentation, lexténuant par une surenchère de violence jusquau cannibalisme ; elle dépasse la barbarie pour exténuer notre monde.
Tout cela commence le plus naturellement possible dans ce lieu impersonnel, si ce nest la personnalité dun couple. Mais en faisant surgir lextérieur à lintérieur, en détruisant le décor pour dévoiler un plateau nu, cru, la pièce, à limage de ce couple, cherche une issue à la représentation, détruisant une forme fin de siècle, télévisuelle, aseptisée, pour laisser le champ vide à de nouveaux édifices
Louis Do de Lencquesaing
( ) Blasted, je pense, vient du centre de notre humanité et de notre très ancien besoin du théâtre.
Cest ce qui lui donne son autorité étrange, presque hallucinatoire. La pièce ne nous montre pas les images avec lesquelles nous vivrons si nous ne renouvelons pas notre vision morale. Ces images nous les vivons déjà - dans le monde où les deux aiguilles de lhorloge sont la naissance et la mort, dans ce monde qui est toujours là, et qui ne devient notre réalité déshumanisée que lorsque nous nessayons pas de le rendre plus juste. Les images de Blasted sont anciennes. Elles apparaissent à toutes les grandes époques de lart - dans le théâtre grec et jacobéen, dans le Nô et le Kabuki. La pièce change certaines de ces images - tous les artistes le font pour ramener limagerie ancienne, changée et inchangée, sous le regard de leur époque. Lhumanité de Blasted ma ému. Je minquiète pour ceux qui, trop occupés ou tellement perdus, ne pourront pas voir son humanité. Et en tant quauteur, je suis ému par le métier et la maîtrise dun si jeune écrivain.
Edward Bond
Texte français Christel Gassie, extrait dun article paru dans The Guardian, Londres, 28/1/1995
Il ny pas dans ce pays de réel débat sur la façon de représenter la violence dans lart.
Dans cette pièce la violence a perdu tout son glamour. Elle nest que présentée. Je proteste contre lidée que je chercherais à choquer. Jai écrit Blasted pour dire la vérité. Bien sûr cest choquant. Ôtez à la violence tout son glamour et elle devient totalement repoussante. Est- ce-que, sérieusement, les gens préféreraient la violence si elle était attirante ?
Sarah Kane
15, rue Malte Brun 75020 Paris
Station de taxis : Gambetta
Stations vélib : Gambetta-Père Lachaise n°20024 ou Mairie du 20e n°20106 ou Sorbier-Gasnier
Guy n°20010