Présentation
A propos de Brutopia
Paroles d'auteur
Brutopia est une pièce construite autour de Sir Thomas More, auteur de l'Utopie et chancelier du Roi Henri VIII. Le personnage principal, sa fille, a écrit une anti-Utopie titrée Brutopia révélant la sauvagerie de la société réelle. Passions, déceptions et conflits sont présents dans tous les personnages de cette pièce, où fiction et réalité s'intrechoquent continuellement.
Sir Thomas More a écrit Utopia en 1516. Il y décrit un état idéal dans une île imaginaire : Utopia. Dans cet état idéal, l'argent est aboli, la propriété privée est supprimée, la journée de travail ne compte que six heures pour que le travailleur ait le temps de cultiver son esprit, les repas d'une extrême frugalité sont pris en commun, les lois sont peu nombreuses et claires, le pays est gouverné par un prince mais qui est soumis à l'Etat et au peuple, et l'Etat ne doit pas être "une conspiration des riches contre les pauvres".
Barker invente une famille à ce Thomas More, et en particulier Cécilia, sa fille cadette qui détestant son père, a écrit de son côté et en secret un texte : Brutopia, son "utopie" à elle, qui s'oppose quasiment mot pour mot à celle de son père. Et Cécilia va tout faire pour que Brutopia soit publié : coucher avec le roi Henri VIII, faire du chantage à la reine Anne Boleyn et accélerer l'arrestation et l'exécution de son père.
Cet argument est bien réducteur. Brutopia est une pièce baroque, touffue, complexe, où une vingtaine de personnages se croisent comme ce Docteur fantomatique prétendant qu'il vient d'Utopie et que cette île n'est pas aussi idyllique que cela, Holbein venant peindre More avant qu'il ne meure, ces Citoyens de Brutopia qui hantent les rêves de Cécilia, cette Nourrice qui se plaisait à la torturer alors qu'elle était bébé...
De nombreux anglais disent que Howard Barker est l'auteur britannique le plus shakespearien de la fin du XXème siècle. Cela n'est jamais autant visible que lorsque, comme son illustre prédécesseur, il va chercher des personnages et des situations du passé pour mieux parler de son présent. La scène se déroule dans l'Angleterre du XVIème siècle, une époque où le rêve utopique est un exercice national pour les penseurs et Barker écrit sa pièce dans l'Angleterre de la fin du XXème siècle, époque où l'utopie après avoir été la raison de vivre d'un grand nombre de personnes devient suspecte. Thomas More rêvait un monde meilleur, Cécilia veut que son livre soit publié...
Une dernière chose : une des grandes forces de l'écriture de Barker, c'est la contradiction. Tous les personnages de Brutopia se contredisent, ils ne sont ni des héros, ni des salauds, Barker n'a aucun message à proclamer au public qui vient l'écouter, il ne fait que questionner le monde qui l'entoure ; pas de réponses, que des questions, et sans concession. C'est déjà pas si mal...
Guillaume Dujardin
"La Tragédie déteste la politique. La tragédie déteste les bonnes intentions. Elle déteste tout ce qui démontre la solution. Elle déteste donc l'industrie du plaisir, l'industrie des loisirs, l'industrie de l'harmonie et l'industrie de la réconciliation. La tragédie est le spectacle de la douleur rendue exquise par l'art (...). La tragédie seule connaît le secret de l'existence. Ce secret est que la vie ne suffit pas. Nous ne pouvons tolérer longtemps ce secret. C'est un secret que l'on découvre seulement dans un endroit dont le but existentiel est le secret, qui est l'apothéose du secret, où tous ceux qui bougent et qui jouent sont consumés par le secret. Cet endoit, c'est le théâtre."
"(...) Le Théâtre de la Catastrophe, comme le théâtre tragique, fait son territoire des limites de la tolérance. Un tel théâtre agit dans la zone de risques maximums pour l'invention et l'imagination de l'auteur, et aussi pour le bien-être de son public. Il force l'attention et la loyauté de ceux pour qui la répétition éraillée de platitudes sociales, qu'elles soient de droite ou de gauche, apparaît comme une succession de phrases stériles. (...) Ce n'est manifestement pas une expérience associée au divertissement, et conséquemment le public a besoin d'être à la fois préparé et, comme c'est le cas avec toute nouvelle forme de théâtre, éduqué à vivre sa propre liberté (...)"
- Le Théâtre humaniste
Nous sommes tous vraiment d'accord. Quand nous rions nous sommes ensemble. L'art doit être compris. La finesse d'esprit lubrifie le message. L'acteur est un homme/une femme non différent de l'auteur. La production doit être limpide. Nous célébrons notre unité. Le critique est déjà de notre côté. Le message est important. L'auditoire est cultivé et il rentre chez lui heureux ou fortifié.
- Le Théâtre de la Catastrophe
Nous ne sommes d'accord que rarement. Le rire dissimule la peur. L'art est un problème de compréhension. Il n'y a pas de message.L'acteur est d'une nature différente. L'auditoire ne peut pas saisir tout ; Pas plus que ne le pouvait l'auteur. Nous nous querellons pour aimer. La critique doit souffrir comme tout le monde. La pièce est importante. L'auditoire est divisé et rentre chez lui ébranlé ou confondu.
Place de la liberté (Boulevard Foch) 57103 Thionville