Claire Diterzi - Tableau de chasse

le 2 décembre 2008
1h30

Claire Diterzi - Tableau de chasse

Si vous ne la connaissez pas encore, allez-y ! Ses dix chansons composées à partir d'oeuvres signées Fragonard, Toulouse-Lautrec, Allen Jones, Rodin, Lucian Freud ou Turner forment un tableau de chasse électro des plus enivrants.
  • L’ode de Claire

Tableau de chasse est un portrait de Claire Diterzi, l’artiste en femme de tête, une échappée belle sur quelques notes enivrantes. Petite, Claire Diterzi voulait être dessinatrice. Elle fera des études d’art graphique avant de monter son premier groupe de rock à l’âge où certaines délaissent à peine leur poupée, seize ans ! Histoire de mettre en images ses mots ou de coller des couleurs à sa musique ? Les deux bien sûr !

Un jour, Claire a rangé ses carnets de croquis et elle est devenue cette chanteuse à la forte personnalité qui brillait dans Iris de Philippe Decouflé ou Iku d’Alexis Armengol (tous deux présentés à Chaillot) : elle a également signé un premier album remarqué, Boucle, et la B.O. d’un film, Requiem for Billy the Kid.

Toujours ce goût des allers-retours entre les arts visuels et sonores. Aujourd’hui, Claire Diterzi nous fait une scène avec Tableau de chasse, soit dix chansons à partir de dix œuvres signées Fragonard, Toulouse-Lautrec, Allen Jones, Rodin, Doris Salcedo, Lucian Freud ou Turner. Joli catalogue pour tout dire.

Un musée imaginaire au féminin pluriel dans lequel Claire Diterzi nous guide en compagnie d’Alexis Armengol, son scénographe, et de cinq musiciens. « J’ai conçu ce répertoire aux parfums de chasse à courre électro sans jamais le dissocier de son habillage scénique » dit la fille de l’air, celui que l’on fredonne, il va sans dire.

Pour ce récital en images, des projections vidéos de Franck Ternier accompagneront ces chefs-d’œuvre réinterprétés. « J’ai pensé ce projet pour le vivre et le partager sur scène. Un disque en résultera (à paraître en janvier 2008 chez Naïve) mais il n’est pas le moteur de mon ambition première ». Non, ce qui anime Claire Diterzi, c’est d’écrire pour que l’on voie ses chansons. « Je veux montrer mon univers, convaincue qu’il ne s’écoute pas seulement » dit-elle. On la prend dès lors au mot, quitte à déborder du cadre avec elle. Tableau de chasse est une toile à vivre. Claire Diterzi en est l’artiste inspirée.

Ph N

L'album est édité chez Naïve (2008).

  • Tableau de chasse

Avec son nouveau projet Tableau de chasse, Claire Diterzi a fait bien plus que d’enregistrer un nouvel album : cet objet ambitieux et audacieux s’inscrit en effet dans une dynamique artistique forte. « Ce qui le différencie de ce que j’ai fait auparavant, c’est qu’il est parti de la scène. On m’a offert l’opportunité de jouer à Chaillot, je me suis dit : c’est le moment d’ajouter une dimension visuelle à ma musique. »

Elle en profite au passage pour employer une méthode de travail bien particulière, qui la voit écrire et composer ses chansons à partir de sculptures et de tableaux. « J’ai voulu m’appuyer sur du beau, de l’émotion, pour m’abriter de la médiocrité ambiante, et stimuler une curiosité sans cesse menacée par la télé. » Une approche à la fois artistique et militante, qui renforce un engagement déjà présent dans le travail de Claire, mais qui n’avait jamais été aussi explicite.

Claire a commencé par sélectionner les dix œuvres qui l’inspiraient le plus parmi la centaine qu’elle pourchassait frénétiquement. Elle s’apercevra a posteriori du dénominateur commun à la plupart de ces travaux - la femme -, qui lui a permis d’aborder ses sujets de prédilection : l’amour et la sensualité. En un mot : le couple, dans tous ses états.

Cet album est la synthèse de ses expériences passées, consacrées à mettre sa musique au service de disciplines telles que le cinéma (Requiem for Billy the Kid de Anne Feinsilber ), la danse (Iris de Philippe Decouflé) ou, plus récemment, l’exposition de Titouan Lamazou au Musée de l’Homme. « Je ne puise pas l’inspiration uniquement dans la musique. » Les œuvres choisies, signées Rodin, Fragonard, Camille Claudel ou Toulouse-Lautrec sont pour la plupart familières. « M’associer à des chefs-d’œuvre de maîtres a décuplé mon plaisir. Ils m’ont littéralement obsédée : j’ai passé le 24 décembre dernier avec une reproduction en résine de la Danaïde de Rodin. » Une démarche hédoniste, à mille lieues d’une approche d’historienne de l’art. « J’ai choisi des œuvres qui déclenchaient en moi un état ou des mots particuliers, explique-t-elle, j’ai considéré ces œuvres comme des copines, elles m’ont donné une énergie incroyable. »

La déjà survoltée Claire Diterzi a déployé une force hors du commun sur cet album qu’on peut considérer comme le plus important de sa carrière. « J’ai été ultra-exigeante : je n’avais jamais travaillé autant. » Habituée depuis le groupe Forguette Mi Note aux expériences collectives et aux collaborations, elle a cette fois conçu le disque en tête-à-tête avec les œuvres. « Il raconte qui je suis, d’où je viens. Je l’ai conçu seule dans mon studio, à tyranniser mon micro et la souris de l’ordinateur. Cette solitude jouissive m’a permis d’aller au bout de mes idées. » Dans cette quête, Claire se réapproprie l’outil qui fait sa singularité : une voix exceptionnelle de souplesse et de puissance évocatrice.

En cela, Tableau de chasse est un terrain de jeu épatant : les mélodies de voix se superposent, se répondent, se frottent les unes aux autres avec soin et gourmandise. Cette voix démultipliée investit chacun des titres d’une personnalité et une intention bien différentes. « Je ne pouvais pas chanter pareil sur tous les titres, alors chaque chanson a une couleur très différente. Il s’agissait de respecter l’œuvre et de jouer le jeu, d’être honnête par rapport à ce que j’avais devant les yeux. »

Pour A quatre pattes, inspirée par une sculpture de l’Américain Allen Jones il fallait, dit Claire, une « voix de bimbo » et des sons années 1970. Avec son imagerie volontairement grotesque et ses traits appuyés, la chanson moque la vulgarité et le clinquant des clips de R&B et des plateaux de téléréalité. Sur La vieille chanteuse, d’après Toulouse-Lautrec, Claire sonne comme une femme de 80 ans, avec un son qui craque, manière de s’affirmer à rebours du jeunisme féroce en vigueur de nos jours. L’Epave, chanson inspirée de la Danaïde de Rodin réclamait quant à elle un chant d’une grande sensualité. Mêlant technologie moderne et traditions ancestrales, Tableau de chasse opère un va-et-vient entre les ambiances et les époques.

Claire a échafaudé ce disque en toute liberté, ne s’imposant que deux règles : employer autant de chœurs que possible, et forger les morceaux issus de sculptures à partir de rythmes. « Je voulais qu’on entende le ciseau sur la pierre » dit-elle. Pendant la conception du disque, elle a consigné un tas de petits détails autour des œuvres. « Je mettais tout ce que m’évoquait chaque œuvre dans un cahier d’écolière qui ne m’a pas lâchée. J’ai aussi dépensé des fortunes en reproductions et en bouquins. »

C’est paradoxalement en puisant dans le travail d’autres artistes que Claire a écrit ses textes les plus personnels. « Tout ce qu’il y a dans les chansons m’est arrivé. C’est un album autobiographique, et je n’avais pas prévu le coup. Fouiller en profondeur chez moi m’a ramené à mon enfance et aux choses que j’écoutais quand j’étais petite, ou pendant mes études. » En l’occurrence, le parrainage croisé des B52’s et du Mystère des voix bulgares, deux aventures qui lui ont donné envie de faire de la musique.

Sur le plan de l’instrumentation, elle a laissé libre cours à son inspiration, au gré des climats picturaux. « Le tableau de Turner, très brumeux, m’a évoqué une chanson maritime, lente comme un sous-marin. J’espère que les gens sentiront ces ambiances-là. » Alors que Claire Diterzi en conçoit déjà le spectacle, Tableau de chasse s’affirme comme la plus passionnante aventure musicale de son auteur, qui nous a depuis longtemps habitués à l’excellence ainsi qu’à la fréquentation des chemins de traverse. « Je ressens Tableau de chasse comme un aboutissement qui m’a permis de me recentrer, de canaliser les expériences que j’ai eues et de leur donner du sens. » Après avoir confectionné ces pièces dans son antre pendant plus d’un an, Claire brûle aujourd’hui d’en faire goûter les parfums capiteux sur scène, avec l’exubérance et la passion qui la caractérisent.

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L'Azimut - Théâtre F. Gémier / P. Devedjian

13, rue Maurice Labrousse 92160 Antony

  • RER : Antony à 191 m
  • Bus : Théâtre - Mairie à 123 m, Gare d'Antony à 157 m, Antony RER à 206 m
  • Voiture : par la N20. Après la Croix de Berny suivre Antony centre puis le fléchage.
    15 min de la porte d’Orléans.
    Stationnement possible au parking Maurice Labrousse (gratuit à partir 18h30 et les dimanches), au parking du Marché (gratuit pendant 3h après validation du ticket de parking à la caisse du théâtre) et au parking de l’Hôtel de ville (gratuit pendant 1h15).

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Spectacle terminé depuis le mardi 2 décembre 2008

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