L’histoire ? Tout le monde la connaît. En 2002, à Moscou, un commando tchétchène prend un théâtre en otage à l’issue de la représentation d’une consternante comédie musicale. Mais pourquoi un théâtre ? À cette question, Chamilevitch, le personnage principal de la pièce, répond : « C’est ainsi : quand le théâtre oublie le monde, le monde se rappelle au théâtre. »
Ces combattants désespérés (et donc dangereux) d’une cause oubliée se placent là où nul ne peut plus les ignorer, dans la perspective du prince - qui promit de les « buter jusque dans les chiottes ». Ayant investi les lieux, les rebelles décident donc d’utiliser l’outil, qui est tombé entre leurs mains, pour ce qu’il est : ils vont donc faire, à leur façon, du théâtre.
Cette Comédie Tchétchène fait ainsi la part belle au procédé baroque du théâtre dans le théâtre, en explorant ses diverses formes : comédie musicale, théâtre réaliste, récital poétique, chanson, improvisation comique et théâtre documentaire. Tandis qu’un rebelle lit la liste des victimes réelles du conflit – la pulsation cardiaque du spectacle –, d’autres membres du commando interprètent pour le public russe la même scène réaliste de leur vie quotidienne, à trois époques différentes. L’histoire bégaye. Un autre met en regard la fable de La Fontaine, Le Loup et le Chien avec l’hymne de la résistance tchétchène, On est des loups. Puis vient le moment d’improviser : un spectateur russe doit jouer le rôle d’un tchétchène alors que les rebelles incarnent les soldats russes. Enfin, une femme tchétchène et une spectatrice russe livrent chacune le récit de leurs vies, étrangement identiques.
Texte lauréat du Concours des Nouvelles Ecritures 2009.
Que reste-t-il de l’actualité ? Dix ans après ce fait divers horrible, pas grand chose en fait. 168 morts pour rien. On ne sait même pas vraiment comment les gens sont morts. Par arme à feu, gazés ? On ne sait même pas quelle était la composition de ce gaz mystérieux utilisé par les forces spéciales russes. C’est donc sur des zones d’ombres qu’il faut construire le spectacle. Yoann Lavabre a écrit d’après des hypothèses, des écrits sur le sujet. C’est la force du texte. C’est la force du théâtre. Car on est vraiment au théâtre. Et c’est un théâtre qui regarde le monde.
Bruno Lajara
23 octobre 2002, Moscou. A l’affiche du théâtre de la Doubrovka, Nord-Ost, la comédie musicale russe du moment. Soudain, l’irruption, les tirs en l’air, les cris. Des acteurs terrifiés sont chassés de la scène. Des spectateurs, d’abord émerveillés par le réalisme de la scène, basculent eux aussi dans l’horreur. Huit cent personnes sont prises en otages par un commando de quarante combattants tchétchènes. Trois jours de drame en un seul acte. Les rebelles exigent la fin de la Seconde Guerre de Tchétchénie, commencée en août 1999. La prise d’otage devient aussi un spectacle. Personne n’a oublié les allées et venues de négociateurs, jusqu’à l’assaut final : l’intervention des “ forces spéciales russes ”, le gaz mortel, les morts par centaines. Bilan : 39 morts parmi les assaillants tchétchènes, 129 otages sont également tués par l’inhalation des gaz.
« Pas de naturalisme mais une vraie énergie dévastatrice, entre rires et larmes. » - La Voix du Nord
« Le spectateur ne sort pas indemne de près de deux heures d'une pièce admirablement mise en scène et interprétée. La Comédie Tchétchène (pas toujours très drôle), montée par Bruno Lajara et la compagnie Vies à Vies, sur un texte de Yoann Lavabre, revient sur le drame du théâtre moscovite de 2002, faisant éclater les revendications des Tchétchènes... aujourd'hui retombées dans l'oubli. » Sortir Lille - S. Morelli
« 2002, Moscou, théâtre de la Doubrovka. On joue Nord-Ost, pièce du répertoire tout à la gloire de l'âme russe. Entracte. Irruption d'une cinquantaine de militants armés tchétchènes. Et trois jours de prise d'otages. Que s'est-il passé ? On ne le saura jamais vraiment. Tchétchènes abattus, membres du public gazés par les forces spéciales russes. la réalité faisait irruption sur scène. Remué, Yoann Lavabre prit la plume créant une fiction à partir de faits dont on sait finalement peu. Ce texte attire l'attention de Bruno Lajara, qui travaillait depuis longtemps sur la violence... » Let's motiv - T. Allemand
Place du théâtre (quartier de la Mairie) 94130 Nogent-sur-Marne
Voiture : Autoroute A4, au niveau de la Porte de Bercy en venant de Paris, prendre la sortie n° 5 “Nogent-sur-Marne”, rester sur la voie de gauche.