Pièce à part dans l’oeuvre immense de Molière, la seule où l’on y meurt, où l’on se bat, où l’on fuit des dangers, la seule où l’action se déroule en plusieurs lieux... C’est également, avec , la pièce la plus censurée de Molière, celle qui va déchaîner la colère de la compagnie du Saint-Sacrement. Pendant près de deux siècles elle ne sera pas jouée sous sa forme originale mais dans une adaptation versifiée et « politiquement correcte » de Thomas Corneille.
« Dom Juan est un petit con » me disait, en plaisantant à demi, il y a quelques années à Lyon Michel Bouquet lorsque je lui parlais (déjà à l’époque) de ce projet... C’est un jugement brutal certes, mais il a le mérite de désacraliser Dom Juan, de regarder cette oeuvre et ce personnage avec un regard différent, moins favorable...
Un homme, poussé par ses pulsions, ses envies, et dont les faits et gestes dans leur chronologie et leurs conséquences, montrent qu’il improvise beaucoup et qu’il navigue à vue dans les situations qui lui arrivent. Que cherche-t-il ? Quelles sont ses attentes ? Il semble davantage ballotté par ses actions que maître de celles-ci, à l’image du naufrage « ... et cette bourrasque imprévue a renversé avec notre barque le projet que nous avions fait... »
Molière semble volontairement minorer certaines actions de Dom Juan ; le meurtre du commandeur est une affaire réglée « J’ai eu ma grâce de cette affaire » ; sa tentative d’enlèvement est un fiasco complet, la séduction des deux paysannes tourne court lorsque Mathurine lui laisse entendre qu’il est en train de tenir à Charlotte les mêmes promesses qu’elle a reçues un quart d’heure auparavant, un pauvre hère refuse même de jurer pour un louis d’or.
Et si Dom Juan était l’histoire d’une faillite humaine ? Celle du héros d’abord puisqu’il y perdra la vie, la nôtre ensuite incarnée sur scène par cette galerie de portraits d’hommes et de femmes ayant, à un moment ou à un autre, des démêlés avec lui... Et celle du théâtre enfin car Dieu s’invite sur scène et prive un père de son fils, un valet de son maître, une famille de réparations, et la scène d’un personnage.
Et si Molière, qui n’a jamais fait que ça finalement, décrire ses contemporains, s’en moquer, parfois tendrement parfois cruellement, voulait une fois de plus nous parler de nous et non de Dieu ? De nous, face à la déviance, à l’insolite, à la liberté cruelle d’un de nos semblables : Dom Juan. Jalousie, colère, avidité ou encore trahison. Ces nuages humains le font fuir mais ne l’affectent pas outre mesure, il faut donc plus que tout cela pour le stopper… Le ciel, le ciel comme dernier recours devant l’impuissance des hommes, le Ciel doit intervenir, et Molière choisit la façon la plus théâtrale d’incarner cette vengeance divine, une statue qui bouge et qui parle, une rocambolesque machine de théâtre, comme pour mieux nous humilier nous, humains impuissants, à contrer ce héros maléfique !
Les autorités bien pensantes de l’époque ne s’y tromperont pas et jugeront la pièce diffamante pour l’Eglise. Le divin prend les traits d’une statue ridicule et le seul qui tente de défendre le point de vue de l’Eglise est un valet qui est incapable d’organiser sa pensée pour affirmer ses positions face à Dom Juan qui lui, en revanche possède un français magnifique et un art consommé de la rhétorique.
Dom Juan est un révélateur parfois conscient, souvent inconscient des limites humaines. La peinture d’un monde vieillissant, d’une société, de ses failles, de ses limites, de ses codes… Sa vie, ses choix, ses actes, nous questionnent et nos faibles réponses nous trahissent. C’est cette peinture que je veux montrer... Et pour qu’elle soit juste il faut tout jouer, tout regarder et tout montrer, rendre lisible tout ce qui est présent, et voir ce qui ne l’est pas…
Une pièce troublante, baroque, au héros incertain. Une prise de conscience tardive des limites d’une vie sans retenues. L’histoire d’un homme qui s’appelait Dom Juan Tenorio et dont la vie est devenue un mythe.
Philippe Torreton
fausse manipulation pour la première fois. Hier j'ai vu le spectacle de Torreton, venue d'Auvergne, à la fin je me suis levée et j'ai hurlé merci. Merci parce que le miracle du théâtre était revécu, parce que Dom Juan était tel qu'il peut se lire en 2007, détaché, désabusé d'une comédie qui le répugne( la nôtre) et fasciné par la sienne en quête d'immortalité et d'images renouvelées. Le jeu contemporain associé à des décors plus classiques créent ce décalage que je ne pensais plus jamais vivre avec une pièce du répertoire. Que ceux qui se laissent borner par des critiques jalouses et aveugles essaient de voir par eux-même.
Dom Juan est un spectacle superbe avec un Philippe Torreton et un Jean-Paul Farré admirable. Tout est rendez-vous d' un tres bon spectacle : les effets speciaux terrifiants ( lumieres, bruitages, decors...), interpretation excellente de l' ensemble des comédiens, un théâtre marigny magnifique. un spectacle accompli et superbe
fausse manipulation pour la première fois. Hier j'ai vu le spectacle de Torreton, venue d'Auvergne, à la fin je me suis levée et j'ai hurlé merci. Merci parce que le miracle du théâtre était revécu, parce que Dom Juan était tel qu'il peut se lire en 2007, détaché, désabusé d'une comédie qui le répugne( la nôtre) et fasciné par la sienne en quête d'immortalité et d'images renouvelées. Le jeu contemporain associé à des décors plus classiques créent ce décalage que je ne pensais plus jamais vivre avec une pièce du répertoire. Que ceux qui se laissent borner par des critiques jalouses et aveugles essaient de voir par eux-même.
Dom Juan est un spectacle superbe avec un Philippe Torreton et un Jean-Paul Farré admirable. Tout est rendez-vous d' un tres bon spectacle : les effets speciaux terrifiants ( lumieres, bruitages, decors...), interpretation excellente de l' ensemble des comédiens, un théâtre marigny magnifique. un spectacle accompli et superbe
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