Un livre immense, d’une imparable drôlerie, à la construction narrative d’une liberté et d’une complexité merveilleuse. Mais à quoi tient la prégnance du mythe ? Don Quichotte est une histoire de plaies et de bosses…
L’agressivité totalement irréfléchie du “Chevalier à la triste figure” le conduit à se précipiter dans des conflits qui le plus souvent tournent au désastre. Après Le Malade imaginaire et Le Procès, la nouvelle réalisation de Philippe Adrien avec la compagnie du Troisième Oeil.
S'identifiant aux héros de ses lectures, Don Quichotte se veut chevalier errant, redresseur de torts. Cheminant avec son fidèle écuyer Sancho Panza sur les plaines de Castille, il y provoque mille aventures dont il sort souvent moulu, jamais abattu.
Don Quichotte, personnage de fiction, illuminé lui-même par des livres de chevalerie lutte sans cesse pour défigurer le réel. Il oublie ce qu’il connaît pour mieux le renommer. Jaillissent de ses aventures un comique débridé au caractère dévastateur qui sous couvert d’enchantement, fait un sort aux mensonges et au monde réel.
Cervantès a inauguré l’ère du doute dans l’Espagne de l’Inquisition. La parole de Cervantès, magnifique et incisive, donne un témoignage lumineux sur son époque et marque les débuts du roman picaresque
«Don Quichotte, nom du héros d’un roman de Cervantes, homme généreux et chimérique qui se pose en redresseur de torts, en défenseur des opprimés. »
Sans être tout à fait explicite, le Robert, avec l’expression « qui se pose », introduit une donnée intéressante du récit de Cervantes. Oui, Don Quichotte prétend défendre les opprimés, mais il est fort rare qu’il ne se trompe pas d’ennemi. Il lui arrive même de punir qui ne le mérite pas et de laisser filer des méchants. Don Quichotte est tout simplement une histoire de plaies et de bosses ! L’agressivité totalement irréfléchie du « chevalier à la triste figure » le conduit à se précipiter dans des conflits qui le plus souvent tournent au désastre pour lui-même comme pour son valet.
Don Quichotte se conduit comme un aveugle ! C’est peut-être là pour Bruno Netter une des raisons d’incarner ce personnage mythique. Un peu comme Argan ,dans Le Malade imaginaire, mais pour des motifs différents, Don Quichotte ne cesse de manifester un aveuglement sans mesure : son imaginaire étant envahi par les romans de chevalerie, il transforme immédiatement tout ce qu’il voit ou pourrait voir aux normes de son univers fictif.
Deux volumes et environ mille pages de texte, un livre immense… Qui lit soigneusement le roman de Cervantes découvre nombre de moments – on pourrait dire de scènes – d’une imparable drôlerie, suit une évolution très circonstanciée et précise de la relation entre le maître et le valet, et seretrouve ahuri par une construction narratived’une liberté et d’une complexité merveilleuses. Jamais peut-être le nom de Don Quichotte n’a été aussi souvent mentionné que ces derniers temps. C’est là bien sûr un effet de prolifération médiatique. N’empêche, ces mal-logés, ces SDF qui choisissent de se définir comme «enfants de Don Quichotte », c’est-à-dire comme liés à un mythe né il y a plus de quatre cents ans, ce phénomène mérite d’être interrogé. Imaginons qu’un groupe de SDF, et précisément l’un d’eux qui est aveugle, lise le roman de Cervantes…
Philippe Adrien
Don Quichotte ne peut pas plus renoncer à brouiller les frontières du rêve et de la vie que la vie ne peut suspendre pour lui l’appareil de ses enchaînements. Il commence par attaquer choses et gens – des choses parfaitement inoffensives, des gens indifférents, , absorbés par leurs plaisirs ou leurs travaux quotidiens – avec un déchaînement de violence qui fait paraître sous un jour douteux sa réputation de douceur et de bonté. Car, on l’oublie trop, Don Quichotte le Bon, selon le titre qu’il se décerne lui-même à la fin, est en toutes circonstances l’agresseur sans scrupules, le fauteur de troubles brutal qui, s’il est condamné à donner des coups d’épée dans le vide, n’en cause pas moins aux personnes et aux biens des dommages très sensibles…
Jamais il ne propose de réparer les dégâts matériels qu’entraînent à tout instant ses initiatives héroïques… Jamais il ne paie ceux qui l’hébergent et le nourrissent ; il traite Sancho en esclave de ses propres désirs et le tient assez payé de souffrir pour lui, enfin en général il est d’avis que tout lui est dû, par la seule raison qu’il fait lui-même grand bruit autour de son désintéressement: l’argent ne compte pas pour moi, donc il n’a pas non plus de
valeur pour toi, et je n’ai pas à te rétribuer…
Par principe, bon, noble, généreux, il est agressif, insensible à la souffrance des autres et insupportablement tyrannique dès qu’il se croit en mesure d’agir ; impuissant, et innocent en raison même de l’irréalité de sesbuts, il a le don de devenir malfaisant toutes les fois qu’il intervient dans les affaires concrètes… Toutes ses vertus si ostensiblement angéliques sont elles-mêmes l’envers de sa dangereuse impuissance à vivre, de sorte qu’il n’incarne pas du tout, comme on l’a dit et répété, la pureté inaccessible de l’idéal, mais au contraire le diabolisme de qui a consommé en lui le divorce de l’expérience et de l’idée.
Marthe Robert, Roman des origines et origines du roman, Gallimard.
Spectable lamentable. Dès les premières secondes, tout apparaît, nous voilà partis pour 2h20 d'ennui. L'adaptation fait perdre toute la truculence du texte de Cervantès. Le jeu est plus que médiocre, les effets comiques grossiers et inaboutis. Le décor ne fait qu'aggraver l'amer goût d'arnaque du spectateur, qui, poli, n'a pas pendant le spectacle osé quitter son siège. Tout cela n'a qu'un mérite : rappeller le spectacle de fin d'année de l'atelier théâtre du CM2 du fiston. Nul.
Spectable lamentable. Dès les premières secondes, tout apparaît, nous voilà partis pour 2h20 d'ennui. L'adaptation fait perdre toute la truculence du texte de Cervantès. Le jeu est plus que médiocre, les effets comiques grossiers et inaboutis. Le décor ne fait qu'aggraver l'amer goût d'arnaque du spectateur, qui, poli, n'a pas pendant le spectacle osé quitter son siège. Tout cela n'a qu'un mérite : rappeller le spectacle de fin d'année de l'atelier théâtre du CM2 du fiston. Nul.
16/18, allée Léon Gambetta 92110 Clichy La Garenne
Voiture : Sortir à la porte de Clichy, direction Clichy centre, suivre les panneaux Théâtre Rutebeuf