Génération sans espoir
Note de mise en scène
Extraits
C’est l’histoire d’Emma et Jay, amoureux fous, joyeux cyniques, dignes représentants d’une génération sans espoir. « Ils n’avaient rien à perdre, ils s’aimaient et ils savaient que rien ne les séparerait. Il ne leur restait plus qu’à en profiter. »
Jay est en train de sombrer, Emma ne parvient pas à l’extirper de la souffrance. A l’aube d’un nouveau jour sans espoir, Emma décide de se battre. Pour sauver son amant suicidaire elle va tenter le tout pour le tout et prendre ce que personne ne le permet plus d’avoir. La liberté, avec tous les dangers que cela implique….
Par la Compagnie La fabrique des petits hasards. Inspiré de Low de Daniel Keene.
Pour moi Emma et Sam incarnent les amants désoeuvrés de notre siècle. Il n’est plus possible aujourd’hui d’être un rêveur, les rêves se buttent contre la réalité des autres. Sam s’est enfermé un jour pour pouvoir rêver, quand notre histoire commence ses rêves se sont taris.
Ces personnages me plaisent car ils sont désespérés et amoureux. D’être amoureux leur permet de rire de leur désespoir, leur histoire est tragique mais extrêmement vivante. Ils commencent à braquer des banques par nihilisme, je trouve cela très drôle car terriblement cynique. Leur but philosophique trouve une expression brutale, concrète et nourrie des clichés de leur époque. Ils ont trente ans, n’ont pas d’avenir et décident de s’en amuser.
J’éprouve une grande tendresse pour ces personnages qui, refusant les solutions qu’on leur propose, choisissent un chemin misérable et sans issue. Leur appartement a été le lieu des joies des autres, des bonheurs passés, mais eux ont toujours été malheureux dans cet endroit figé par la tristesse. A mon sens Emma décide que devant le néant il reste la liberté. La mise en scène accompagnera le choix d’Emma. Leur univers est explosé pour laisser place à l’expression brute de leurs désirs. La lumière se transforme autour d’eux, la musique les accompagne dans leur folie, leur chambre devient leur repère secret.
EMMA …Il était une fois deux tocards.
Sam sourit.
Deux tocards qui s’aimaient très fort. Ils étaient tellement perdus et depuis tellement longtemps qu’ils avaient fini par oublier pourquoi ils s’étaient perdus et comment. Un jour, plus sombre encore que les autres jours, ils décidèrent d’en finir. En finir avec quoi, ils ne le savaient pas, ils savaient juste qu’il fallait en finir. Ils n’avaient rien à perdre, ils s’aimaient et ils savaient que rien ne les séparerait. Il ne leur restait plus qu’à en profiter.
EMMA Sam ! Sam !
SAM Qu’est-ce qu’il y a ? Qu’est-ce que tu veux ? J’étais en train de rêver.
EMMA Tu rêvais de quoi ?
SAM Qu’on faisait un braquage.
EMMA Où ça ?
SAM Dans une pharmacie.
EMMA Tu perds pas le Nord.
SAM Jamais.
EMMA Et on réussissait ?
SAM Si tu m’avais pas réveillé je suis sûr que oui.
EMMA Alors il faut le faire.
SAM Quoi ?
EMMA Ton braquage.
SAM Qu’est-ce que tu racontes ?
EMMA A partir de maintenant, on va vivre comme dans ton rêve.
EMMA J’ai rêvé que j’étais morte cette nuit.
SAM Merde, la tuile.
EMMA Pour qui ?
SAM Pour nous.
EMMA Tu y as déjà pensé ?
SAM Oui.
EMMA J’étais morte de quoi ?
SAM De connerie.
EMMA J’aurais pu mourir d’un accident.
SAM Désolé.
EMMA Je veux que ce soit toi qui t’occupes de mon enterrement, personne d’autre.
SAM Compte sur moi. T’auras des funérailles nationales, comme tous les grands de ce monde.
EMMA N’oublie pas la musique, c’est important la musique.
SAM J’oublierai rien.
EMMA Tu crois que j’irai au ciel ?
SAM Comme tous les cons.
EMMA On se séparera jamais alors.
SAM Pas si on meurt en même temps.
EMMA Tu vois, il y a une solution à tout.
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