Il s’agit d’une traversée de l’histoire de la musique portugaise, depuis l’âge d’or de sa polyphonie, audacieuse ou séraphique, jusqu’à la figure majeure d’Emmanuel Nunes. Ses timbres moirés évoquent les peintures de Vieira da Silva, tandis que les voix a cappella empruntent au théosophe Jakob Boehme et entonnent un dense chant d’amour.
Emmanuel Nunes (1941-2012) revendiquait une conception de l’écriture comme organisme vivant. Dans Versus III, un duo fusionne ou se scinde, magnifiant une ligne, la vigueur des rythmes, la souplesse de la forme et la variété des modes de jeu. Réécriture d’une œuvre antérieure, Omens II désigne, par son titre, en français les « présages », en portugais les « hommes ». Un humanisme fait des riches couleurs et textures. Et par le son, au travers duquel toutes les autres qualités s’expriment, Minnesang décline le thème spirituel de la faculté de nommer.
On ne sait rien ou presque de Vicente Lusitano, sinon qu’il serait né à Olivence ( ? – 1561), qu’il est sans doute le premier compositeur noir publié dans l’histoire de la musique et que son motet Heu me domine, aux chromatismes hardis, figurait en appendice d’un traité publié à Rome en 1553. Quant à Manuel Cardoso (1556-1650), dont l’essentiel de la carrière se déroula entre les murs du Couvent des Carmes de Lisbonne, nombre de ses œuvres ont été détruites lors du tremblement de terre de 1755. Mais il nous reste des merveilles, dont cet Introit au style sublime, fidèle aux règles séculaires et comme éternelles du contrepoint.
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