En même temps

du 21 au 23 novembre 2008

En même temps

Une observation introspective et digressive de l'histoire de l'humanité, de l'étrange construction du monde, ou de celle de la langue russe… Un individu qui tente de se construire une approche personnelle de la réalité, en mettant en doute tout ce qu'on lui a inculqué.Spectacle en russe, traduction simultanée.

Spectacle en russe, traduction simultanée.

Présentation
Moscou sur scène - Nouveau Théâtre russe
Ni « maîtres » ni « disciples »
Entretien avec Evguéni Grichkovets
Evguéni Grichkovets au détour de ses propres mots

Une observation introspective et digressive de l'histoire de l'humanité, de l'étrange construction du monde, ou de celle de la langue russe… Un individu qui tente de se construire une approche personnelle de la réalité, en mettant en doute tout ce qu'on lui a inculqué.

A voir les avions dans le ciel, les trains qui s’ébranlent, les soldats qui partent à la guerre, le coeur se gonfle d’espérance. On passe sa vie à attendre de grandes émotions, comme le passage à l’an 2000, ou un tête à tête avec la Joconde… Et puis, on apprend que les cheminots qu’on croyait héroïques parce qu’ils traversaient toute la Russie passent leur vie à effectuer de minables allers-retours. Ou bien, quand arrive le moment tant attendu, on est déçu, tellement déçu.

Pourtant, parfois, quelque chose dépasse : l’émotion nous assaille, inopinée, et c’est alors qu’on se sent vraiment vivant. Facile à dire, mais plus difficile à faire partager. C’est ce à quoi parvient Grichkovets, avec trois bouts de ficelle : des avions en papier, un casque, uneépée, une musique géorgienne… On est immédiatement embarqué dans son univers insolite, on partage ses souvenirs, ses désirs, séduits, amusés, et plus fou encore on parvient à saisir, bouleversés, tout ce qui traverse l’esprit du comédien En même temps !

En même temps est le troisième volet d'une trilogie inédite d'Evgueni Grichkovets. Spectacle en russe, traduction simultanée par Arnaud Le Glanic.

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Après Londres sur scène, en 2000, voici Moscou sur scène, un instantané du théâtre russe le plus actuel, qui se déroulera du 15 novembre au 22 décembre 2002 dans cinq théâtres parisiens : le Théâtre de la Bastille, le Théâtre Molière-Maison de la Poésie, le Théâtre de la Cité Internationale, le Théâtre Paris Villette et le Théâtre Silvia Monfort, à l’initiative de la Mairie de Paris, la Mairie de Moscou et l’AFAA (Association Française d’Action Artistique).

Plus de soixante-dix artistes moscovites viendront à Paris présenter huit créations de différents genres et esthétiques. La grande majorité des participants, auteurs dramatiques, metteurs en scène et comédiens ont à peine trente ans. Ni « maîtres », ni «  disciples », ils pratiquent en toute indépendance un théâtre libre et novateur.

La plupart des spectacles sont présentés en langue russe avec surtitrage ou traduction simultanée en français.

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Pendant deux ans, les directeurs des théâtres parisiens, forts de leur expérience internationale, ont sillonné Moscou à la recherche de nouveaux talents et de pièces susceptibles de refléter l’actualité et le dynamisme du théâtre moscovite.

Au cours de la décennie passée, on a pu découvrir, en France, les grands metteurs en scène du théâtre russe tels que Lev Dodine, Anatoli Vassiliev, Piotr Fomenko… dont les spectacles ont été accueillis aux Festivals d’Avignon, d’Automne, à l’Odéon-Théâtre de l’Europe, à la M.C. 93 de Bobigny… Durant cette période, le théâtre russe faisait face à de rudes contraintes. La transmission de « maître » à « disciple » constituait le principal moyen de survie à la fois artistique et économique.

Dès 1998, quelques alternatives voient le jour. Lioubimovka et le Festival du Nouveau Théâtre Européen (NET), à Moscou, ou Lectures en mai à Togliatti participent à une « réinvention » de la pratique théâtrale en Russie. Des ateliers d’écriture, des éditions de textes contemporains et des espaces d’expérimentation scénique permettent en toute indépendance aux jeunes auteurs, metteurs en scène et comédiens de développer et de confronter leur expérience.

En 2000, certains d’entre eux sont invités en Angleterre, en Allemagne et en Autriche, puis en 2001, le projet Miroir Est-(Ou)est permet leur découverte en France avec, notamment, la publication de sept « nouveaux auteurs russes » au Editions Les Solitaires Intempestifs et leur invitation au festival Passage à Nancy.

Portée par les énergies accumulées dans les circuits alternatifs du théâtre, cette « nouvelle génération » a récemment inauguré à Moscou de nouveaux lieux de création : Centre Théâtral Meyerhold, Centre de la Mise en Scène et de la Dramaturgie, Théâtre.doc. 

Le Comité de la culture de la Ville de Moscou, les Olympiades Théâtrales 2002, le Festival Tchekhov 2003, le festival national Masque d’Or lui accordent un soutien de plus en plus important. Certaines grandes institutions moscovites qui voient en elle une relève, lui ouvrent aujourd’hui ses portes.

Le festival national Novaïa Drama qui s’est déroulé en juin 2002 a fait état de sa diversité, de sa fraîcheur et de sa vivacité et confirmé Moscou dans sa position de carrefour des potentiels artistiques de la Russie.

« Tout en simplifiant, en renonçant à la sincérité, en perdant l’amour de la finesse psychologique et du jeu du sous-texte, le théâtre tend à une attractivité émotionnelle, à une force intelligible des passions, à la clarté des caractères et des destinées. Il est devenu plus dynamique et, ce qui est important, aspire à devenir plus sensuel qu’auparavant. » commente Alexandre Sokolianski, critique dramatique et professeur au GITIS. 

Cinq des sept spectacles présentés dans le cadre de Moscou sur scène sont des textes contemporains tous produits au cours des cinq dernières années : La Pâte à modeler de Vassilii Sigariov, La Sensation de la barbe de Ksenia Dragounskaïa, Les Rêves de Ivan Viripaev, Comment j’ai mangé du chien et En même temps d’Evgueni Grichkovets. Les Apiculteurs, un spectacle conçu et mis en scène par Nikolaï Rostchine, offre un exemple assez rare, dans le théâtre russe, d’une conception purement visuelle. Enfin, Entre nous [3] est l’aboutissement d’un travail mené depuis dix ans dans toute la Russie par Christophe Feutrier.

C’est de cette actualité que les directeurs des théâtres parisiens, rassemblés autour de Moscou sur scène à l’initiative de la Mairie de Paris, de la Mairie de Moscou et de l’AFAA, ont souhaité faire état dans leur programmation. 

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  • Entretien avec Evguéni Grichkovets

Comment concevez-vous la représentation théâtrale ?
Quand j’ai commencé à jouer dans un théâtre normal, le public a d’abord été le public habituel de ce théâtre et j’ai très vite compris que je n’avais aucune chance de traverser ce public-là pour atteindre le mien. C’est alors que j’ai demandé à jouer mes spectacles à 21h30. Pour que les jeunes viennent me voir, eux qui ne sortent pas à sept heures du soir comme c’est la tradition. Car voir un spectacle à 21h30, c’est presque comme se rendre à un club. En hiver, je joue aussi mes spectacles le samedi et le dimanche à quatre heures de l’après-midi. Donc à un moment de congé. Pour que les spectateurs viennent au théâtre sans se presser et n’engagent pas pour autant leur soirée. Autant d’entorses à la tradition -des idées simples pourtant- que j’ai réalisées presque sans m’en apercevoir.

Je ne crée pas mes spectacles dans le théâtre où je les joue. Pour que tout le monde comprenne qu’ils ne sont pas les spectacles de ce théâtre, mais mes spectacles. Et puis il y a aussi Dreadnoughts que je joue dans un club de nuit le lundi, le soir où il n’y a pas de musique. On dispose des chaises en carré. Ce qui me plaît le plus dans ce club : l’énorme fenêtre derrière moi -genre quatre mètres- qui me permet de jouer sur fond de Moscou. J’y mentionne comme scénographes un certain nombre d’architectes dont on voit le travail dans mon dos. J’autorise aussi le public à fumer pendant le spectacle et ce que j’aime beaucoup, c’est que, dans les moments particulièrement tendus, je commence à entendre le bruit des briquets. Et puis parfois les gens n’y tiennent plus et vont au bar prendre un peu de Cognac. Les barmen, qui adorent le spectacle, interdisent qu’on fasse du bruit et tout le service se fait dans un grand silence. C’est comme ça que vit mon théâtre.

Autre chose : je rencontre souvent mon public dans le métro. Il m’interroge :« Ah, mais vous prenez le métro ? » Et je leur réponds : « Eh oui, figurez-vous que je vais au spectacle. » Pour les gens, c’est un choc. Nous prenons le même métro, le même wagon, pour nous rendre au même spectacle. Mais ceci-dit je n’habite pas Moscou. J’aime Moscou, cette ville où convergent tous les possibles, la ville la plus avide de ce qui se trouve hors de ses limites et où tout se concentre. C’est très bizarre, il semble toujours que Moscou soit en train d’attendre quelque chose.

Pourquoi avez-vous choisi d’habiter Kaliningrad ?
À Kaliningrad, il y a la mer. Et puis je suis habitué à vivre dans une petite ville. Et puis Kaliningrad ce n’est pas tout à fait la Russie et ce n’est pas encore l’Europe. Et puis j’ai déjà dit que c’était la ville dans laquelle tout le monde était venu. C’est donc très facile d’y vivre. Il n’y a rien de particulier à cela. Parce que si tu arrives dans une vieille ville de la Russie centrale d’où jamais personne n’est parti et personne n’est venu : tu y seras toujours un étranger, toute ta vie. Moscou au contraire est une ville très ouverte. Elle vous accueille pleine de joie, vous suce le jus et vous jette aussi vite qu’elle vous a adorés.À Moscou, il faut avoir une sensation très claire de ses propres limites et interdire à quiconque de les franchir. C’est assez difficile. C’est pourquoi je ne peux pas y être tout le temps. Mais c’est à Moscou que se trouve le public qui m’aime et donc je ne peux rien dire de mal sur Moscou. Il y a là beaucoup de gens qui m’attendent. Résumons : Kaliningrad, c’est la ville où j’habite ; Moscou la ville où je n’habite pas et où je fais tout. Et c’est pour ça que j’arrive à aimer ces deux villes.

Donc vous écrivez dans le train.
Non. En général j’écris peu. Peu dans le temps, très vite et je ne corrige presque jamais. Mais chaque texte me prend plus d’un an de travail. Je n’ai même pas de journal intime. Si une idée me plaît, je ne la fixe pas. Si elle s’oublie, c’est qu’elle n’était pas si bonne. Je ne crois pas aux écrivains qui voyagent avec leur journal intime ; qui observent la vie. Parce que je dis toujours que les gens ne vivent pas pour que quelqu’un les observe.

Comment êtes-vous venu au théâtre ?
En fait, c’est très bizarre. Le théâtre est la dernière des activités qu’on puisse imaginer à Kemerovo, ma ville natale en Sibérie. Dans cette ville, il n’y a jamais eu et il n’y a pas de bon théâtre. Et beaucoup plus important encore, il n’y a pas d’atmosphère où puisse naître du théâtre, encore moins le théâtre que je peux faire, moi. C’est une petite ville - dans les proportions de la Russie -, une ville industrielle, et le problème essentiel de ce genre de ville de Sibérie, c’est que rien ne s’y accumule. Il n’y a aucun terreau pour que quelque chose puisse s’y accumuler. Dès qu’une personne acquiert la moindre importance culturelle, elle quitte aussitôt la ville.

Or le théâtre doit se baser sur un lieu précis et sur une durée certaine. Et quand nous avons construit notre théâtre, la chose la plus terrible dont nous avions déjà conscience était qu’il ne vivrait pas dix ans. Néanmoins nous l’avons construit. Et maintenant il n’existe plus. Je ne sais pas comment cela se fait. Pour aucune raison précise, mais plutôt en dépit de nombreuses raisons. Mon théâtre à Kemerovo comme ailleurs n’a jamais été un théâtre de protestation, ni social, un tant soit peu politique, encore moins bourgeois. J’ai simplement eu besoin de ce théâtre pour pouvoir vivre dans cette ville ; je me suis inventé un territoire où la vie m’était possible.

Le public est-il venu vous voir à Kemerovo ?
À ce moment-là je ne jouais pas ; je travaillais alors en tant que metteur en scène avec cinq acteurs. Quant au public, il s’est formé en l’espace de deux ans. Et le plus intéressant, c’est que ce public qui, à Kemerovo, n’avait pas vu d’autre théâtre supposait que ça c’était le théâtre normal, vu que c’était le premier théâtre qu’ils voyaient de leur vie. Et c’est pourquoi quand je rencontre des gens qui ont vu mes spectacles dans les années 90, puis d’autres spectacles, ils me disent que les mises en scène classiques leur paraissent très bizarres puisque depuis le début ils se sont habitués à regarder mes spectacles. C’est-à-dire que moi, pour les habitants de Kemerovo, je suis un classique.

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  • Evguéni Grichkovets au détour de ses propres mots

« Je ne suis plus un nouveau sentimentaliste mais un romantique. Un néo-romantisme urbain, celui qui parle des villes à travers le prisme des gens, de ces petites fourmis qui y vivent. » « Quand j’ai commencé ma période de théâtre moscovite, j’ai commencé par parler de mon enfance, de ma jeunesse, de mon adolescence et aujourd’hui je me rapproche de mon âge, mon théâtre me rattrape. J’ai complètement aboli la distance entre mon théâtre et moi-même. Depuis, je me sens en prise avec la réalité et je peux donc écrire sur les sentiments que j’éprouve : l’amour, la solitude et les doutes qui m’assaillent. ». Propos recueillis par Zoé Lin, le 9 décembre 2002 pour « L’Humanité ».

« Je connais bien le sentiment qui correspond à « j’existe ». Mais que signifie « je n’existe pas » ? C’est vrai que j’ai parfois le sentiment : « Il vaudrait mieux que je n’existe pas. » Ce sentiment apparaît par exemple le matin qui suit une fête, et c’est un sentiment assez fort. Mais ce n’est pas non plus de ça que je parle. Non ! Je connais la joie qui vient de la sensation d’exister. Par exemple quand on est assis près d’un feu de bois… (…) Quand le feu a pris toute cette obscurité et cette obscurité s’est rapprochée très près de toi, et là, dans les ténèbres de la forêt, tu sens la présence d’un loup. Et (…) tu te blottis contre le feu. Là-bas, dans le ciel, il y a les étoiles, et des étincelles du feu s’envolent vers les étoiles en suivant des trajectoires capricieuses, et, apparemment, les atteignent. Et venant semble-t-il des étoiles, des papillons de nuit volent jusqu’à toi. A cause de tout ça, une angoisse s’empare de toi, mais c’est une angoisse si… agréable.(…) Parce que toute cette angoisse vient de ce que tu ressens de manière très aiguë que tu existes et que tu es très petit. Tu es très petit mais tu existes ! Et ton petit feu est visible de l’autre côté de la rivière, il émet une lumière vive, et tu as ta propre température corporelle, qui est quand même plus élevée que celle qui t’environne, et beaucoup plus élevée que celle du cosmos.  » (extrait de Planète )

« La première chose qu’ils ont déterré, c’étaient ses pieds… avec les chaussures. Les chaussures étaient lacées avec des lacets en cuir. Et le noeud des lacets faisait des boucles…Des boucles. De longues boucles. J’ai vu le noeud fait il y a un peu plus de cinquante ans par un être humain vivant. Il avait fait ses lacets, et puis il était mort. Il les avait faits exactement comme moi je fais les miens. (…) Quand j’ai vu ces chaussures, j’ai simplement pour la première fois de ma vie rencontré un soldat allemand vivant, c’est-à-dire un soldat de cette guerre-là. Et ma relation à la guerre est devenue encore plus compliquée. Beaucoup plus compliquée. » (extrait d'En même temps)

« C’est tellement important, ressentir fortement quelque chose, ressentir… Pas une douleur…, parce que la douleur ça vient d’ici, c’est-à-dire quand on a mal, ça vient d’ici. (Il montre le schéma anatomique.) Je veux dire - Ressentir !… Pas un goût, ni même une joie…, mais une situation. Une situation ! Ressentir ce qui existe. » (extrait d'En même temps)

« Et j’avais aussi envie de trouver ces femmes blessées, ou gelées, ou malades ou dans une situation horrible quelconque… et de les sauver, de les guérir, de les sortir de là. Et d’être récompensé de la manière la plus merveilleuse… Et je devinais déjà dans quelle direction, de quelle nature devait être cette récompense. Mais comment les choses se passaient dans la pratique, ça c’était pour moi le plus brûlant mystère. » (extrait d'En même temps)

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Informations pratiques

Théâtre Silvia Monfort

106, rue Brancion 75015 Paris

Accès handicapé (sous conditions) Bar Restaurant
  • Métro : Porte de Vanves à 417 m
  • Tram : Brancion à 251 m
  • Bus : Morillons - Brancion à 104 m, Brancion - Morillons à 166 m, Fizeau à 186 m, Porte Brancion à 236 m, Vercingétorix - Paturle à 360 m
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Plan d’accès

Théâtre Silvia Monfort
106, rue Brancion 75015 Paris
Spectacle terminé depuis le dimanche 23 novembre 2008

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