« Pourquoi les branches poussent-elles encore, alors que la racine est desséchée ? Pourquoi les feuilles ne se dessèchent-elles pas alors qu’elles sont privées de leur sève ? » Shakespeare
Des lettres, adressées à des républicains espagnols réfugiés à Marseille en 1939 sur des bateaux hôpitaux, étaient oubliées aux Archives Départementales et ont été trouvées en 2000 par l’historien J-J. Jordi.
La connaissance de leur existence en 2004 m’a donné l’envie de rendre voix à ces paroles oubliées. J’ai donc donné à un montage d’extraits de ces lettres la forme d’une seule lettre composée de centaines de voix et je l’ai intitulée Lettres Mortes.
Ce temps de lectures et de découvertes ayant été nourri de rencontres (humaines, littéraires, historiques, témoignages écrits, fictions et documents), il a inspiré l’écriture d’un texte théâtral sur le thème de la déchirure (guerre civile et exil) intitulé Exilio. Je souhaite que la part de fiction utilisée pour porter cette histoire ne trahisse pas les faits réels qui l’ont inspirée.
Janvier 1939, fin de la guerre d’Espagne. Deux républicains espagnols vivent côte à côte ces derniers jours de lutte, puis l’exode, la traversée de la frontière et la découverte des camps de concentration. Par leurs témoignages se font entendre les voix de leurs compagnons et l’aventure de milliers d’Espagnols contraints de fuir leur pays pour avoir tenté d’y défendre leur idéal de justice et de liberté. Deux personnages dont les différences n’empêcheront pas l’amitié mais orienteront autrement les chemins à inventer pour continuer de vivre.
C’est autour de la notion de déchirure qu’est bâtie la mise en scène. Un plateau nu où seuls les éclairages dessinent les zones (fragmentées ou assemblées) de guerre, de froid, de peur ou de douleur qu’évoquent les deux personnages. Déchirure des idéaux, des familles, d’une société et finalement d’un pays qu’une grande part de la population se voit contrainte d’abandonner. Une destruction que rien n’illustre d’autre que la rigueur du jeu d’acteurs et la sobriété d’une diction travaillée musicalement.
Sara Sonthonnax
136, rue Loubon 13003 Marseille